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MICROBIOME ET SANTÉ

Microbiote intestinal et maladie inflammatoire de l’intestin

La maladie inflammatoire de l’intestin regroupe la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique. Selon l’O.M.S., il existe environ 2 millions de personnes atteintes par ces maladies en Europe. L’inflammation est due à l’interaction entre prédispositions génétiques du sujet et facteurs environnementaux, parmi lesquels figure le microbiote intestinal. Dans ce cas comme dans celui de pathologies intestinales moins sérieuses, on possède des indications sur les mécanismes en jeu. Certaines bactéries pathogènes telles que Ruminococcusgnavus sont présentes en faible quantité chez la majorité des sujets sains. Quand elles prolifèrent, comme à la suite d’un traitement prolongé aux antibiotiques, ces bactéries deviennent pathogènes : elles dégradent le mucus qui recouvre et protège l’épithélium intestinal et sécrètent des toxines qui activent les cellules intestinales de l’immunité non spécifique. L’ensemble de ces actions cause des dommages tissulaires et une réponse inflammatoire.

Cette prolifération bactérienne particulière est due à plusieurs facteurs. La croissance de certains micro-organismes dans l’intestin dépend de leur compétition avec les autres micro-organismes pour l’accès aux nutriments. Les populations sont normalement en équilibre. Mais certains nutriments favorisent la croissance de micro-organismes précis aux dépens des autres, d’où un déséquilibre au sein des populations bactériennes.

Les fibres alimentaires provenant des fruits et légumes jouent un rôle important pour maintenir cet équilibre entre bactéries « normales » et pathogéniques. Lorsque consommées en quantité abondante dans la diète, elles permettent aux bactéries commensales de croître dans l’intestin, car celles-ci possèdent les enzymes nécessaires pour digérer les fibres. Or en l’absence de fibres alimentaires, les bactéries pathogènes sont prédominantes, elles consomment et dégradent le mucus qui protège normalement la muqueuse intestinale. En l’absence de mucus, les bactéries pathogènes peuvent endommager l’épithélium intestinal, causer une infection, contribuant ainsi à l’activation de la réponse inflammatoire.

De fait, le nombre de bactéries commensales « normales » est réduit dans les fèces de patients atteints de maladies inflammatoires de l’intestin. Or ces bactéries (y compris les Faecalibacteriaet Roseburia) transforment les fibres alimentaires retrouvées dans les fruits et légumes en acides gras à chaîne courte (comme l’acide butyrique et l’acide propionique) qui ont des propriétés anti-inflammatoires et contribuent également au métabolisme de l’épithélium intestinal. La réduction des bactéries commensales, souvent liée à la prise d’antibiotiques ou à une diète pauvre en fibres alimentaires, participe donc au développement de l’inflammation intestinale.

Enfin, les prédispositions génétiques à la maladie inflammatoire de l’intestin concernent des gènes impliqués dans l’inhibition de la réponse inflammatoire et des gènes responsables de la reconnaissance des bactéries par le système immunitaire. Ainsi, une réaction inappropriée de l’intestin vis-à-vis des bactéries commensales de l’intestin peut être associée à l’inflammation intestinale en favorisant la prolifération d’un agent pathogène.

Cet exemple montre la complexité des mécanismes en jeu : le microbiote intestinal contribue de diverses façons tant à l’évitement qu’au développement de la maladie inflammatoire de l’intestin, ici en agissant sur la genèse, l’entretien et l’arrêt de la réaction inflammatoire. Ce phénomène n’est donc pas un simple rapport de cause à effet, mais il traduit une rupture de l’équilibre entre micro-organismes et molécules à effets antagonistes.

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Écrit par

  • : docteur ès sciences, chercheur postdoctorant à l'université Chang Gung (Taïwan)
  • : docteur ès sciences, président de Chang Gung Biotechnology (Taïwan)
  • : docteur ès sciences, professeur à l'université Chang Gung (Taïwan)
  • : docteur ès sciences, chercheur statutaire à l'université Chang Gung (Taïwan)
  • : docteur ès sciences, professeur à l'université du Pacifique, San Francisco (États-Unis)
  • : docteur en médecine, docteur ès sciences, président du conseil d'administration de Chang Gung Biotechnology (Taïwan), professeur associé à l'université Rockefeller, New York (États-Unis)

Classification

Pour citer cet article

Chih-Jung CHANG, Yun-Fei KO, Hsin-Chih LAI, Jan MARTEL, David OJCIUS et John D. YOUNG. MICROBIOME ET SANTÉ [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Les divers microbiotes humains - crédits : Encyclopædia Universalis France

Les divers microbiotes humains

Diversité des maladies liées au microbiote intestinal - crédits : Encyclopædia Universalis France

Diversité des maladies liées au microbiote intestinal

Les cellules de l’épithélium intestinal - crédits : Encyclopædia Universalis France

Les cellules de l’épithélium intestinal

Voir aussi