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VEIL SIMONE (1927-2017)

Femme, ministre et européenne

Simone Veil, 1974 - crédits : Philippe Ledru/ AKG-images

Simone Veil, 1974

En 1974, à la suite de l'élection de Valéry Giscard d'Estaing à la présidence de la République, elle est appelée dans le gouvernement de Jacques Chirac au poste de ministre de la Santé, seule femme ministre de plein droit. Elle entre ainsi en politique par le haut, par la filière de la haute administration propre à la Ve République, qui est alors quasi inaccessible aux femmes. Au-delà de ses compétences professionnelles, on peut penser que jouent également en sa faveur son statut d'ancienne déportée, ainsi que les relations de son mari. Par ailleurs, dans sa volonté de « moderniser la France », le président avait déjà en tête la préparation de la loi sur l'IVG qu'il entendait confier à une féministe convaincue et dont le profil pouvait transcender les clivages politiques partisans. Très rapidement Simone Veil s'attelle ainsi au texte de la loi sur l'avortement et devient la personnalité la plus médiatisée du gouvernement. Portée par la vigueur du mouvement féministe et soutenue par l'engagement à ses côtés de Michel Poniatowski, elle affronte les résistances et les attaques de parlementaires et de nombreux lobbies conservateurs. En seconde lecture à l'Assemblée nationale, le 20 décembre 1977, le texte est adopté par 277 voix contre 192, soit la totalité des votes de gauche et une courte majorité de ceux de droite. La loi est finalement promulguée le 17 janvier 1975 et pose qu'une « femme enceinte que son état place dans une situation de détresse peut demander à un médecin l'interruption de sa grossesse » avant la dixième semaine et après une consultation dans un organisme agréé. Conformément au souhait de Simone Veil, les médecins demeurent libres de choisir de pratiquer ou non des IVG. La loi est votée pour cinq ans. Elle sera définitivement adoptée en 1979, et en 2001 son délai sera porté à douze semaines. Le courage et la ténacité de la ministre quasi profane en politique, salués alors par toute la presse, contribuent à asseoir sa popularité. Elle reste ministre de la Santé dans les gouvernements de Raymond Barre jusqu'en 1979.

Simone Veil au Parlement européen - crédits : Ullstein Bild/ Getty Images

Simone Veil au Parlement européen

S'ouvre alors l'important épisode européen de sa carrière politique. Elle mène une liste UDF pour les premières élections européennes de 1979 – son baptême électoral –, et, soutenue par le président de la République, est élue première présidente du Parlement européen, poste qu’elle occupe jusqu'en 1982, un symbole fort de la réconciliation franco-allemande et de la construction européenne. En 1984, elle dirige une liste unique de l'UDF et du parti gaulliste, même si cette alliance ne se pérennise pas au Parlement. Aussi en 1989 décide-t-elle de partir seule avec des amis centristes du CDS, vivant une dernière campagne difficile. Elle revient à la politique nationale de 1993 à 1995, lorsqu'Édouard Balladur l'appelle dans son gouvernement en tant que ministre d'État chargée des Affaires sociales, de la Santé et de la Ville. De 1998 à 2007, elle achève sa brillante carrière au Conseil constitutionnel où elle est nommée par René Monory, alors président du Sénat. Elle assure parallèlement la présidence de la fondation consacrée à la mémoire de la Shoah, y militant toujours pour porter un regard mesuré sur la collaboration, qui n'oblitère pas « la lumière des Justes ».

Elle ne sort par ailleurs de sa réserve que pour faire campagne en 2005 pour le Traité européen qui lui tient à cœur et, en 2007, pour affirmer son soutien à la candidature de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République. Ce dernier engagement a été très commenté, contrastant avec le reste d'une carrière menée au centre dans une grande indépendance à l'égard des partis politiques et des surenchères populistes. Son soutien s'avère néanmoins critique et exigeant, comme en témoigne[...]

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Pour citer cet article

Catherine ACHIN et Encyclopædia Universalis. VEIL SIMONE (1927-2017) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 28/06/2024

Médias

Simone Veil, 1974 - crédits : Philippe Ledru/ AKG-images

Simone Veil, 1974

Simone Veil au Parlement européen - crédits : Ullstein Bild/ Getty Images

Simone Veil au Parlement européen

Entrée de Simone et Antoine Veil au Panthéon, 2018 - crédits : Ludovic Marin/ Pool/ AFP

Entrée de Simone et Antoine Veil au Panthéon, 2018

Autres références

  • AVORTEMENT

    • Écrit par , , et
    • 6 833 mots
    • 2 médias
    ...République. Le dossier est repris par son successeur, Valéry Giscard d'Estaing, qui le confie non au garde des Sceaux mais à la ministre de la Santé, Simone Veil. Ce choix – peut-être aussi motivé par le peu d’entrain du ministre de la Justice Jean Lecanuet à défendre le projet – traduit une...
  • CINQUIÈME RÉPUBLIQUE - La période post-gaullienne (1969-1981)

    • Écrit par
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    • 4 médias
    ...devient la norme. L'âge de la majorité, électorale et civile, est abaissé à 18 ans, ce qui est une manière de reconnaître l'importance de la jeunesse. Simone Veil, ministre de la Santé, défend devant le Parlement une loi sur l'interruption volontaire de grossesse. L'avortement est désormais...
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    ...En premier lieu, cette assemblée constitue en elle-même un symbole de l’intégration de l’Europe, symbole fréquemment réactivé, notamment quand Simone Veil, survivante des camps d’extermination nazis, en devint la présidente en 1979 ou, depuis 1988, à chaque remise annuelle du prix Sakharov (distinction...