Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

INSTINCT

Le problème de la physiologie de l'instinct

L'observation systématique du comportement instinctif montre que les diverses actions exécutées par les animaux dans certaines circonstances capitales pour la survie de l'espèce suivent un ordre bien déterminé et que même des activités apparemment « anarchiques » comme les décharges explosives ne peuvent s'expliquer qu'en fonction des régulations régissant l'ensemble d'une structure instinctive. Tinbergen (1950) et Lorenz (1952) ont étudié cette structure des actes manifestes en relation avec la structure du système nerveux central.

La hiérarchie des composantes de l'instinct

Organisation du comportement selon Tinbergen - crédits : Encyclopædia Universalis France

Organisation du comportement selon Tinbergen

En s'appuyant essentiellement sur les travaux que Weiss a consacrés à l'autodifférenciation des structures de coordination du système nerveux central (1941), Tinbergen a donné une description du comportement reproducteur de l'épinoche Gasterosteus aculeatus et élaboré le modèle théorique de fonctionnement des composantes physiologiques de l'instinct. Weiss propose une classification hiérarchique en six niveaux, allant, en ordre décroissant, des mouvements d'ensemble de l'organisme dans sa totalité aux mouvements de l'unité motrice individuelle. L'analyse minutieuse des composantes motrices intervenant aux différents stades de l'activité manifeste de l'épinoche a permis à Tinbergen de situer, par rapport à la classification neurophysiologique de Weiss, les divers niveaux d'action observés et d'établir un schéma de principe de l'organisation hiérarchique des « centres » qui semblent intervenir dans l'extériorisation des comportements instinctifs. Dans le schéma de la figure, les divers mécanismes innés de déclenchement (IRM) sont représentés par une petite flèche horizontale figurant une cellule nerveuse. Les cercles représentent les centres, les facteurs agissant sur ceux-ci étant figurés par les flèches en trait continu. Certains centres sont pourvus d'un rectangle horizontal, lequel représente leur état de repos. On peut admettre qu'ils sont perpétuellement activés neurophysiologiquement, mais que la décharge de leur énergie ne devient possible qu'à partir du moment où l'IRM vient enlever le blocage figuré par le rectangle. Le centre de niveau supérieur ne comporte pas de blocage. Cela se justifie du fait que l'activation d'un instinct majeur (major drive) donne lieu, dans tous les cas, à un comportement appétitif largement indifférencié. Chez l'épinoche, l'activation de ce centre est due à une augmentation du taux des hormones sexuelles dans le sang, les actions endocriniennes amenant à ce résultat étant elles-mêmes fonction de l'allongement printanier de la période diurne. Les impulsions émanant du centre supérieur peuvent, en principe, être canalisées dans deux directions : soit vers le centre immédiatement inférieur, soit vers le comportement appétitif. Le deuxième centre étant à ce moment encore à l'état de blocage, ces impulsions activent un premier comportement appétitif généralisé, qui se traduit par la migration de printemps. Celle-ci va continuer à se manifester jusqu'à ce que l'animal rencontre les stimuli capables de supprimer le blocage du centre susdit. Ceux-ci sont l'élévation de la température et la présence d'une végétation appropriée. À partir de ce moment, les impulsions du centre supérieur cessent de se décharger, et la voie est ouverte au comportement appétitif suivant : la migration arrive à son terme et l'action du premier IRM va, selon l'expression de Lorenz, rendre l'animal « territorial ». La même séquence fonctionnelle va se produire pour le centre inférieur suivant, et l'on va observer à l'intérieur du territoire un comportement appétitif, qui se maintiendra à son tour jusqu'à ce que soient découverts les stimuli-signes permettant de débloquer les centres régissant[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : professeur honoraire à l'université de Louvain, membre de l'Académie royale des sciences et de l'Académie royale de langue et de littérature française de Belgique, membre correspondant du Muséum national d'histoire naturelle de Paris

Classification

Pour citer cet article

Georges THINÈS. INSTINCT [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Organisation du comportement selon Tinbergen - crédits : Encyclopædia Universalis France

Organisation du comportement selon Tinbergen

Autres références

  • BEHAVIORISME

    • Écrit par Jean-François LE NY
    • 4 682 mots
    • 2 médias
    ...tard par les éthologistes de l'école «  objectiviste », qui, dans un contexte théorique quelque peu différent, l'appliqueront avec succès à l'étude des comportements instinctifs chez l'animal et, avec plus de risque théorique, à l'enfant ou à l'homme. Toutefois, ni Watson ni les behavioristes qui...
  • CONSTRUCTIONS ANIMALES

    • Écrit par Rémy CHAUVIN
    • 7 164 mots
    • 7 médias
    ...profondeur. On peut donc conclure que les fourmis ont un sens très fin des surfaces planes et de la moindre dépression qui peut s'y produire. Mais leur «  instinct de comblement » des cavités peut les entraîner à des aberrations bizarres. Si par exemple on entoure le dôme de rubans verticaux et concentriques...
  • ÉTHOLOGIE

    • Écrit par Odile PETIT
    • 2 528 mots
    • 2 médias
    ...entre différents courants théoriques. L'éthologie s'est cristallisée autour de la querelle de l'inné et de l'acquis, qui a stimulé soit les recherches sur l'instinct (concept considéré comme trop étroit rétrospectivement), qui se rattachent à l'éthologie dite objectiviste, soit les études sur l'apprentissage,...
  • FONDEMENTS DE L'ÉTHOLOGIE

    • Écrit par Raymond CAMPAN
    • 251 mots

    C'est par un débat contradictoire autour du concept d'instinct que l'éthologie – étude comparative du comportement animal – s'est constituée en science autonome. Elle est fondée sur les travaux de l'Autrichien Konrad Lorenz (1903-1989) et du Néerlandais Nikolaas...

  • Afficher les 15 références

Voir aussi