Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

OFFENBACH JACQUES (1819-1880)

Des Bouffes-Parisiens à l'Opéra-Comique

L'occasion se présente en 1855 lors de l'Exposition universelle : Offenbach obtient, sur les Champs-Élysées, à côté du palais de l'Industrie, la concession d'un petit théâtre, qu'il baptise Bouffes-Parisiens. D'emblée, la bouffonnerie du compositeur enivre un public affamé de plaisir. Au mois de décembre, les Bouffes s'installent dans le théâtre du passage Choiseul. Une autorisation ministérielle permet à Offenbach de diriger les nouveaux Bouffes-Parisiens pendant cinq ans. Ses pièces ne doivent compter qu'un acte et quatre personnages au maximum. Il présente Der Schauspieldirektor de Mozart et organise un concours d'opérette remporté ex aequo par Georges Bizet et Charles Lecocq, tous deux auteurs d'un Docteur Miracle.

Mais les contraintes de la censure l'étouffent. Croquefer (1857) lui permet de tourner la difficulté en faisant intervenir un cinquième personnage, muet, qui s'exprime en brandissant des pancartes ! Rapidement, Offenbach se voit délivré de cette réglementation absurde et vole vers des ouvrages à grand spectacle. Le succès d'Orphée aux enfers (1858) arrive à point nommé pour l'arracher à des créanciers embarrassants, car sa gestion est assez catastrophique. Son vieux rêve resurgit alors ; il sollicite à nouveau les directeurs des théâtres impériaux et, cette fois, obtient satisfaction : en 1860, l'Opéra présente son ballet Le Papillon, que danse Emma Livry, et l'Opéra-Comique monte Barkouf ; deux échecs qui ne le guérissent pas. En 1864, à l'Opéra de Vienne, il donne Die Rheinnixen, opéra romantique en trois actes (où figure le thème qui deviendra celui de la barcarolle des Contes d'Hoffmann), et, à nouveau, s'égare hors de son domaine...

La Belle Hélène (1864) le ramène à la réalité : il continue d'exploiter la veine mythologique et construit un rôle sur mesure pour Hortense Schneider. Cette grande actrice, qu'il a engagée pour la première fois en 1855 dans Le Violoneux, devient sa tête d'affiche : La Vie parisienne (1866), La Grande-Duchesse de Gerolstein (donnée en 1867, à l'occasion de l'Exposition universelle) et La Périchole (1868) sont écrites pour elle. Cette époque est particulièrement faste pour Offenbach, qui a trouvé en Henri Meilhac et Ludovic Halévy des librettistes complices. Deux nouvelles tentatives à l'Opéra-Comique – Robinson Crusoé (1867) et Vert-Vert (1869) – précèdent Les Brigands (1869), où les bottes des carabiniers annoncent l'arrivée des Prussiens. Cette période est difficile pour Offenbach, attaqué de tous côtés : bien qu'il soit naturalisé français depuis 1860, les Français l'accusent d'être prussien de cœur et d'avoir composé des hymnes patriotiques pour l'empire allemand en 1848, et les Allemands trouvent dans son œuvre des attaques contre son pays natal !

La chute du second Empire est un peu celle d'Offenbach. Les mentalités changent. Le plaisir et la frivolité cèdent le pas à un nouvel ordre moral qui veut effacer les souvenirs ; la popularité d'Offenbach décline ; pour la IIIe République, il est devenu le « grand corrupteur ». Il va d'échec en échec. Il remanie ses grands succès d'autrefois pour en faire des productions grandioses et faire rêver le public. En 1873, il prend ainsi la direction du Théâtre de la Gaîté ; mais sa gestion est toujours aussi déficiente et, deux ans plus tard, c'est la faillite. En 1876, il entreprend aux États-Unis une tournée, triomphale, qui assainit sa situation financière. L'Exposition universelle de 1877 est l'occasion d'un sursaut, mais son projet de pièce féerique ne voit même pas le jour. Son centième ouvrage, La Fille du tambour-major (1879), lui permet de renouer avec le succès.[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

Classification

Pour citer cet article

Alain PÂRIS. OFFENBACH JACQUES (1819-1880) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Offenbach - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Offenbach

Autres références

  • LA BELLE HÉLÈNE (J. Offenbach)

    • Écrit par Timothée PICARD
    • 296 mots

    Celle que l'on considère comme la reine des opérettes françaises – bien qu'il s'agisse en réalité d'un opéra bouffe – est créée le 17 décembre 1864 au Théâtre des Variétés, à Paris. Offenbach a profité de la liberté des théâtres – un décret de Napoléon III...

  • FELSENSTEIN WALTER (1901-1975)

    • Écrit par Claude VAUGIER
    • 2 238 mots
    • 1 média
    ...soin de monter des ouvrages contemporains, même s'il met en scène Die Kluge de Carl Orff (1948), et L'Amour des trois oranges de Prokofiev (1968). Pour sa part, il s'attache plus volontiers à Offenbach (Orphée aux enfers, 1948 ; La Vie parisienne, 1951 ; Les Contes d'Hoffmann, 1958 ;...
  • MEILHAC HENRI (1831-1897)

    • Écrit par Hélène LACAS
    • 400 mots

    Après des études à Louis-le-Grand, Henri Meilhac est employé dans une librairie. Il acquiert vite une réputation d'humoriste doué d'un esprit caustique et d'une imagination quelque peu fantasque, grâce à des dessins et articles parus au Journal pour rire où il collabore...

  • OPÉRETTE

    • Écrit par Sylvie FÉVRIER
    • 2 968 mots
    • 1 média
    Les idées sont dans l'air ; en 1855, Offenbach lance : « Je me dis que l'opéra-comique cessait d'être l'opéra-comique ; que la musique vraiment bouffe, fine, spirituelle, que la musique qui vit s'oubliait peu à peu, et que les compositeurs travaillant pour la salle Favart ne faisaient plus que de petits...
  • Orphée aux enfers, OFFENBACH (Jacques)

    • Écrit par Alain FÉRON
    • 541 mots
    Le nom d'Offenbach demeure attaché à Paris et aux festivités du second Empire. En 1855, cet Allemand d'origine mais Français d'adoption et de cœur prend la direction d'un théâtre, qu'il baptise Bouffes-Parisiens. C'est là qu'il va connaître la consécration avec une série d'opérettes et d'opéras...

Voir aussi