CARTOGRAPHIE
Description cartographique de la Terre
Cartographie ancienne
Dès l’Antiquité, les hommes ont cherché à représenter leur territoire et à mémoriser des itinéraires. Jusqu'au xviie siècle, les cartographes se sont surtout préoccupés de donner une image d'ensemble de la Terre au fur et à mesure de sa découverte. Ils procédaient par compilation des connaissances acquises par les voyageurs et les marins, reportées sur des canevas de projection construits à partir d'observations astronomiques de plus en plus précises.
Les premières ébauches de croquis cartographiques précédèrent certainement l'invention de l'écriture. Des tablettes d'argile montrent que, trente siècles avant J.-C., on s'efforçait déjà de représenter des contours et des itinéraires. Les peuples navigateurs, en particulier les Phéniciens, ont décrit des « périples » et relevé le tracé des côtes qu'ils fréquentaient. De même, les opérations cadastrales égyptiennes ont entraîné des travaux d'arpentage importants. Mais ce sont les savants grecs qui ont fourni les premiers éléments objectifs de la géographie mathématique et de la cartographie.
En effet, ces derniers ont élaboré un véritable système de représentation du monde et jeté les bases de la cartographie. Thalès de Milet (env. 625- 547) conçoit la rotondité de la Terre, ce que confirmera quelques siècles plus tard Aristote, en s'appuyant sur l'image des bateaux disparaissant progressivement à l'horizon comme aspirés par la mer. La connaissance de la sphéricité de la Terre permit dès les vie-ve siècles avant J.-C. de fixer un cadre aux connaissances géographiques que les campagnes d'Alexandre (356-323) aideront à élargir. Au vie siècle avant J.-C., Anaximandre et Hécatée ébauchent les premières cartes, centrées sur la Méditerranée. Au ive siècle avant J.-C., Dicéarque (347-285) invente la première construction géométrique en situant tous les points connus par rapport à deux axes : l'un ouest-est, le « diaphragme », et l'autre, la « perpendiculaire », tous deux passant par Rhodes au 36e degré de latitude nord. Au iiie siècle, Ératosthène (275-194), bibliothécaire d'Alexandrie, exécute la première mesure de la circonférence terrestre avec une précision surprenante ; malheureusement ses successeurs, notamment Posidonios de Rhodes (135-50), réduisirent considérablement cette dimension, ce qui devait avoir des conséquences curieuses. À la suite d'Ératosthène, Hipparque (190-125) inventa la première projection, dite « carte plate parallélogrammatique », lointain ancêtre de la projection de Mercator.
Tout le savoir grec est résumé au iie siècle après J.-C. par un astronome et géographe grec, Ptolémée, né à Alexandrie (90 env. - env. 168). Dans la vision de celui-ci, la Terre ronde s'inscrit au centre de l'Univers. Un quart seulement du globe est habité, c'est l'œcoumène, isolé par un océan infranchissable. Ptolémée détermina par le calcul la latitude et la longitude de huit mille points. Malheureusement, sur des canevas savants, Ptolémée accumula les erreurs de positions et adopta pour la circonférence terrestre la mesure erronée de Posidonios. Son œuvre, conservée par les Arabes, sera redécouverte en Europe au xive siècle : en trompant les navigateurs de la Renaissance, l'erreur de Ptolémée sera une cause indirecte de la découverte de l'Amérique.
Malgré ses graves défauts, la cartographie grecque antique contient déjà toutes les notions fondamentales de la cartographie moderne : sphéricité de la Terre, mesure des latitudes et, moins précisément, des longitudes, coordonnées terrestres, systèmes de projection. Son caractère essentiel est d'être une cartographie d'ensemble, visant à donner une image globale du monde alors connu ou supposé, telle que, par exemple, la figure du globe de Cratès vers 150 avant J.-C.
