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BAYER HERBERT (1900-1985)

Herbert Bayer fut l'un des derniers grands survivants du Bauhaus : bien qu'il n'ait passé que quelques années dans cette école prestigieuse, les principes qui y étaient défendus demeurèrent pour lui de véritables lignes de conduite tout au long de sa carrière. Sa contribution majeure – ou du moins la plus connue – fut sans doute son travail de typographe et d'affichiste au Bauhaus de Dessau, dans les années 1920-1930. Utilisant des combinaisons esthétiques audacieuses de lettres, de photomontages et de formes géométriques simples et colorées, il fut l'un des artistes les plus prolifiques du graphisme constructiviste. Après guerre, aux États-Unis, il contribua également – avec ses collègues László Moholy-Nagy et Josef Albers qui y avaient aussi trouvé refuge – à diffuser les idées du Bauhaus au-delà de l'Allemagne et à en faire un mouvement international. Touchant à tous les arts plastiques (y compris à l'architecture à partir de 1960), mêlant « arts » et « crafts », Bayer est l'incarnation même de « l'artiste nouveau » envisagé par Gropius dans son manifeste du Bauhaus en 1919. Il fut sans doute l'un des derniers de ce type.

Les années de formation : du Jugendstil à la découverte du Bauhaus

Né en avril 1900 dans un petit village autrichien, Bayer entre à dix-sept ans comme apprenti chez un architecte et designer de Linz, où il se familiarise avec l'esthétique de la Sécession viennoise. Trois ans plus tard, il poursuit son apprentissage dans le bureau d'Emmanuel Josef Margold, membre de la célèbre colonie d'artistes fondée au Mathildenhöhe et qui regroupe des architectes comme Olbrich et Behrens. Il découvre par hasard Du spirituel dans l'art de Kandinsky, puis le célèbre Manifeste du Bauhaus rédigé par Gropius en avril 1919 : « architectes, sculpteurs, peintres, nous devons tous revenir au métier. Il n'y a pas „d'art professionnel“. Il n'y a pas de différence de nature entre l'artiste et l'artisan ». Le mot d'ordre de Gropius le décide à se rendre à Weimar : il arrive au Bauhaus en octobre 1921. Constatant avec déception l'absence d'un enseignement de typographie, Bayer se consacre à la peinture pendant ses premiers dix-huit mois passés au Bauhaus. Peu original, son art pictural subit l'influence de ses professeurs – comme il subira plus tard celles, entre autres, de Magritte, Chirico, Léger, Max Bill. Comme tous les étudiants du Bauhaus de Weimar, il est confronté au conflit qui oppose dans l'école les tenants de l'expressionnisme et ceux du constructivisme – conflit qui se solde par l'expulsion de Itten et son remplacement par Moholy-Nagy au printemps de 1923.

« Expressionniste » et éclectique en peinture, Bayer est « constructiviste » (avec parfois une forte dose de surréalisme) dans les domaines où il excelle : la typographie, la mise en forme spatiale d'expositions, la photographie. Sa première réalisation importante en typographie, la couverture de l'album Staatliches Bauhaus in Weimar 1919-1923, constitue un reniement de ses premiers essais viennois encore très marqués par le Jugendstil : sur un fond noir quatre lignes de lettres, tantôt bleues tantôt rouges remplissent toute la surface.

Dessinés la même année (1923), les billets de 1 à 10 millions de marks que lui commande le gouvernement de Thuringe participent de la même esthétique de la simplicité : pas de figures, les seules variations sont dans la couleur et la diversité des caractères. Peu avant de partir pour un an en Italie (suivant en cela la tradition du Wanderjahr encore très active dans les pays anglo-saxons), Bayer dessine des projets de kiosques, de pavillons d'exposition ou de petits bâtiments publicitaires. Tracées en axonométrie, utilisant les couleurs primaires, ces « folies » dénotent[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art à l'université Harvard
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Yve-Alain BOIS et Universalis. BAYER HERBERT (1900-1985) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AFFICHE

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 6 817 mots
    • 12 médias
    ...développe les principes constructivistes. László Moholy-Nagy édite les livres de la série Bauhausbücher, où le concept de grille est donné en exemple. Herbert Bayer, créateur du département de typographie et de publicité à Dessau, se préoccupe de clarté et de lisibilité, de même que Joost Schmidt,...
  • BAUHAUS

    • Écrit par Serge LEMOINE
    • 4 461 mots
    • 6 médias
    ...deux guerres. Les expériences y furent nombreuses : citons celles de Ludwig Hirschfeld-Mack sur les jeux de lumière ; elles passionnèrent Kandinsky, et l'écho s'en retrouve jusque dans un tableau de Klee, la Fugue en Rouge (datée de 1921), et dans la Composition spatiale d'HerbertBayer (1925).
  • CHEFS-D'ŒUVRE PHOTOGRAPHIQUES DU MOMA. LA COLLECTION THOMAS WALTHER (exposition)

    • Écrit par Armelle CANITROT
    • 1 109 mots
    • 1 média
    ...Distorsions de corps dans des miroirs déformants d’André Kertész évoquent les recherches de Picasso ou Dali. L’autoportrait sidéré de l’Allemand Herbert Bayer en statue antique amputée, plonge au cœur de l’Humainement impossible (1932). En 1936, le Suisse Helmar Lerski étudie les expressions...
  • TYPOGRAPHIE

    • Écrit par Michel WLASSIKOFF
    • 6 595 mots
    • 1 média
    ...(1902-1974), à son tour, revendique une mise en page fonctionnelle et épurée, dont il systématise les principes dans son ouvrage Die Neue Typographie en 1928. Herbert Bayer, en charge de l'atelier d'imprimerie et de publicité au Bauhaus, dessine l'Universal, comportant uniquement des bas de casse,...

Voir aussi