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KYŌTO

La ville moderne : Kyōto du XVIe au XIXe siècle

Si le découpage en périodes historiques tel qu'il est communément admis fait aller la période moderne du Japon de 1573 à 1868, il faut faire remonter la formation de la ville moderne à la fin du xve siècle. Après les onze années des troubles de l'ère Ōnin (1467-1477), l'essentiel de la ville avait été réduit en cendres par les armées de l'Est et de l'Ouest qui avaient pris Kyōto comme champ de bataille. La paix revenue, le bakufu ne fit pas reconstruire les anciennes voies. Au milieu des terres ravagées, les habitants se regroupèrent dans les deux agglomérations subsistantes, au nord et au sud, et rebâtirent les quartiers et les rues selon leurs besoins propres. La ville ne ressemblait plus à l'ancienne capitale. La population avait diminué, avoisinant sans doute les 100 000 habitants. Dans la ville haute, le palais était situé à Tsuchimikado (emplacement actuel), à proximité des maisons de guerriers et de nobles de cour. Ces demeures, de dimensions considérablement réduites, étaient désormais implantées au milieu de quartiers d'artisans et de commerçants. La ville basse devenait quant à elle le cœur économique de la nouvelle Kyōto. La densité y était plus forte et les riches commerçants s'y étaient installés.

Si l'antique quartier de l'époque Heian avait été un ensemble compact, ceint d'un mur et de larges avenues, le nouveau quartier urbain (que l'on nomme désormais machi), s'ouvrait complètement sur des ruelles étroites, centres animés de la ville moderne. Le quartier n'était plus désigné par un numéro de cadastre mais par un toponyme lié à son activité économique ou à un fait marquant de la mémoire collective. Les ruelles étaient bordées le plus souvent de boutiques, espaces semi-publics qui constituaient une zone tampon entre la rue et l'espace privé de l'intérieur des îlots où l'on pouvait trouver des équipements communs comme un puits, un bain ou un potager.

Le processus d'unification du pays réalisé à cette époque par les militaires et le renforcement du pouvoir politique à l'échelle du territoire furent accompagnés, tout au long des xvie et xviie siècles, par un durcissement de l'autorité politique sur l'espace urbain de Kyōto. Les grands travaux entrepris sous l'égide de Toyotomi Hideyoshi et la planification urbaine poursuivie par ses successeurs furent menés à terme contre le pouvoir populaire, les institutions religieuses et les aristocrates. Ils modifièrent les liens qu'avaient tissés entre les citadins les anciens modes d'occupation spatiale.

En 1586, Toyotomi Hideyoshi programme la construction d'une vaste résidence, Jūraku-dai, autour de laquelle sont regroupées les demeures de ses seigneurs (daimyō). Débute alors la transformation de la ville en jōkamachi, ou « ville sous le château », et la mise en place d'une nouvelle typologie urbaine.

Durant les années 1590-1591, quatre étapes marquèrent l'évolution de l'urbanisme à Kyōto. D'abord, les anciens quartiers carrés furent systématiquement divisés par une rue centrale qui permit l'occupation de l'espace vide de l'intérieur des îlots ; des échoppes y furent installées, et les façades sur rue furent ainsi multipliées ; les institutions bouddhiques furent déplacées à la périphérie est de la ville, sur la rive droite de la Kamo (c'est la création du quartier de Tera-machi). En 1591, une enceinte de terre (odoi) longue de 22,5 kilomètres fut bâtie autour de la ville ; elle avait pour fonction de la protéger contre d'éventuelles attaques, de contenir les crues de la rivière Kamo, tout en affirmant davantage l'image de la « ville sous le château » de Toyotomi. L'exemption de la rente foncière pour les domaines intra-muros, sur laquelle avait été[...]

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Classification

Pour citer cet article

Nicolas FIÉVÉ et Raphaël LANGUILLON-AUSSEL. KYŌTO [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Kyōto: quartier de Gion - crédits : Eric Lafforgue/ Art in All of Us/ Corbis/ Getty Images

Kyōto: quartier de Gion

Japon : carte administrative - crédits : Encyclopædia Universalis France

Japon : carte administrative

Kyōto: le temple Jojakko - crédits : VWPICS/ Nano Calvo/ Universal Images Group/ Getty Images

Kyōto: le temple Jojakko

Autres références

  • JAPON (Le territoire et les hommes) - Histoire

    • Écrit par Paul AKAMATSU, Vadime ELISSEEFF, Universalis, Valérie NIQUET, Céline PAJON
    • 44 405 mots
    • 52 médias
    ...alors une grande popularité en Chine, le Tiantai (en japonais Tendai) et le Zhenyan (en japonais Shingon), et déplaça la capitale à Heiankyō, l'actuelle Kyōto, inaugurant ainsi en 794 une nouvelle période de l'histoire japonaise. On désigne sous le nom d'époque Heian (Heian jidai), d'une...
  • JAPON (Arts et culture) - Les arts

    • Écrit par François BERTHIER, François CHASLIN, Universalis, Nicolas FIÉVÉ, Anne GOSSOT, Chantal KOZYREFF, Hervé LE GOFF, Françoise LEVAILLANT, Daisy LION-GOLDSCHMIDT, Shiori NAKAMA, Madeleine PAUL-DAVID
    • 56 170 mots
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    À Heian-kyō, le carroyage urbain dessine des îlots carrés de 120 mètres de côté et une propriété occupe, selon le rang et la fortune, un quart, une moitié ou la totalité d'un îlot ; parfois deux, voire quatre îlots pour les plus fortunés. Chaque propriété est ceinte d'un mur en pisé, percé d'une porte...
  • JARDINS "SECS", Kyōto (Japon)

    • Écrit par Alain THOTE
    • 185 mots
    • 1 média

    Courant religieux venu de Chine à partir du milieu du xiiie siècle, le bouddhisme chan (zen) a inspiré le développement de plusieurs formes d'art au Japon, comme la cérémonie du thé (chanoyu), l'arrangement floral (ikebana) ou la peinture monochrome. Parmi elles, mais de création...

  • KANSAI ou KINKI

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    • 1 média

    Grande rivale culturelle du Kantō, le Kansai, aussi appelé parfois Kinki ou Kinai, est une région située au centre de l'île japonaise de Honshū. D'une superficie de 33 108 kilomètres carrés, elle est composée de sept départements (Kyōto, Osaka, Hyōgo, Nara, Shiga, Wakayama et...

Voir aussi