Cette impulsion spéculative extraordinaire ne se perpétua pas à Rome, où l'on se préoccupait surtout d'itinéraires terrestres. De l'Antiquité romaine, aucun document original ne semble avoir été conservé, sinon une copie tardive (xiiie siècle) connue sous le nom de « table de Peutinger », où les villes importantes sont marquées par des monuments, et les routes par des lignes portant indication des distances. Après la chute de l'Empire romain, dans une Europe en régression culturelle, les cartographes se bornent à déformer la réalité au gré de la décoration ou de la propagande. Il ne reste plus que des figurations conventionnelles, mélanges de connaissances géographiques et de symboles religieux.
Moyen Âge et Renaissance
Au Moyen Âge, la conception géocentrique du monde est commune à la chrétienté et à l’islam. En Occident, les mappemondes médiévales mettent en scène une représentation symbolique comme dans les cartes en T-O (pour Terrarum Orbis) où les trois parties de la terre habitée, telles que les fils de Noé se la sont partagée, s'inscrivent dans le O de l'anneau océanique, séparées par un T dont la hampe figure la Méditerranée et les branches le Tanaïs (le Don), limite traditionnelle entre l'Europe et l'Asie, et le Nil.
Dès le ixe siècle, les Arabes, en revanche, disposent d’une véritable bibliothèque des écrits scientifiques grecs qu’ils traduisent en arabe. Ils connaissent donc les œuvres de Ptolémée et des savants grecs et les adaptent à leur vision du monde. Les mappemondes arabes privilégient deux types de représentations : celle de la terre habitée dans la tradition de Ptolémée (abstraites et peu illustrées), et celle consacrée au monde musulman rassemblé autour de La Mecque. Les Arabes accomplirent une œuvre cartographique importante. Leur plus grand voyageur et géographe, Idrisi (1100 env.-1165), construisit une carte qui s'étend de l'Europe occidentale à l'Inde et à la Chine, et de la Scandinavie au Sahara. Elle peut passer pour la somme des connaissances géographiques arabes vers le milieu du xiie siècle.
En Europe, le renouveau ne se fait guère sentir qu'à partir des xive-xve siècles. C'est l'emploi généralisé de la boussole qui, vers le xiiie siècle, est à l'origine de toute une série de cartes, les « portulans », servant à la navigation de port à port. Peints sur parchemin, ils indiquent le nom des ports, perpendiculairement au rivage, ainsi que les îles, abris et amers. Un réseau de directions par rapport au nord magnétique y facilite la détermination des caps. On y trouve de nombreuses indications sur les rivages, mais aucun renseignement sur l'intérieur des terres. Des dynasties de cartographes y travaillent à Gênes, à Venise, à Florence, en Sicile. Émules des Italiens, les Catalans de Barcelone et de Majorque se préoccupent surtout des routes de l'océan et de l'Extrême-Orient. Mais la différence est grande entre la précision du tracé des côtes familières de la Méditerranée, et le caractère plus ou moins imaginaire des tracés hérités des cartes de Ptolémée. Les portulans sont le grand apport médiéval à la cartographie. À partir du xvie siècle, un canevas géométrique conforme s'ajoute aux lignes de direction dérivées de la boussole : on s'approche des cartes marines qui seront mises à la disposition des navigateurs.
En 1492 apparaît le premier globe connu de la Renaissance, celui de Martin Behaïm, de Nuremberg, qui tente d'ajouter les connaissances acquises par les portulans à celles transmises par la tradition de Ptolémée. Sur ce globe, la distance entre l'Europe et l'Asie est ramenée à 120 degrés, comme sur la carte de Toscanelli (1474) que Colomb eut sous les yeux pendant son premier voyage.
