NANCY ÉCOLE DE

De 1901, date du dépôt des statuts de l'Alliance provinciale des industries d'art – l'autre nom de l'École de Nancy – à 1909, date de l'Exposition internationale de l'est de la France qui accueillit la dernière exposition collective du groupe d'artistes lorrains , Nancy fut le cadre du développement d'un mouvement Art nouveau qui toucha tous les domaines de la création artistique et dynamisa les différentes industries d'art de la région. En témoigne la diversité des trente personnalités qui composaient son comité directeur, présidé par Émile Gallé (1846-1904) ; à côté des artistes décorateurs y figuraient des architectes, des peintres, des sculpteurs mais également des industriels, des professeurs et des critiques d'art. Avant même la création de cette association, certains artistes avaient mené des recherches dans les années 1880 qui avaient permis l'éclosion de l'Art nouveau en Lorraine.

Un mouvement régionaliste

Au lendemain de la défaite de 1870, la France fut amputée de l'Alsace et d'une partie de la Lorraine, territoires annexés par l'Allemagne. Devenue capitale de l'est de la France, Nancy connut un développement démographique et économique sans précédent dans les dernières décennies du xix^e siècle. De nombreux Alsaciens et Lorrains désireux de demeurer français quittèrent les régions devenues allemandes pour s'installer à Nancy. Parmi eux, des industriels, intellectuels, artistes et artisans qui contribuèrent à la prospérité de leur ville d'adoption et favorisèrent l'éclosion d'un mouvement artistique de premier plan. Particulièrement vif en Lorraine, le traumatisme de l'annexion explique l'usage par de nombreux artistes de motifs chargés de messages symboliques évidents. Si la figure de Jeanne d'Arc se rencontre souvent, le chardon, emblème de Nancy, fournit le sujet des objets les plus divers, tout comme la croix de Lorraine à double traverse qu'Émile Gallé, artiste touche à tout et chef de fil de l'Art nouveau nancéien, associe à sa signature.

Particulièrement éloquente est la table Le Rhin (Musée de l'école de Nancy, Nancy), que Gallé présenta à l'Exposition universelle de Paris en 1889. Son plateau est orné d'un décor figuratif marqueté selon un carton de Victor Prouvé (1858-1843) que complète une citation de Tacite : « Le Rhin sépare des Gaulles toute la Germanie. » C'est également pour exalter la culture locale que de nombreux artistes nancéiens s'inspirèrent dans leurs créations du xviii^e siècle. Véritable âge d'or de l'art lorrain grâce au mécénat de Stanislas Leszczynski, le xviii^e siècle évoquait en outre une époque où la Lorraine, non encore rattachée à la France, était un territoire indépendant. Les meubles produits par Émile Gallé et Louis Majorelle (1859-1926) dans les années 1880 demeurent très largement inspirés du style Louis XV. S'inscrivant dans une tradition locale dont témoignent les grilles de la place Stanislas, chefs-d'œuvre de Jean Lamour, la ferronnerie Art nouveau connut un développement important à Nancy.