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PARMESAN (1503-1540)

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Les dix dernières années de Parmesan

Michel-Ange disait que la sculpture se fait per forza di levare – à la force du poignet, en quelque sorte ; pour Mazzola, peindre signifie donner vie, sur de vastes surfaces murales, à des géants et à des héros, et, avec eux, à des animaux, des vases, des fleurs, des livres et toutes sortes d'objets étudiés à travers des centaines de dessins et exécutés avec une patience infinie et la minutie d'un miniaturiste. Après avoir été doublement déçu à Rome et à Bologne, du fait des hommes et des événements, dans son ambition de réaliser une vaste décoration, Parmesan, de retour dans sa ville natale, voit ses espérances aboutir, grâce à la nouvelle église, la Steccata, édifice à plan central et aux larges arcs dont la modernité, digne de Rome et de Bramante, convenait à son orgueil et à ses goûts.

Plus qu'un plafond ou un mur, la décoration d'une abside ou d'un intrados, avec ses difficultés particulières, exige une attention sans défaut, et mobilise toutes les ressources alliées de l'art et de la science. Les contemporains de Parmesan chuchotaient qu'il avait partie liée avec l'alchimie – mais ses défenseurs savent que l'alchimie n'est pas la sorcellerie ; plus que le traitement du mercure et la poursuite de l'or, elle est savoir et recherche. Les figures et objets que Parmesan projette dans l'espace témoignent du sens plastique et volumétrique de l'artiste, qui sait par ailleurs les entraîner dans un mouvement continu et enveloppant ; Parmesan analyse la réalité avec un scrupule extrême, mais c'est avec une liberté toute moderne qu'il traite ces figures énormes que leurs proportions font cependant paraître, vues d'en bas, normales ; il interprète avec la même vigilance l'ensemble et les détails, les accords de couleurs, le monde végétal et le monde animal, et, par-dessus tout, la lumière : lumière naturelle variant du midi à la nuit, et toutes les nuances des lumières artificielles, le rouge des braises incandescentes, la lueur dorée des lampes, les éclats blancs et aveuglants sortis des vases de l'alchimiste.

La Vierge au long cou, Parmesan - crédits : 	Hulton Fine Art Collection/ Getty Images

La Vierge au long cou, Parmesan

Les dix années que Parmesan consacra à une tâche qui, selon les termes du contrat, aurait dû être terminée au bout de neuf mois, ne furent pas des années perdues ; l'artiste s'employa en effet à représenter son propre tourment et celui de sa génération devant la transformation du monde satisfait et serein de la Renaissance en un monde tout différent, hérissé de doutes, de contradictions, de rébellions, un monde en état de fermentation et de transmutation comme la matière elle-même ; tout cela s'exprime dans les tableaux de cette période, où l'artiste s'efforce, dans une suprême recherche de libération et d'harmonie, d'effectuer la symbiose des objets et des figures humaines : ainsi, dans la Vierge au long cou, des Offices, la Vierge est associée plastiquement aux colonnes du fond et l'amphore à l'ange qui la soutient ; dans le Retable de saint Étienne, de la Gemäldegalerie de Dresde, le rocher de forme ovale est traité selon le même module que les têtes des saints ; cette recherche n'est pas, pour Parmesan, un jeu abstrait ou superficiel ; le tragique Autoportrait est là pour en témoigner. Pour rythmique et mesurée qu'elle soit, sa vision de la vie n'en reste pas moins douloureuse et dramatique ; elle se conclut par l'exil dans la localité voisine de Casalmaggiore et la mort précoce et solitaire.

— Augusta G. QUINTAVALLE

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Écrit par

  • : surintendant des galeries et œuvres d'art médiéval et contemporain pour les provinces de Parme et de Plaisance

Classification

Pour citer cet article

Augusta G. QUINTAVALLE. PARMESAN (1503-1540) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Médias

<it>La Sainte Famille</it>, Parmesan - crédits :  Bridgeman Images

La Sainte Famille, Parmesan

<it>Autoportrait dans un miroir convexe</it>, Parmesan - crédits :  Bridgeman Images

Autoportrait dans un miroir convexe, Parmesan

La Vierge au long cou, Parmesan - crédits : 	Hulton Fine Art Collection/ Getty Images

La Vierge au long cou, Parmesan

Autres références

  • MANIÉRISME

    • Écrit par et
    • 10 161 mots
    • 34 médias
    ...illusionnisme audacieux les décorateurs maniéristes bien avant les baroques. Dans ses madones, l'élégance des gestes, la grâce sont un prélude aux recherches de Parmesan (1503-1540). Il devait en effet exercer sur ce dernier une influence d'abord prépondérante sur les chantiers du Dôme et de San Giovanni Evangelista....