Les grands voyages de Colomb (1492-1498), de Vasco de Gama (1497-1499), de Balboa (1513), de Magellan et El Cano (1519-1522), suivis par les marins anglais et français et par les conquistadores espagnols, élargirent considérablement la connaissance géographique de la Terre. En 1507, le géographe allemand Martin Waldseemüller publia une carte du monde en douze feuilles sur laquelle apparaît pour la première fois à l'ouest une terre distincte de l'Asie, dénommée America en l'honneur du navigateur florentin Amerigo Vespucci. Disposant, grâce aux portulans, d'un bon tracé des côtes, les cartographes s'efforcent de compléter le dessin de l'intérieur des terres en y représentant le maximum de détails, certains encore empruntés à Ptolémée. Ainsi, des cartes marines vont naître les cartes continentales locales.
Les maîtres de cette cartographie nouvelle ne furent plus des navigateurs, mais des mathématiciens ou des astronomes, allemands ou flamands principalement. Des projections originales furent proposées pour englober l'ensemble de la Terre. Le Flamand Gerhard Mercator (1512-1594) représenta le monde connu (1569) sous la forme d'un ensemble de dix-huit feuilles. Il utilisa à cet effet un canevas conforme, inspiré des portulans, sur lequel méridiens et parallèles se recoupent à angles droits, mais dont l'écart entre les parallèles augmente avec les latitudes croissantes. Ce canevas est encore employé pour les cartes marines et, sur certains atlas, pour la représentation des basses latitudes. À la même époque un autre Flamand, Abraham Ortelius (1527-1598), publia (1570) un Theatrum orbis terrarum en cinquante-trois planches portant soixante-dix cartes, qui peut être considéré comme le premier grand atlas universel. L'ensemble de la Terre y était représenté sur une mappemonde où Ancien et Nouveau Mondes figurent chacun dans un cercle divisé par des méridiens courbes recoupant l'équateur en parties égales.
À la fin du xvie siècle, le monde est conçu et représenté dans sa forme et ses proportions réelles. L'Europe occidentale, grâce à la gravure sur bois ou sur métal et à l'imprimerie, devient un centre de confection et de diffusion de cartes rationnelles, capables de recevoir l'adjonction de toute nouvelle découverte.
Cartographie classique
À partir du xviie siècle, les États s'intéressent à la cartographie, notamment pour des raisons militaires. Les nécessités de l'administration et de la guerre exigèrent des cartes plus détaillées et à plus grande échelle. Elles justifièrent l'introduction de la géodésie et de la topographie dans le levé des cartes régionales. Les mesures d'arcs de méridien, la création du corps des ingénieurs géographes, la figuration du relief, la réalisation de la première grande carte détaillée de la France marquèrent les débuts des cartes géométriques nationales.
En France, l'Académie des sciences confia à l'un de ses membres, l'abbé Jean Picard (1620-1682), la détermination d'un arc de méridien de Paris à Amiens (1669-1670). En 1683, La Hire vers le nord (1683-1718) et Jean-Dominique Cassini et son fils Jacques vers le sud (1683-1702) entreprirent de prolonger la mesure de Picard à toute la méridienne de Paris. Il s'agissait par la même occasion de vérifier la récente hypothèse de Newton sur l'aplatissement de la Terre. La preuve définitive en fut apportée par les mesures similaires effectuées au Pérou par Pierre Bouguer et Charles-Marie de La Condamine (1735-1743), et en Laponie par Pierre Louis Moreau de Maupertuis et Alexis Claude Clairaut (1736-1737).
Bien que progressant plus lentement, la cartographie profita des succès de la géodésie. On assiste à une prolifération de cartes et de plans à grande échelle à des fins militaires : en 1688, le « dépôt de la guerre » créé par Louvois est chargé de leur conservation ; et en 1696, le corps des « ingénieurs des camps et des armées » créé par Vauban (qui deviendra au xviiie siècle le corps des « ingénieurs géographes ») est chargé de leur exécution. En même temps, sous l'impulsion de Colbert, une cartographie complète du royaume est entreprise et, en 1682, La Hire peut présenter à Louis XIV la première carte d'ensemble de la France tenant compte de toutes les mesures effectuées jusqu'alors.
