PARMESAN (1503-1540)
Élève de Corrège : c'est ainsi que Vasari et la quasi-unanimité des biographes et des critiques, tant « anciens » que modernes, définissent Parmesan. Mais Parmesan n'est d'aucune école et il n'en a fondé aucune. Capable d'observer et d'analyser la réalité de l'Italie de son temps, c'est néanmoins dans ses propres sensations qu'il a trouvé ses sources d'inspiration. Au cours des vingt années qu'a duré son activité, il a su exprimer, sans jamais dévier ni fléchir, un univers marqué du sceau de sa personnalité, bien que celle-ci ait été, à n'en pas douter, un miroir déformant ; ses tableaux, certes, mais surtout ses fresques et ses dessins sont, à cet égard, éloquents. À l'instar du creuset de l'alchimiste dont parle Vasari, son esprit a su accueillir et fondre, avec autant de science que d'art, les intuitions et les rêveries les plus prophétiques et les plus audacieuses.
Les débuts de Parmesan
Francesco Mazzola ou Mazzuoli est né à Parme, comme l'indique son surnom de Parmesan ; il doit son éducation artistique à ses oncles paternels, « petits maîtres » encore à l'école de l'art de Venise et de Ferrare de la fin du xve siècle. Les œuvres qu'il exécute à Parme et dans les environs, entre seize et vingt ans, témoignent d'une maturité instinctive, que l'artiste consolide par l'étude des principaux artistes de la région, Corrège et Anselmi, ainsi que de Raphaël, dont certaines œuvres étaient déjà parvenues en Émilie. Parmesan connaît aussi les maniéristes toscans notamment le Siennois Beccafumi puis, plus tard à Rome, Rosso et naturellement Michel-Ange.
Peint en 1522, le retable de Bardi laisse certes apparaître le souvenir de Mantegna, mais il montre déjà comment toutes ces sources et ces influences se trouvent assimilées par une personnalité autonome, dont le style original s'affirme dans la composition allongée, dans le mouvement tournant des figures modelées sur la grille des fines colonnes qui découpent le haut de l'abside et dans les coloris brillants.
Les décorations à la fresque, réalisées entre 1522 et 1524, des trois chapelles de l'église Saint-Jean à Parme révèlent une évolution significative : dans la première chapelle décorée par Parmesan, la chapelle Zangrandi, les portraits de saint Nicolas et de saint Hilaire de Poitiers traduisent l'admiration, prépondérante mais contrôlée, pour Corrège ; la chapelle suivante, avec ses deux diacres et saint Vital, se caractérise par une composition plus libre, plus hardie, plus mouvementée ; Parmesan s'est inspiré, notamment pour son Saint Vital retenant le cheval, de l'artiste frioulan Pordenone, tandis que la décoration de la partie centrale de l'intrados le montre s'adonnant aux plus folles audaces à la Beccafumi ; enfin, dans la dernière chapelle, avec Sainte Agathe et le bourreau, Sainte Lucie et Sainte Apollonie, on voit Parmesan effectuer un retour à Corrège, mais en l'intégrant désormais dans une vision radicalement personnelle : ainsi, les putti disposés parmi les feuillages ne sont pas faits d'air et de lumière, ils sont traités au contraire avec une grande fermeté plastique.
Une étape nouvelle dans la formation progressive de cette personnalité en perpétuelle fermentation est constituée par la décoration de la salle de bains du château des comtes Sanvitale à Fontanellato ; nombreux sont ici les éléments neufs auxquels Parmesan parvient par intuition, qu'il invente ou réinvente, et qui concernent aussi bien le style que la continuité narrative qui se déploie dans les treize lunettes reliées entre elles iconographiquement. Ici aussi abondent les références au Corrège de l'office de l'abbesse Giovanna Piacenza, à Saint-Paul : le berceau, le ciel, les putti ; mais les lunettes peintes par Corrège représentaient des scènes indépendantes les unes des autres et que baignait une lumière d'une douce sérénité ; Parmesan, qui n'était certainement pas sans connaître les œuvres de Giorgione et de Titien, suit au contraire le récit d'Ovide depuis l'heure de midi jusqu'à la nuit, à l'aide de séquences toujours plus dramatiques – dramatisation à laquelle contribuent les coloris mouvants du ciel, le flamboiement du paysage et les animaux qui saisissent, mieux que les êtres humains, le destin funeste de leur maître Actéon. Fermant et rompant la continuité de la composition, la lunette de la fenêtre présente Paola Gonzague, souriante et sereine, dans un effet de contraste avec la fureur redoutable de Diane qui lui fait face. Le centre idéal et réel de la pièce est formé par le miroir rond, au sommet de la voûte, motif dominant depuis les débuts, et que l'on retrouve dans l' Autoportrait de Vienne. Celui-ci est le premier d'une longue série de peintures et de dessins à l'aide desquels l'artiste exprime, à travers ses propres traits, comme en un journal, ses états d'âme et les événements de son existence.
Les tableaux de cette période révèlent une maturité précoce, mais avec des accents de tendresse juvéniles, comme dans les peintures traitant de sujets religieux : la Sainte Barbara et La Sainte Famille du Prado, L'Adoration des bergers et la Vierge à l'enfant Doria, ou la Sainte Catherine sous le palmier, de Francfort ; et il en va de même pour les portraits où il parvient à saisir, en même temps que la ressemblance physique, les traits les plus profonds du caractère : ainsi dans le Galeazzo Sanvitale de Naples, gentilhomme raffiné et rude condottiere.
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Écrit par
- Augusta G. QUINTAVALLE : surintendant des galeries et œuvres d'art médiéval et contemporain pour les provinces de Parme et de Plaisance
Classification
Médias
Autres références
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MANIÉRISME
- Écrit par Sylvie BÉGUIN et Marie-Alice DEBOUT
- 10 166 mots
- 34 médias
...illusionnisme audacieux les décorateurs maniéristes bien avant les baroques. Dans ses madones, l'élégance des gestes, la grâce sont un prélude aux recherches de Parmesan (1503-1540). Il devait en effet exercer sur ce dernier une influence d'abord prépondérante sur les chantiers du Dôme et de San Giovanni Evangelista....
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