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FASCISME

Pris dans son sens littéral, le terme de fascisme désigne le mouvement fondé en Italie en 1919 et le système politique érigé en 1922 après la prise du pouvoir par le chef de ce mouvement, Benito Mussolini. Il s'applique par extension à divers partis, mouvements et organisations dont l'action s'est développée dans la quasi-totalité des pays européens entre la fin de la Première Guerre mondiale et la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Le souvenir laissé dans les esprits par le nazisme allemand et le traumatisme de la Seconde Guerre mondiale ont paradoxalement masqué certains des aspects les plus troublants du fascisme. On se contente d'y voir le plus souvent le reflet d'une mentalité très particularisée, voire d'une aberration, que l'on oppose par commodité à la volonté qu'ont ailleurs les hommes de défendre la démocratie ou les conquêtes du socialisme.

C'est oublier notamment que le fascisme, tel qu'il s'est exprimé dans plusieurs pays, témoignait au fond de bien des traits communs aux régimes et aux idéologies qui le dénonçaient : nationalisme, militarisme, culte du travail, obsession des records de production économique, souci affiché de promouvoir les réalisations « sociales », politique nataliste, volonté de « former » la jeunesse, superstition de la collectivité symbolisée par des manifestations de masse, domination d'un parti unique, admiration inconditionnelle vouée au chef national, etc. À la lumière de telles constatations, on comprend qu'une certaine forme de fascisme ait pu survivre aux régimes qui s'en sont officiellement réclamés. Le fascisme apparaît dès lors comme un phénomène beaucoup plus général qu'il n'y semble à première vue : il est même permis de penser qu'il représente une des tendances profondes de la civilisation du xxe siècle.

Principes d'action

On ne peut se faire une idée précise de ce qu'est réellement le fascisme sans rechercher les caractéristiques communes aux différents mouvements qu'il a animés. Cette analyse permet de constater la répétition des mêmes phénomènes à divers niveaux : conception, politique générale, organisation, éthique.

La pensée politique

Les doctrines fascistes se définissent par le rejet des principes du libéralisme traditionnel, par la condamnation des institutions et des usages de la démocratie parlementaire et par la remise en cause des valeurs de l'individualisme tel que l'avait codifié, autour de la notion de droits naturels, la pensée philosophique du xviiie siècle. Le fascisme apparaît ainsi comme un refus systématique de l'ordre politique, économique et social qui s'était progressivement instauré, au cours du xixe siècle, dans la plupart des sociétés occidentales et dont le parlementarisme, le multipartisme, la garantie des droits et des libertés individuelles, la pratique du « laisser faire, laisser passer » constituaient les caractères essentiels. Refusant avec la même violence les principes du socialisme d'inspiration marxiste, le système de pensée fasciste s'organise positivement autour de l'affirmation de certains thèmes : exaltation, et souvent sacralisation de la valeur nationale considérée comme la valeur suprême dans l'ordre politique (il s'agit à la fois de renforcer à l'intérieur l'unité et la cohésion de la nation et de développer à l'extérieur sa grandeur et sa puissance) ; volonté d'instaurer un État fort, faisant prévaloir son autorité sur les droits et sur les libertés des personnes ; affirmation de la nécessité d'un nouvel ordre social intégrant plus étroitement l'individu à la collectivité et mettant notamment fin aux « aliénations » de la condition prolétarienne (c'est dans ce sens que les divers mouvements fascistes se prétendent socialistes et proclament leur volonté d'associer l'affirmation de ce socialisme à celle de leur nationalisme) ; culte[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'Institut d'études politiques de Paris
  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

Classification

Pour citer cet article

Universalis et Raoul GIRARDET. FASCISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

La Libye italienne - crédits : Baron/ Hulton Archive/ Getty Images

La Libye italienne

Marche sur Rome, 1922 - crédits : Pathé

Marche sur Rome, 1922

La Garde de fer en Roumanie, 1940 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

La Garde de fer en Roumanie, 1940

Autres références

  • QU'EST-CE QUE LE FASCISME ? HISTOIRE ET INTERPRÉTATION (E. Gentile)

    • Écrit par Pierre MILZA
    • 961 mots

    Il aura fallu beaucoup de temps pour que le public francophone prenne connaissance de l'œuvre de Renzo De Felice, le grand historien romain disparu en 1996, auquel nous devons un réexamen radical de la nature du régime mussolinien. Emilio Gentile, qui fut son élève et qui est aujourd'hui professeur...

  • LATRAN ACCORDS DU (1929)

    • Écrit par Vincent GOURDON
    • 208 mots
    • 1 média

    Signés par le pape Pie XI (1922-1939) et Mussolini, les accords du Latran règlent la « question romaine », qui envenimait les relations entre la papauté (et, par suite, les catholiques) et l'État unitaire italien, depuis que ce dernier avait annexé Rome le 2 octobre 1870, mettant...

  • ALBANIE

    • Écrit par Anne-Marie AUTISSIER, Odile DANIEL, Universalis, Christian GUT
    • 22 072 mots
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    ...brouilla avec la Yougoslavie puis, un peu plus tard (22 nov. 1927), un traité d'alliance offensive et défensive. Il put éviter une union douanière que Mussolini tentait d'imposer dès 1932, mais une démonstration navale devant Durrës (22 juin 1934) l'obligea à renoncer à une nationalisation...
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  • Afficher les 51 références

Voir aussi