Ce n'est pourtant que dans la seconde moitié du xviiie siècle que fut réalisée la première carte géométrique de la France à moyenne échelle (1 :86 400), appuyée sur une nouvelle triangulation générale exécutée de 1733 à 1744. Cette carte, dite carte de Cassini, ou de l'Observatoire, ou de l'Académie, fut l'œuvre de César François Cassini (1714-1784) et de son fils Jacques-Dominique (1748-1845). Le territoire fut divisé en cent quatre-vingt-deux feuilles. Commencés en 1748, les levés étaient pratiquement achevés en 1789, après bien des vicissitudes ; mais les dernières feuilles ne virent le jour qu'en 1817. Pendant un siècle et demi, la carte de Cassini resta, malgré ses imperfections, le modèle dont s'inspirèrent les cartographes du monde entier.
Parallèlement, la cartographie générale se poursuivait avec le souci principal de réaliser des documents d'une incontestable exactitude. En France, Guillaume Delisle (1675-1726), créateur d'un système de projection conique, publia des mappemondes fondées sur des observations astronomiques et incluant les plus récentes découvertes. Il eut pour collègue et continuateur Jean-Baptiste Bourguignon d'Anville (1697-1782). Au xviiie siècle, le mathématicien Jean Lambert (1728-1777) détermina les paramètres des projections coniques conformes et équivalentes qui portent son nom. Et c'est l'ingénieur hydrographe Rigobert Bonne (1727-1794) qui, par une mise au point mathématique de la vieille projection de Ptolémée, établit le canevas équivalent sur lequel sera construite la future carte de France dite de l'état-major.
Rigueur et précision sont les legs principaux faits par la cartographie classique à la cartographie moderne.
Cartographie moderne
La période moderne de la cartographie topographique commence avec les grandes réalisations du xixe siècle. Elle est notamment illustrée en France par la carte de l'état-major, au 1 :80 000 en hachures, qui servit de prototype à plusieurs autres cartes européennes. Les travaux de cette carte, commencés en 1818, durèrent jusqu'en 1880 (et même 1882 pour la Corse). Construite sur le canevas de Bonne, appuyée sur la méridienne mesurée par Jean-Baptiste Delambre et Pierre Méchain en 1792-1799 et sur une nouvelle triangulation achevée en 1863, elle comprend deux cent soixante-treize feuilles (plus neuf pour la Corse). Le figuré du relief dérive de courbes de niveau équidistantes de 10 mètres qui, à la mise au net, étaient remplacées par des hachures d'autant plus serrées que la pente était plus forte. Tenue régulièrement à jour, elle est restée en service jusqu'en 1958. Les conflits du xixe siècle stimulent la production de cartes à grande échelle en Europe, puis en Afrique, en Océanie et en Amérique du Sud, parallèlement à l'expansion de l'Occident.
Au début du xxe siècle, la cartographie profite des progrès de la géophysique dans la détermination de l'ellipsoïde comme du perfectionnement technique des instruments de mesure, de l'usage systématique de la photographie dans les traitements graphiques et du développement de l'impression polychrome. La première carte polychrome de l'ensemble de la France fut la carte au 1 :100 000 en cinq couleurs, dite carte du ministère de l'Intérieur, ou carte vicinale, qui fut commercialisée jusqu'en 1938. À partir de 1930, l'emploi de la photographie aérienne puis de la télédétection par satellites dans le levé du terrain, enfin l'introduction du traitement informatique des données et de l'automatisation des opérations graphiques marquent l'essor d'une ère nouvelle.
