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CAVAILLÈS JEAN (1903-1944)

Philosophe et logicien français, professeur à l'École normale supérieure, à l'université de Strasbourg et à la Sorbonne. Pendant la Seconde Guerre mondiale, plusieurs fois prisonnier et évadé, il est l'un des premiers et des plus actifs fondateurs de réseaux de résistance. Il a été fusillé par les Allemands en 1944. Son souvenir est évoqué par sa sœur, G. Ferrières : Cavaillès, philosophe et combattant (1950). Il fut l'ami de deux autres logiciens brillants et prématurément disparus : Albert Lautmann (1908-1944), également fusillé, qui écrit sur la notion de structure et d'existence en mathématique, et Jacques Herbrand (1908-1931), auteur d'une thèse remarquée sur la théorie de la démonstration.

L'œuvre de Cavaillès est fondée sur une longue réflexion philosophique sur les mathématiques, depuis son diplôme d'études supérieures soutenu en 1926 avec L. Brunschvicg : La Philosophie et les applications du calcul des probabilités chez les Bernoulli jusqu'à ses deux thèses : Remarques sur la formation de la théorie abstraite des ensembles, et Méthodeaxiomatique et formalisme (Essai sur le problème du fondement des mathématiques), toutes deux publiées en 1938. Dans une lettre du 28 avril 1928, il caractérise nettement son objet d'étude : « Le calcul des probabilités est sans grande conséquence au point de vue qui m'intéresse, savoir celui de l'étude de la pensée mathématique dans son développement, le mécanisme de ses créations, et peut-être, but désiré mais un peu utopique, les conditions cachées qui commandent d'une façon nécessaire son déroulement. » La lecture de Klein, l'historien des mathématiques, l'étude de la correspondance entre Cantor et Dedekind, son propre travail enfin l'amènent à une attitude que Bachelard a décrite en ces termes : « Une même condamnation, dans la pensée de Cavaillès, liquidait le psychologisme et l'historicité. Il a écrit dans une formule d'une merveilleuse densité : « Il n'y a rien de si peu historique [...] que l'histoire des mathématiques. »

Le dernier ouvrage de Cavaillès, extrêmement dense et riche, est rédigé en prison et publié par les soins de ses amis, Georges Canguilhem et Charles Ehresmann : Sur la logique et la théorie de la science (1947). On y trouve une critique aiguë de l'intuitionnisme kantien et de la phénoménologie husserlienne : « Ce n'est pas une philosophie de la conscience mais une philosophie du concept qui peut donner une doctrine de la science. »

— Françoise ARMENGAUD

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Écrit par

  • : agrégée de l'Université, docteur en philosophie, maître de conférences à l'université de Rennes

Classification

Pour citer cet article

Françoise ARMENGAUD. CAVAILLÈS JEAN (1903-1944) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • GRANGER GILLES GASTON (1920-2016)

    • Écrit par Elisabeth SCHWARTZ
    • 1 688 mots
    ...Granger s’assumait encore en effet comme le « disciple peu fidèle, comme il convient », mais l’élève tout de même de ce philosophe et surtout de Jean Cavaillès. Le même texte se plaisait à reconnaître la rencontre des idées bachelardiennes avec celles de Cavaillès, « celui de mes maîtres » écrivait...
  • PHÉNOMÉNOLOGIE, mathématique

    • Écrit par Jean-Michel SALANSKIS
    • 1 343 mots
    L'école française fut représentée essentiellement par Albert Lautman (1908-1944) etJean Cavaillès (1903-1944) dans le « moment 1940 », puis par Jean-Toussaint Desanti (1914-2002) dans ce qu'on peut appeler le « moment 1968 ». Tous ont repris l'idée du caractère intentionnel de l'objet, qui...
  • STRUCTURALISME

    • Écrit par Jean-Louis CHISS, Michel IZARD, Christian PUECH
    • 24 054 mots
    • 2 médias
    Intuition/concept. L'œuvre de Jean Cavaillès, sa critique de la phénoménologie reposent sur la promotion « d'une philosophie du concept » contre une philosophie du sujet, et jouera le rôle d'un manifeste pour une « sortie » de la phénoménologie et des philosophies de la conscience en général....

Voir aussi