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ZAPOTÈQUES

L'émergence des chefferies

Bien qu'avec une population très réduite, Monte Albán continue à fonctionner au-delà de 800 après J.-C. et, de la même manière que les autres communautés de la région zapotèque, entre dans une période d'effacement. On enregistre très peu de constructions monumentales, les anciens dieux sont remplacés par de nouveaux, certains venus de régions lointaines, la côte du golfe ou le centre du Mexique. Les figurines anthropomorphes qui représentent des guerriers, portant vêtements protecteurs, casques, armes et têtes trophées, suggèrent l'existence de conflits.

Vers 1250 après J.-C., la population zapotèque était revenue à une croissance normale. Cela favorise l'émergence de chefferies organisées autour d'un dirigeant, qui maintient son pouvoir par les tributs et les alliances avec des familles gouvernantes de la région. La structure générale de ces cités tardives est plus simple que celle des anciens centres urbains. Les Codex – documents écrits sur des écorces d'arbre ou des peaux de bêtes – décrivent l'histoire de ces sociétés, constituées du chef et des nobles, représentants de la classe gouvernante, et de la classe gouvernée : artisans, agriculteurs et probablement d'esclaves. Ces cités, dont Mitla, Zaachila, Cuilapam et Yagul constituent des exemples, occupent un territoire plus restreint, et abritent, par conséquent, une population moins nombreuse. Elles manquent d'édifices monumentaux et les constructions arborent un luxe discret, restreint exclusivement aux palais des dirigeants. Ces édifices sont dotés d'un décor différent, constitué de grecques en pierre. L'élite continue à utiliser et à échanger des bijoux et outils en bois incrusté de turquoises et bientôt en métal, une céramique polychrome décorée de dessins géométriques, et des vêtements en tissu fin. Ces objets élaborés servaient de cadeaux pour sceller des alliances.

C'est dans ce contexte de balkanisation que se produit l'arrivée de groupes mixtèques dans la vallée, datée par les textes de 1280 après J.-C. Par une politique de conquêtes et d'alliances matrimoniales – comme à Cuilapam et Zaachila –, les Mixtèques s'emparent du pouvoir et remplacent les dynasties locales. Les familles mixtèques réutilisent les tombes zapotèques pour inhumer leurs propres défunts, accompagnés d'un abondant mobilier funéraire de grande richesse, comme le montre la célèbre tombe 7 de Monte Albán, dont l'offrande constitue la découverte la plus opulente du site.

La présence mixtèque n'implique en aucun cas une conquête totale ou une arrivée massive de populations extérieures, mais plutôt l'implantation de petits groupes séparés. La vallée est simultanément occupée par les Zapotèques, les Mixtèques et d'autres nouveaux venus. En effet, l'empire aztèque déploie son pouvoir jusqu'au secteur nord-ouest de la région, ce qui provoque un changement de capitale de Zaachila, dans la vallée de Zimatlán, vers la région de Tehuantepec, à quelques centaines de kilomètres vers le sud-est. Les métissages semblent rares, et la même cité se subdivise en quartiers distincts, qui cohabitent, commercent et parfois s'affrontent. Cette rivalité croissante accentue encore la décadence de Monte Albán qui, à la veille de la conquête, n'est plus peuplée que de rares habitants.

La complexe cohabitation entre Zapotèques, Mixtèques et Aztèques dans les vallées du centre d'Oaxaca était à peine en train de se mettre en place quand, en 1521, elle fut interrompue par la chute de Tenochtitlán – capitale de l'empire aztèque – qui marque la fin de la période préhispanique au Mexique. Les Zapotèques, vite soumis par les Espagnols, n'en disparaissent pas pour autant : ils poursuivent leur existence et leur évolution, au-delà de la période coloniale[...]

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Écrit par

  • : docteure en archéologie à l'université Paris I-Panthéon Sorbonne, chercheuse associée Universidad de Guadalajara (Mexique)

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Média

Monte Albán, Oaxaca - crédits : Craig Lovell/ Corbis Documentary/ Getty Images

Monte Albán, Oaxaca

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