L'imprécision du 1 :80 000, même agrandi photographiquement au 1 :50 000, incitait à la rédaction d'une carte nouvelle. Confiés au service géographique de l'armée créé en 1897, les travaux commencèrent en 1901. Les levés au 1 :10 000 à la planchette et publiés au 1 :50 000 en quatorze couleurs n'avancèrent que lentement. Reprise en 1920, la carte ne comporte plus que cinq ou six couleurs. Les levés par stéréotopographie aérienne sont complétés sur le terrain et publiés au 1 :25 000. Ils constituent la carte de base du territoire français. Par réduction d'échelle et par généralisation graphique, cette carte est l'origine des autres cartes de France au 1 :50 000, au 1 :100 000 et au 1 :250 000. L'IGN qui, depuis 1940, a remplacé le service géographique de l'armée, publie de très nombreuses autres cartes, cartes du monde et cartes des États d'expression française auxquels il apporte une aide technique appréciable.
Le but essentiel de la cartographie reste dans tous les cas la représentation objective, exacte et précise au regard de l'échelle, des formes matérielles et des objets réels qui caractérisent l'espace géographique. La réalisation de telles cartes doit être précédée par des mesures de terrain destinées à doter le territoire étudié d'un réseau de référence de points rigoureusement contrôlés en position et en altitude. Ce sont les opérations géodésiques. Les opérations topographiques consistent à repérer, au sol ou par photographie aérienne, chacun des points remarquables de la surface à cartographier par rapport au canevas obtenu par la géodésie, puis à représenter les formes du terrain selon un système graphique conventionnel. Viennent enfin les opérations cartographiques proprement dites, qui ont pour but la rédaction et l'impression des cartes définitives.
Ainsi sont établies les différentes cartes représentatives de la surface terrestre. Une carte topographique est une représentation exacte et détaillée de la surface terrestre, concernant la position, la forme, les dimensions et l'identification des accidents du terrain, ainsi que des objets qui s'y trouvent en permanence. Le but de ces cartes est essentiellement pratique. La nécessité d'y retrouver tous les éléments visibles du paysage, et de pouvoir y effectuer des mesures de directions, de distances, de dénivellations et de surfaces, exige une échelle appropriée. Les cartes à très grande échelle, ou plans, sont réservées aux usages locaux. Les cartes à grande échelle (de 1 :10 000 à 1 :25 000) et à moyenne échelle (de 1 :50 000 à 1 :100 000), portant à la fois la planimétrie et le nivellement, sont les véritables cartes topographiques. Les cartes à petite échelle (inférieure au 1 :100 000), cartes chorographiques et cartes d'ensemble, sont des cartes dérivées ou de compilation, suffisamment réduites pour représenter les traits généraux d'une région, d'un État ou d'un continent. Une représentation plane de toute la Terre est un planisphère, ou une mappemonde si l'ensemble du globe est figuré sur deux hémisphères distincts. Le terme de globe doit être réservé exclusivement à une représentation cartographique sur une sphère.
Enfin, l'introduction de la cartographie automatique est l'événement le plus remarquable et le plus lourd de conséquences qui se soit produit dans le développement de la cartographie au cours des dernières décennies. La conception comme la réalisation des cartes en ont été bouleversées. Opérationnelle depuis 1960 environ, la cartographie automatique se perfectionne sans cesse avec une rapidité surprenante, et son usage est désormais de pratique courante. Elle a engendré le néologisme géomatique, né de la contraction de géographie et informatique. Celui-ci définit l’ensemble des technologies permettant de modéliser, de représenter et d’analyser le territoire pour en faire des représentations virtuelles : géolocalisation, imagerie spatiale, bases de données, système d’information géographique, systèmes décisionnels, technologies du Web…
Stocker sous forme de fichiers numérisés des informations pour pouvoir ensuite les traiter et produire automatiquement des documents graphiques de toutes sortes est l'objet de l' infographie. Appliquée à la cartographie, l'infographie est la cartographie assistée par ordinateur (CAO). Ainsi se créent un peu partout des systèmes d'information géographique (SIG). Apparus aux États-Unis dans les années 1960, ils se développent dans les années 1980. Leur but est de rassembler, d'organiser, de localiser, d'analyser et de gérer un lot sans cesse croissant et mis à jour de données cartographiables. L'informatisation touche donc toute la chaîne de production des cartes, depuis l'enquête sur le terrain ou la télédétection jusqu'aux sorties sur écran conversationnel ou sur imprimante en noir ou en couleurs. Tables à numériser, traitement statistique ou matriciel des données, traceurs électroniques commandés par ordinateur permettent l'exécution rapide et de qualité de multiples produits : visualisations d'essai ou de contrôle sur écran, changements d'échelle ou de projection, confection de typons d'imprimerie et même création de figures d'un nouveau type comme les anamorphoses ou les représentations en trois dimensions.
