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CALVINISME

Calvinisme et civilisation

Dans son ouvrage L'Éthique du Protestantisme et l'esprit du capitalisme, Max Weber a soutenu que le calvinisme est à l'origine du capitalisme. Calvin est le premier à avoir levé l'interdiction que l'Église avait dès ses origines fait peser sur le prêt à intérêt, sans pour autant s'interdire d'y recourir elle-même (banquiers du pape). En 1545, un gentilhomme bressan, Claude de Sachin, interrogea par lettre Calvin sur la légitimité du prêt à intérêt. La réponse de Calvin fut biblique. L'Écriture sainte n'interdit pas le prêt à intérêt, mais bien plutôt le mauvais usage qui en serait fait pour opprimer les pauvres. On peut donc le pratiquer dans la justice et dans la charité. Plus tard, les calvinistes ont su par leur austérité, leur goût de l'épargne, leur esprit d'initiative, accumuler des richesses. On ne peut pour autant rendre le calvinisme responsable d'une forme économique, le capitalisme, qui est le fruit d'une époque et non d'une conception religieuse.

Il ne faut cependant pas oublier que le calvinisme a créé une nouvelle optique de la vie et qu'il est, suivant le mot de l'historien Émile Léonard, « fondateur d'une civilisation ». Pour Calvin, la religion est une affaire de toute la vie. On n'adore pas le Dieu vivant en se séparant du monde, en s'enfermant dans des cloîtres, en se livrant à une ascèse stérile. Tout est affaire de vocation. Chacun est appelé par Dieu à une œuvre particulière et il doit, à la place où il a été mis, travailler pour la gloire divine. Toutes les professions sont légitimes et appartiennent à un ensemble que Dieu dirige. Il n'y a pas de clergé mis à part. Tout croyant est prêtre pour s'approcher de Dieu et lui rendre témoignage. Le signe de l'élection est cette joie au travail, cette reconnaissance aimante envers Dieu, cet amour du prochain, qui constituent la vie religieuse dans le monde. Cette intégration de la religion à la vie est une caractéristique essentielle du calvinisme. Elle a formé des hommes courageux, entreprenants, passionnément attachés à la liberté, ouverts sans crainte vers l'avenir.

Le calvinisme a été en France, pendant plusieurs siècles et, en particulier, pendant tout le xviiie siècle (1685-1787), une religion interdite, une religion persécutée. De là, son attitude parfois craintive en face de l'opinion ou du pouvoir, mais son goût pour la liberté reste entier.

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Écrit par

  • : doyen honoraire de la faculté de théologie protestante de Montpellier
  • : pasteur, président du journal Réforme

Classification

Pour citer cet article

Jean CADIER et André DUMAS. CALVINISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Jean Calvin - crédits : Imagno/ Getty Images

Jean Calvin

Autres références

  • ANTISÉMITISME

    • Écrit par Esther BENBASSA
    • 12 229 mots
    • 9 médias
    ...dans l'eucharistie –, les calomnies de meurtre rituel et de profanation d'hostie tendent en revanche à disparaître dans le monde protestant européen. C'est le courant calviniste, davantage ancré dans l'Ancien Testament, qui se montre finalement le plus accueillant à leur égard. Les nouveaux chrétiens...
  • APARTHEID

    • Écrit par Charles CADOUX, Benoît DUPIN
    • 9 061 mots
    • 8 médias
    ...bijbel en sij roer (le Boer avec sa bible et sa carabine). Vivant frustement et même dangereusement, il vivait aussi de certitudes étayées sur une foi calviniste austère, bornée sans doute, mais sincère. Ce fond de croyances a persisté. Il explique la permanence de certaines attitudes politiques et, malgré...
  • ARMINIANISME

    • Écrit par Jean BAUBÉROT
    • 860 mots
    Dans la lignée d'Augustin, les réformateurs rendirent le salut de l'être humain indépendant de ses mérites propres. De formation juridique, Calvin élabora la doctrine de la prédestination, décret « éternel et inviolable de Dieu ». Comme prédicateur, il insista sur la grâce de Dieu, mais, dans...
  • ARMINIUS JACOB HARMESZOON dit JACOBUS (1560-1609)

    • Écrit par Universalis
    • 519 mots

    Théologien néerlandais et ministre de l'Église réformée des Pays-Bas, Jacob Harmeszoon (Harmensen ou Hermansz), dit Jacobus Arminius, est né le 10 octobre 1560 à Oudewater et mort le 19 octobre 1609 à Leyde. Opposé à la stricte doctrine calviniste de la prédestination, il développe...

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Voir aussi