BRÊME
Située dans le nord-ouest de l’Allemagne, Brême (Bremen en allemand) est un véritable port intérieur, à 70 kilomètres de la mer, sur la Weser, disposant d’un avant-port en mer du Nord, Bremerhaven. Brême (568 200 habitants en 2018) et Bremerhaven (113 380 habitants) constituent un Landautonome, tout comme Hambourg, mais l’espace qui les sépare appartient au Land de Basse-Saxe. Entre les deux villes, sur la rive gauche de la Weser, se succèdent plusieurs agglomérations portuaires qui forment une rue industrielle, un complexe urbain et portuaire d’importance sur la Northern Range.
La date exacte de fondation de la ville de Brême est inconnue, bien que la localité soit mentionnée par écrit dès 782. Saint Willehad y établit un archevêché à la demande de Charlemagne en 787 et, un siècle plus tard, Arnulf de Carinthie, roi de Francie orientale, accorde à Brême le droit de marché, de douane et de monnaie. En 1035, un marché libre s’y tient deux fois par an. L’archevêque Adalbert de Brême (en fonction de 1043 à 1072) contribue à donner à la ville le surnom de « Rome du Nord », l’église de Brême étant considérée avec Hambourg comme la plus riche et la plus puissante de l’Empire après celle de Virsbourg. L’entrée de Brême dans la Hanse est plus problématique en raison de réseaux commerciaux ne cadrant qu’imparfaitement avec les circulations baltiques. La cité admise en 1283 est exclue de la Ligue en 1285, réintégrée en 1358, avant d’être à nouveau bannie en 1427 et 1563. Des navires de Brême sont impliqués dans des pillages perpétrés sur des flottes venues d’autres villes hanséatiques. Les bourgeois de Brême autorisent dès le milieu du xive siècle le commerce des biens du piratage sur leur marché. L’embargo de la Hanse contre la Flandre n’est, de plus, pas entièrement respecté. La prospérité de la ville dépend davantage d’un commerce avec la Norvège, l’Angleterre et le nord des Pays-Bas que d’une orientation ouest/est favorisée par les réseaux hanséatiques.
Le xve siècle, avec la prospérité économique retrouvée, voit naître les monuments encore emblématiques aujourd’hui : la statue de Roland (1404), rendant hommage au neveu de Charlemagne, représentant de l’empereur qui aurait proclamé les droits de marché et libertés de la ville, ou l’hôtel de ville gothique (1405-1410). Brême quitte définitivement la Hanse en 1563 mais Lübeck, Brême et Hambourg fondent en 1630 une ligue réduite. En 1646, Brême est élevé au rang de ville libre d’Empire par Ferdinand III. Cette liberté politique est réaffirmée lorsqu’elle se déclare « ville libre hanséatique » en 1806, statut confirmé par le congrès de Vienne (1815) et lors de son intégration dans l’Empire allemand en 1871.
En 1827, la ville acquiert des domaines et établit un avant-port, Bremerhaven, pour contrer l’ensablement progressif de la Weser. Au xixe siècle, Brême devient la capitale allemande du café et occupe une place centrale pour les échanges avec les pays d’outre-mer (coton, tabac). Le négociant Ludwig Roselius contribue à une augmentation des liaisons transatlantiques. Il est aussi à l’origine de la Böttcherstraße (rue des tonneliers), œuvre importante de l’architecture expressionniste. La ville est durement touchée par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale avant d’être occupée par les Britanniques, qui sont également implantés en Basse-Saxe, puis par les Américains, à la recherche d’un débouché sur la mer du Nord, ce qui explique la non-absorption du Landde Brême au sein de la Basse-Saxe dans la continuité des deux zones d’occupation.
Au cours de son histoire, la ville de Brême est restée un véritable symbole de l’exercice du pouvoir municipal. La place du marché (Marktplatz), où se trouvent la statue de Roland et l’hôtel de ville (inscrits en 2004 sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité par l’UNESCO), constitue à elle seule un témoignage important de l’autonomie civique et de la souveraineté acquise à l’époque de la Hanse. La statue de Roland a été érigée à l’emplacement d’une ancienne statue en bois détruite par l’évêque et porte un bouclier orné d’un aigle impérial : l’émancipation face au pouvoir religieux est clairement revendiquée.
La ville de Brême vit encore aujourd’hui de la logistique portuaire tout en conservant un tissu industriel important (construction navale, automobile, aéronautique, sidérurgie, électronique). La bière allemande Beck’s est aussi produite dans la ville. Plus de 30 000 étudiants contribuent à animer les rues du centre, la plupart étant inscrits à l’université, ouverte en 1971. Avec 2,1 millions de nuitées en 2018, une progression significative des visiteurs (+ 25 p. 100 entre 2013 et 2018), des quartiers anciens préservés (comme le Schnoor) et de nombreuses attractions (statue des musiciens de Brême, musée scientifique Universum, Übersee-Museum), Brême connaît une attractivité touristique notable. Labellisée « ville des sciences » en 2005, l’agglomération semble avoir tissé un cercle vertueux entre recherche, innovation industrielle et vulgarisation scientifique.
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Écrit par
- Nicolas ESCACH : maître de conférences à l'Institut d'études politiques, Rennes
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