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MITTELEUROPA

La littérature germanophone d'Europe centrale et la littérature autrichienne

La situation de la littérature de langue allemande est très variable d'une époque à l'autre. Jusqu'à la fin du xixe siècle et au début du xxe siècle, dans certaines aires linguistiques de cette région, l'allemand s'ajoute à la langue « nationale » comme langue internationale de la littérature, en concurrence parfois avec une autre langue internationale comme le français. Au fur et à mesure des progrès de la prise de conscience nationale et de l'affirmation des langues littéraires, l'allemand n'a plus que le statut de « seconde langue » permettant la communication internationale à l'intérieur de la région centre-européenne.

Au xxe siècle, après la Première Guerre mondiale, le statut de la langue et de la littérature allemandes dans l'ex-Mitteleuropa change radicalement : les germanophones et les écrivains de langue allemande sont désormais une minorité dans chacun des pays où ils restent établis. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en contrecoup de la destruction de la Mitteleuropa culturelle par le IIIe Reich, les écrivains de langue allemande qui restent fixés en Europe centrale sont voués à une marginalité existentielle aggravée par la censure et la répression.

Littérature autrichienne et Mitteleuropa

On peut tenter une définition de la « littérature autrichienne » dans le contexte d'un comparatisme centre-européen. Plusieurs points communs (en termes de périodisation, de thématique, de sociologie du champ littéraire) rattachent la littérature autrichienne à un ensemble centre-européen, autant sinon plus qu'au système de la littérature allemande. Pour cerner cette appartenance de la littérature autrichienne à la Mitteleuropa, on se reportera aux grands ouvrages encyclopédiques publiés ou commencés à l'époque de la monarchie habsbourgeoise. Ainsi la monumentale Deutsch-österreichische Literaturgeschichte de Nagl, Zeidler et Castle situait la littérature produite dans les territoires actuels de l'Autriche au milieu d'une vertigineuse variété de paysages littéraires de langue allemande situés au centre-est de l'Europe.

L'ouvrage avait été lancé en vue de fêter le cinquantième anniversaire de l'avènement de l'empereur François-Joseph Ier (1898). Finalement, le premier des quatre volumes parut en 1899, le dernier en 1937. La préoccupation des auteurs n'était pas du tout de cerner les transferts culturels, mais de dresser le catalogue des œuvres et des revues de langue allemande, du Tyrol et de la Carniole, au Banat et à la Bucovine. Le ton restait fidèle au « mythe habsbourgeois » : la prééminence de la littérature allemande allait de soi, mais l'épanouissement des cultures et des littératures nationales était considéré comme une évolution positive ; le nationalisme culturel anti-allemand était condamné, tandis qu'étaient célébrés les bienfaits de la civilisation de langue allemande pour toutes les nationalités de la monarchie.

Pour définir l'identité centre-européenne de la littérature autrichienne de langue allemande, il convient de prendre en compte certaines particularités de la périodisation qui éloignent la littérature autrichienne de la littérature allemande, et qui la rapprochent des littératures slaves et hongroise. Ainsi le style « baroque » s'est diffusé dans toute la région centre-européenne. La caractéristique de l'époque suivante est une fusion presque parfaite des Lumières et du romantisme. Alors qu'en Autriche, le moment romantique est très peu marqué, dans les pays centre-européens, le romantisme coïncide avec la prise de conscience de l'identité linguistique et culturelle nationale. La période appelée Biedermeier s'écarte également de l'histoire de la littérature allemande[...]

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Pour citer cet article

Jacques LE RIDER. MITTELEUROPA [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Milan Kundera - crédits : Louis Monnier/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Milan Kundera

Robert Musil - crédits : Imagno/ Getty Images

Robert Musil

Autres références

  • CANETTI ELIAS (1905-1994)

    • Écrit par Jacques LE RIDER
    • 2 424 mots
    • 1 média
    Ayant connu dans son enfance la Belle Époque à l'est de l'Europe, en Bulgarie, puis à l'ouest, en Angleterre, avant de vivre en Autriche et en Allemagne les années convulsives de l'entre-deux-guerres, Elias Canetti est, selon les mots de Claudio Magris, « une des voix de cette...
  • LA CONSCIENCE DE ZENO, Italo Svevo - Fiche de lecture

    • Écrit par Gilbert BOSETTI
    • 988 mots
    • 1 média

    Après l'insuccès de ses deux premiers romans, Une vie (1892) et Sénilité (1897), ignorés par la critique italienne alors que leur auteur n'est encore à Trieste qu'un sujet de l'Empire austro-hongrois, Italo Svevo (1861-1928) a renoncé à toute ambition littéraire. Toutefois, bien qu'absorbé...

  • HARMONIA CÆLESTIS (P. Esterházy)

    • Écrit par Jacques LE RIDER
    • 936 mots
    • 1 média

    Dans la magnifique floraison de la littérature hongroise d'aujourd'hui, se détache l'œuvre puissante et originale de Péter Esterházy. Depuis Trois anges me surveillent (1989), Le Livre de Hrabal (1990), Une femme (1998) et L'Œillade de la comtesse Hahn-Hahn - en descendant le Danube...

  • L'HOMME SANS QUALITÉS, Robert Musil - Fiche de lecture

    • Écrit par Jacques LE RIDER
    • 1 077 mots
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    Dans la deuxième partie se développe « l'Action parallèle » : un comité d'intellectuels et de hauts responsables politiques, économiques et militaires viennois s'efforce de programmer un événement autrichien qui serait capable de faire écho et contrepoint aux cérémonies de l'anniversaire de l'avènement...
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