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REPRODUCTIBILITÉ EN SCIENCES EXPÉRIMENTALES

Les différents courants de l'épistémologie s'accordent sur un point : une expérience scientifique doit être reproductible. En d'autres termes, la description exacte et circonstanciée du protocole mis en œuvre dans l’expérience ou l’observation doit permettre à tout chercheur de la reproduire, et d'obtenir les mêmes résultats. Ce postulat fonde l'idée d'universalité des sciences. Où que l'on se trouve, et qui que l'on soit, une même expérience donnera toujours le même résultat.

Le milieu scientifique connaissait de longue date les limites de ce postulat. Les innombrables aléas des dispositifs expérimentaux sont bien connus des chercheurs, qui ne s'étonnent guère que nombre d'expériences ne soient reproductibles qu'entre certaines mains. Pourtant, depuis quelques années, le milieu scientifique se préoccupe de plus en plus des problèmes de reproductibilité des expériences ou des observations publiées dans les meilleures revues scientifiques.

Tout énoncé scientifique n'est pas reproductible

Précisons d'emblée que nombre de travaux scientifiques ne sont, par leur nature même, pas reproductibles. Il s’agit souvent d’observations, et non d’expériences. C’est par exemple le cas de recherches en éthologie ou en écologie, qui portent sur le comportement d'espèces, ou le fonctionnement d'écosystèmes, par définition singuliers. La remarque s'applique aussi à des domaines de la connaissance scientifique présumés plus solidement fondés au plan épistémologique. En cosmologie, ou en physique des hautes énergies, les énoncés scientifiques dépendent de dispositifs expérimentaux – télescopes, accélérateurs de particules, etc. – d'une complexité telle qu'ils sont uniques au monde. Il devient dès lors impossible de reproduire une observation (en cosmologie) ou une expérience (en physique des hautes énergies) qu’ils ont produites. Le sociologue des sciences britannique Harry Collins l'a démontré dans son analyse de la controverse des années 1970 relative à l'existence des ondes gravitationnelles (aujourd’hui confirmée), en soulignant que les laboratoires y participant recouraient à des dispositifs expérimentaux différents, si complexes qu’ils ne pouvaient être utilisés que dans le laboratoire les ayant mis au point.

D'autres énoncés scientifiques sont, de fait, impossibles à reproduire parce qu'ils reposent sur des simulations numériques. La simulation numérique est une technique en plein développement en biologie structurale, en cosmologie, ou en sciences des matériaux, mais c'est sans doute dans le domaine de la climatologie qu'elle a été le plus développée, et que ces énoncés ont le plus rencontré leurs limites épistémologiques. Chaque modèle numérique d'évolution du climat de notre planète – question dont on connaît l'importance politique – incorpore de nombreux sous-modèles, visant par exemple à reproduire le rôle de la couverture nuageuse, ceux des courants océaniques ou de la circulation atmosphérique. À partir de mêmes données de départ, chaque modèle donnera des prédictions qui lui sont propres et qui ne pourront être reproduites par un autre modèle, fondé sur des hypothèses différentes. Dès lors, on conçoit bien qu'un modèle global, comme celui du climat de notre planète, fondé sur l'agrégation (conditionnée par les choix du chercheur) de modèles de sous-composantes du climat, ne puisse que donner des résultats par nature non reproductibles. C’est du reste un argument utilisé, de manière fallacieuse, par certains climatosceptiques pour attaquer la climatologie.

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Preuve graphique d'une fraude scientifique - crédits : Encyclopædia Universalis France

Preuve graphique d'une fraude scientifique