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INFAILLIBILITÉ PONTIFICALE

Pour l'Église catholique, l'infaillibilité peut caractériser tel enseignement d'un concile œcuménique, des évêques unanimes ou d'un pape parlant ex cathedra ; elle est une conséquence de l'indéfectibilité de l'Église, c'est-à-dire de la promesse du Christ selon laquelle l'enseignement que celle-ci donnerait en son nom serait son enseignement à lui (Mt., xxviii, 20 ; Lc., x, 16).

Cette infaillibilité concerne exclusivement la garde du dépôt de la foi, lequel est complet depuis la mort du dernier des apôtres : une définition infaillible ne saurait donc rien ajouter ni retrancher au contenu de la révélation, ni prendre pour objet un autre type de vérité. De plus, l'infaillibilité est un concept négatif : une proposition ainsi qualifiée est seulement garantie exempte d'erreur, mais cela n'entraîne pas qu'elle soit toujours formulée dans les meilleurs termes possibles ni qu'elle survienne au moment le plus opportun de la vie de l'Église.

L'infaillibilité dont le Christ a assuré son Église prise comme telle, trouve une application particulière dans l'enseignement du pape, lorsqu'il entend définir une doctrine révélée, concernant la foi ou les mœurs, et en tant que docteur de l'Église entière, manifestant expressément l'intention de porter une définition dogmatique ex cathedra, ainsi que le définit le Ier concile du Vatican. Un tel enseignement est irréformable « par lui-même, et non par le fait du consentement de l'Église » (ex sese, non autem ex consensu Ecclesiae), autre formule technique, ajoutée à la dernière heure pour écarter la nécessité juridique d'un acte de l'épiscopat donnant à la définition papale le caractère irréfragable qui lui ferait défaut sans cela. Par conséquent, il ne serait pas juste, selon la dogmatique catholique, de dire que « le pape est infaillible sans le consentement de l'Église », puisque précisément le pape est infaillible pour autant qu'il est l'interprète par excellence du sentiment de l'Église (sensus Ecclesiae).

L'irréformabilité n'entraîne pas que la formulation ne puisse, le cas échéant, être améliorée par un concile ultérieur ou un autre pape. Il convient de remarquer aussi qu'on ne connaît, depuis le Ier concile du Vatican, qu'un seul exemple de définition infaillible, celle de l'Assomption de Marie par Pie XII en 1950. Enfin, la définition de l'infaillibilité du pape n'abolit pas la thèse, traditionnelle en théologie catholique, selon laquelle un pape pourrait, à titre privé, prôner des formulations doctrinales hérétiques (Canon Si papa de l'ecclésiologie médiévale).

Si l'enseignement quotidien des papes a eu, depuis 1870, un retentissement considérable auprès des catholiques, cela est certainement dû à la définition de son infaillibilité ex cathedra ; mais les théologiens se demandent, à l'occasion, si un tel retentissement était proportionné au caractère strictement délimité de l'enseignement dogmatique du Ier concile du Vatican. Les dogmes ont une autre portée sociale, que leur seule définition ne circonscrit pas : il n'appartient pas seulement au sociologue de la religion de l'étudier, mais aussi au croyant d'y réfléchir.

— Hervé LEGRAND

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Écrit par

  • : professeur honoraire à l'Institut catholique de Paris

Classification

Pour citer cet article

Hervé LEGRAND. INFAILLIBILITÉ PONTIFICALE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ALFRINK BERNARD JAN (1900-1987)

    • Écrit par Kees MIDDELHOFF
    • 2 120 mots

    Archevêque d'Utrecht pendant les tumultueuses années soixante, le cardinal Bernard Jan Alfrink fut l'initiateur de l'idée de collégialité lors du IIe concile du Vatican. Président international de Pax Christi, il restera celui dont l'élimination par Rome fut, selon Hans...

  • CATHOLICISME - Le pontificat de Benoît XVI

    • Écrit par Giancarlo ZIZOLA
    • 5 815 mots
    • 1 média
    – Plus il était touché par ces incidents, plus l'Infaillible a été obligé de se reconnaître faillible, tentant des autocritiques publiques plus ou moins convaincantes et produisant aussitôt des correctifs à ses positions reconnues comme erronées ou inopportunes. Il s'est ainsi donné de nombreuses...
  • DÖLLINGER JOHANN IGNAZ VON (1799-1890)

    • Écrit par Roger AUBERT
    • 925 mots

    Ecclésiastique et universitaire allemand, historien de l'Église et adversaire de l'infaillibilité pontificale. Né dans une famille de professeurs à Bamberg (Bavière), ordonné prêtre en 1822, docteur en théologie en 1826, Döllinger est nommé cette même année professeur à l'université...

  • DUPANLOUP FÉLIX (1802-1878)

    • Écrit par Roger AUBERT
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    Évêque d'Orléans, Dupanloup fut une personnalité marquante de l'Église et de la politique française dans la seconde moitié du xixe siècle. Enfant naturel, peut-être d'un des « grands noms de France » (selon P. Lasserre), il reçut à Paris, où sa mère se fixa en 1809, une excellente...

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