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IMPRIMERIE

Parce que l’écrit est mémoire, connaissance en puissance, la question de sa conservation et de sa reproduction s’est posée dès les premiers temps de son existence. Le passage du manuscrit à l’imprimé représente à cet égard une étape décisive. On le voit avec le développement de la xylographie qui fait son apparition en Extrême-Orient dès le viie siècle. Pareillement, au milieu du xve siècle, la mise au point de l'imprimerie à caractères mobiles par Gutenberg va jouer un rôle capital dans le développement tant économique et technique que culturel de l'Occident, en multipliant les possibilités de diffusion des savoirs. Au xixe siècle, la révolution industrielle a radicalement transformé les conditions de la diffusion et jusqu’à la nature même du livre. Les nouvelles techniques d’imprimerie, la mise en place de réseaux de distribution sophistiqués, l’abaissement des coûts de production ont fait du livre un « produit » à son tour soumis à des logiques de marché, exigeant la mise en place de stratégies industrielles et la recherche de publics toujours plus larges. Si l’avènement du numérique et d’Internet a encore accru cette deuxième extension, il a eu également pour effet de profondément fragiliser l’« objet-livre » et une bonne part des productions qui lui étaient traditionnellement liées.

L'Extrême-Orient

<em>Sūtra du Diamant</em>, IX<sup>e</sup> s. - crédits : British Library/ Science Photo Library/ AKG-Images

Sūtra du Diamant, IXe s.

Il est encore fréquent en Occident d'attribuer à Gutenberg l'invention de l'imprimerie, vers le milieu du xve siècle. Cette opinion, fortement ancrée dans les esprits et les écrits, n'est guère partagée en Asie où les premiers textes reproduits par xylographie – impression de feuillets entiers à l'aide de planches gravées – l'ont été plus de six siècles auparavant et où les premières impressions typographiques sont antérieures de plus de quatre siècles. Les témoignages ne manquent pas sur les débuts de l'imprimerie extrême-orientale, mais les étapes initiales restent cependant assez obscures. Les premières xylographies reproduisant des textes sur papier à partir des planches de bois *gravées semblent être apparues en Chine vers la fin du viie siècle. Cependant, le plus ancien xylographe daté que l'on ait découvert en Chine n'est pas antérieur à 868 : c'est le fameux sūtra du Diamant, trouvé au début du xxe siècle par Aurel Stein dans les grottes de Mogao près de Dunhuang, aux confins de l'Asie centrale, et qui est conservé à Londres. Accompagné d'un frontispice lui aussi xylographié, ce rouleau révèle, par ses qualités d'impression, une étape avancée de la technique xylographique. Dans la seconde moitié du ixe siècle, la xylographie s'était déjà répandue non seulement en Chine, mais avait gagné la Corée et le Japon qui étaient sous le coup d'une profonde influence culturelle chinoise. En Corée a été découvert, en 1966, un petit sūtra bouddhique en chinois, enfermé, peut-être depuis le milieu du viiie siècle, dans un stūpa, monument contenant souvent des reliques ou un manuscrit. Au Japon surtout, un million de courts textes bouddhiques en chinois furent imprimés sur l'ordre de l'impératrice Kōken entre 764 et 770, et enfermés dans autant de petits stūpa, dont plusieurs centaines subsistent.

Les préalables de la xylographie

Comme toute invention, la xylographie chinoise n'apparaît que lorsque plusieurs conditions matérielles, techniques, mais aussi intellectuelles et sociales sont présentes. Bien que l'impression de textes ou d'images puisse se faire sur différents supports, le papier est le support privilégié de la xylographie. Lorsque la xylographie naît en Chine, et contrairement à ce qui s'est passé en Occident, le papier est connu depuis longtemps. En effet, les origines de sa fabrication peuvent être situées au 1er siècle avant notre ère.[...]

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Écrit par

  • : docteure en histoire culturelle, conservatrice en bibliothèque, responsable de formations et enseignante au Pôle Métiers du livre de l'université Paris-ouest-Nanterre-La Défense
  • : directeur d'études à l'École pratique des hautes études
  • : professeur émérite à l'École nationale des chartes, directeur d'études à la IVe section de l'École pratique des hautes études
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Isabelle ANTONUTTI, Jean-Pierre DRÈGE, Universalis et Henri-Jean MARTIN. IMPRIMERIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<em>Sūtra du Diamant</em>, IX<sup>e</sup> s. - crédits : British Library/ Science Photo Library/ AKG-Images

Sūtra du Diamant, IXe s.

Regiomontanus : Calendarium - crédits : Rosenwald Rare Book Collection/ Library of Congress, Washington, D.C.

Regiomontanus : Calendarium

Matrice de l'appareil typographique Garamond - crédits : Connaissances des Arts/ St-Genès/ AKG-images

Matrice de l'appareil typographique Garamond

Autres références

  • IMPRIMERIE À CARACTÈRES MOBILES

    • Écrit par Olivier LAVOISY
    • 197 mots

    En Occident, au milieu du xve siècle, Johann Gensfleisch, dit Gutenberg (entre 1394 et 1400-1468), invente l'imprimerie à caractères mobiles en alliage métallique. L'originalité de sa démarche est de s'appuyer sur des techniques existantes, avec l'aide de collaborateurs qui amènent leurs compétences...

  • AFFICHE

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 6 817 mots
    • 12 médias

    L'affiche devient un média privilégié à partir de la seconde moitié du xixe siècle, dans les sociétés qui connaissent la révolution industrielle. Depuis son apparition en tant qu'imprimé, quatre cents ans auparavant, elle a peu évolué, ne bénéficiant pratiquement pas de recherches...

  • ART COLONIAL

    • Écrit par Véronique GERARD-POWELL, Alexis SORNIN
    • 8 370 mots
    • 2 médias
    L'imprimerie et la gravure sont importées en Inde par les missions religieuses et commerciales dès le xvie siècle, à Goa en 1556, à Bombay en 1674, au Bengale en 1778 et à Tranquebar en 1792. Elles ne connaissent cependant leur plein essor qu'au xixe siècle avec les nouvelles technologies...
  • ARTISANAT

    • Écrit par Denis CHEVALLIER, Universalis, Louis LERETAILLE
    • 7 105 mots
    Les métiers de l'imprimerie et du livre. Ce secteur comprend, comme les autres, de nombreuses spécialistes : lithographe, imprimeur taille-doucier, relieur d'art, doreur sur cuir, restaurateur de reliures anciennes.
  • BASKERVILLE JOHN (1706-1775)

    • Écrit par Michel MARION
    • 412 mots

    Un des plus célèbres typographes anglais du xviiie siècle, John Baskerville ne s'adonna que tardivement à la typographie. Ni son éducation, ni ses débuts dans la vie active ne l'y prédisposaient. Après avoir fait plusieurs métiers, s'être donné une culture d'autodidacte et avoir acquis le...

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Voir aussi