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PESTE

Due au bacille de Yersin (Yersinia pestis), la peste est une maladie affectant de très nombreuses espèces de rongeurs, les rats en particulier. Sa transmission se fait d’animal infecté à animal sain par piqûres de puces. Elle peut être transmise à l’homme par le même vecteur.

Le rat, vecteur de la peste - crédits : Erni/ Shutterstock

Le rat, vecteur de la peste

Le déclin relatif de la peste dans le monde, à partir des années 1950, ne signifie nullement sa disparition : il marque seulement la fin de la dernière pandémie moderne durant laquelle la navigation a disséminé, par les rats infectés, la maladie dans tous les ports du monde. Depuis la Seconde Guerre mondiale, la dératisation (rat-proofing) généralisée à la construction des navires et des installations portuaires en a peu à peu éliminé le Rattus rattus, « commis voyageur de la peste ». Mais les immenses zones où l’enzootie continue de régner parmi les rongeurs constituent une menace permanente. La situation réelle en matière de peste et son risque potentiel ne doivent pas être appréciés d’après le nombre annuel des cas humains, mais d’après l’étendue et le degré d’activité de ces foyers de peste animale.

L’activité persistante de foyers anciens et le réveil de certains autres en apparence éteints, réveil soit spontané – Vietnam, Chine, Botswana, Kenya, Brésil, Bolivie, Pérou et, en 2020, Mongolie et Mongolie-Intérieure – soit favorisé par les circonstances, comme les conflits armés – République démocratique du Congo et Rwanda –, l’insécurité – Madagascar – et le relâchement de la surveillance sanitaire – par exemple, au Kirghizstan en 2013 –, montrent la nécessité d’une surveillance sérieuse.

Les trois pandémies pesteuses

Jusqu’à l’ère chrétienne, quarante épidémies au moins se seraient succédé dont la Bible, Thucydide, L’Iliade et l’Énéide se sont fait l’écho ; la plupart semblent en réalité avoir relevé d’autres fléaux confondus sous le même vocable (pestis, « fléau ») ; ainsi, la « peste d’Athènes » de 430 av. J.-C. fut probablement une épidémie de typhus (cf. épidémies, chap. 1).

La peste de Justinien (vie s. apr. J.-C.), où domina la forme bubonique frappa l’ensemble du bassin méditerranéen et peut donc être considérée comme la première « vraie » pandémie pesteuse.

La grande peste du Moyen Âge, la peste noire, constitua la deuxième ; venue de l’Inde, elle atteignit la Méditerranée et, de là, toute l’Europe où, revêtant la forme pulmonaire, elle ne fit pas moins de 25 millions de victimes (entre le quart et la moitié de la population) entre 1346 et 1353. L’endémie se prolongea durant trois siècles et disparut après des épisodes sporadiques à Constantinople (1839) et en Égypte (1844).

La troisième pandémie débuta avec le réveil du vieux foyer du Yunnan en Chine du Sud, d’où elle gagna Hong Kong en 1894. C’est là que A.  Yersin découvrit, chez le rat comme chez l’homme, le germe responsable dont, quatre ans plus tard, P. L. Simond démontra à Calcutta la transmission par la puce. Rats et puces infectés allaient trouver dans la navigation à vapeur un exceptionnel moyen de propagation. La peste atteint Suez en 1897, Madagascar en 1898, Alexandrie, le Japon, l’Est africain, le Portugal puis le Brésil en 1899 ; elle est à Manille, à Sydney, à Glasgow et à San Francisco en 1900, à Honolulu en 1908, à Java en 1911, à Ceylan en 1914, à Marseille en 1920. Parallèlement à cet envahissement par voie de mer, d’autres foyers anciens se sont réveillés, tel celui de Mandchourie qui, en 1910, ne fait pas moins de 50 000 morts de peste pulmonaire, en trois mois d’épidémie. Cette troisième pandémie, qui a causé plus de 12 millions de morts dans l’Inde de 1898 à 1948, n’entraîna guère qu’un millier de cas en Europe, dont la majeure partie au Portugal et une centaine à Paris de 1918 à 1920 (peste dite des chiffonniers). L’absence de manifestations pulmonaires[...]

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Écrit par

  • : professeur émérite à la faculté de médecine de Paris, chef de service à l'Institut Pasteur
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Universalis et Henri-Hubert MOLLARET. PESTE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Le rat, vecteur de la peste - crédits : Erni/ Shutterstock

Le rat, vecteur de la peste

Alexandre Yersin - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Alexandre Yersin

Paul-Louis Simond - crédits : Institut Pasteur/ Musée Pasteur

Paul-Louis Simond

Autres références

  • ANTHROPOLOGIE DES ZOONOSES

    • Écrit par Frédéric KECK, Christos LYNTERIS
    • 3 954 mots
    • 4 médias
    ...dans lequel la maladie se développe de façon équilibrée entre animaux porteurs avant de se transmettre de façon accidentelle à l’homme. Dans le cas de la peste étudié par Meyer en Californie dans les années 1930, on peut distinguer trois phases : l’enzootie, au cours de laquelle la bactérie se diffuse de...
  • LA PESTE (A. Camus) - Fiche de lecture

    • Écrit par Guy BELZANE
    • 1 454 mots
    ...qui sont touchés par un mal mystérieux. Au fur et à mesure que les décès se multiplient, et face aux symptômes qui ne laissent guère de doute, le mot « peste » est enfin prononcé. D’abord réticentes, les autorités finissent par admettre l’évidence. L’état de peste est officiellement déclaré et les portes...
  • ÉPIDÉMIES ET PANDÉMIES

    • Écrit par Jacqueline BROSSOLLET, Georges DUBY, Universalis, Gabriel GACHELIN, Jean-Louis MIÈGE
    • 20 843 mots
    • 15 médias
    ...de symptômes très spécifiques, nombre d'épidémies désignées sous le terme général de « fléau » ne peuvent être formellement identifiées. Le terme latin pestis, qui équivaut à « fléau », a prévalu jusqu'au xviie siècle, recouvrant indifféremment toutes les grandes maladies épidémiques – peste,...
  • GUY DE CHAULIAC (1300-1368)

    • Écrit par Jacqueline BROSSOLLET
    • 564 mots
    • 1 média

    Né dans le diocèse de Mende, cet humble paysan fut remarqué par l'Église qui le fit étudier. Devenu clerc de la cathédrale de Mende, Guy de Chauliac alla suivre à Montpellier les cours de l'école de médecine (la chirurgie n'était pas encore enseignée) et il y obtint les grades...

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Voir aussi