Les problèmes que rencontre la cartographie assistée par ordinateur tiennent moins à la réalisation technique des cartes qu’au choix et au coût du matériel et surtout à la collecte et à la mise en œuvre des données. La description de l'espace en mode numérique dans les banques de données, l'organisation et la création de l'image cartographique exigent du cartographe une grande familiarité avec les thèmes cartographiés. Débarrassé des soucis techniques par la machine, le cartographe n'est plus un simple dessinateur, mais un opérateur capable de maîtriser les concepts et les taxons de la discipline qu'il se charge d'illustrer.
La localisation des figurés en x et en y est relativement facile grâce aux traceurs automatiques ; mais les données qualitatives ou quantitatives en z sont loin d'être connues pour tous les points du plan. La source principale de documentation reste en effet l'enquête sur le terrain, nécessairement discontinue. Certes, la télédétection est exhaustive, mais elle ne prendrait toute sa valeur que si, comme peu de pays l'ont fait jusqu'à présent, les observations, réelles ou calculées, étaient rapportées à une grille dont les mailles seraient de mêmes dimensions que celles des unités d'image élémentaires, ou pixels, des documents satellitaires. Dans ces conditions, la figuration des cartes statistiques est plus facile que celle des phénomènes concrets. Les ordinateurs tracent automatiquement les lignes isarithmes (lignes joignant des points d’égale valeur), et la représentation par taches des statistiques administratives ne présente guère de difficultés. Mais les choses se compliquent avec l'introduction d'objets géographiques réels tels que formes du relief, hydrographie, bâtiments, voies de communication, etc. L' IGN a cependant réussi à effectuer automatiquement la carte de base de la France au 1 :25 000 à partir des photographies aériennes au 1 :30 000. Et on se préoccupe d'établir des SIG à partir de diverses données naturelles, géologiques, géomorphologiques, pédologiques, phytogéographiques, etc.
La consultation cartographique évolue actuellement vers les supports électroniques dont l’usage se généralise. Des applications mettent à disposition d’un large public des outils de visualisation du monde entier. Différents services de cartographie en ligne offrent des outils tels que calcul d’itinéraires, vues aériennes zoomables, calculs de dénivelés. Ainsi, la cartographie est aujourd’hui essentiellement dématérialisée.
Connaissance cartographique du monde
La connaissance cartographique du monde est loin d'être également avancée sur toute la Terre, au moins aux moyennes et aux grandes échelles. Cependant, le développement des capteurs numériques et la multiplication des instruments en orbite permettent de décrire les zones terrestres les plus inaccessibles comme l'Antarctique.
L'observation répétée d’un territoire depuis l’espace offre la possibilité, en outre, de suivre de façon dynamique de nombreux phénomènes comme l'assèchement de la mer d’Aral ou l’évolution de la végétation.
L’ensemble de ces mesures permet de cartographier par exemple le relief sous-marin et alimente des modèles mathématiques de prévision de l’état de l’atmosphère ou des océans.
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Écrit par
- Guy BONNEROT : ancien chef du service cartographie des Classiques Hachette
- Estelle DUCOM : maître de conférences en géographie, aménagement de l'espace et urbanisme à l'université de Paris-IV-Sorbonne, agrégée de géographie
- Fernand JOLY : professeur honoraire, université Paris-VII
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- PLAN, cartographie
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