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LECOURT DOMINIQUE (1944-2022)

Dominique Lecourt - crédits : Bertrand Guay/ AFP

Dominique Lecourt

Historien et philosophe des sciences, Dominique Lecourt s’inscrit dans le courant de l’épistémologie historique, dans la continuité de Gaston Bachelard, Georges Canguilhem et Michel Foucault.

Dominique Lecourt est né à Paris le 5 février 1944, dans une famille déchirée par la guerre. Son père, Robert Paul Lecourt, était journaliste. Sa mère, Marie-Suzanne Chenot, était la sœur du juriste Bernard Chenot, futur ministre de la Santé publique et de la Justice puis vice-président du Conseil d’État. Lecourt entre à l’École normale supérieure (ENS « Ulm ») en 1965. Il y devient l’élève du philosophe Louis Althusser – qui joua un rôle clé dans la formation d’une génération de philosophes intéressés à rénover le marxisme et à penser les sciences – et de Georges Canguilhem, qui dirigea son mémoire de maîtrise, L’Épistémologie historique de Gaston Bachelard. Celui-ci, publié en 1969, contribua à mettre en avant sous cette expression d’« épistémologie historique » une approche « française » articulant indissociablement histoire et philosophie des sciences, attentive aux structures conceptuelles et à leurs transformations ainsi qu’aux ruptures dans les modes de formation des objets et des problèmes scientifiques. Dominique Lecourt participa, entre 1966 et 1969, aux mouvements maoïstes de l’ENS qui suivent la création des Cahiers marxistes-léninistes (1964), dont il assure la publication à partir de 1966, et à la fondation de l’Union de la jeunesse communiste marxiste-léniniste (UJCML). Cet engagement articulant philosophie des sciences et politique orientera son parcours.

Un philosophe de combat

Lecourt prend ses distances avec l’action militante dès 1969. Il enseigne au lycée Jean-Baptiste-Corot puis s’engage en 1973 dans une carrière universitaire, d’abord à Amiens, puis à Paris où il est nommé professeur à l’université Paris-VII-Diderot en 1988. Il conserve une importante activité dans la politique de la recherche et de l’éducation. Il collabore au Centre d’études, de recherche et d’éducation socialiste (CERES) créé par Jean-Pierre Chevènement, qu’il rejoint au ministère de l’Éducation nationale en 1984. Il contribue, avec François Châtelet, Jacques Derrida et Jean-Pierre Faye, à la fondation du Collège international de philosophie en 1983 et joue un rôle clé dans le développement du Centre national d’enseignement à distance (CNED). Il promeut en outre l’implantation d’enseignements en histoire et philosophie des sciences dans les cursus de sciences et de médecine, défendant la nécessité d’une approche critique et historique visant à se détacher des évidences de la pratique scientifique et à ancrer la philosophie dans « les problèmes de la science en train de se faire ». En médecine, à la suite de Canguilhem, ces cours visent à interroger l’articulation des normes vitales et sociales et promouvoir des pratiques attentives aux valeurs propres des patients.

Cet effort pour diffuser l’histoire et la philosophie des sciences se traduit par une forte activité éditoriale. Pressentant les transformations imposées à la culture par le développement des technologies informatiques et les enjeux démocratiques qu’elles soulèvent, Lecourt propose en 1985, dans le cadre de la Fondation Diderot, une Encyclopédie informatique nationale à laquelle chacun pourrait contribuer dans le cadre d’une confrontation théorique permanente. Il crée et dirige, aux Presses universitaires de France, les collections « Pratiques théoriques » (avec Étienne Balibar) et « Science, histoire et société », édite des dictionnaires de référence (Encyclopédie des sciences, 1998; Dictionnaire d’histoire et philosophie des sciences, 1999 ; Dictionnaire de la pensée médicale, 2004), des ouvrages de synthèse (notamment plusieurs « Que sais-je ? »), ainsi que de nombreux ouvrages collectifs[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences en histoire et philosophie des sciences, université Paris-Cité/SPHERE-Centre Georges Canguilhem
  • : maître de conférences en philosophie, chercheuse UMR CNRS-université Paris-Cité SPHERE, directrice de l'institut La Personne en médecine

Classification

Pour citer cet article

Claude-Olivier DORON et Céline LEFÈVE. LECOURT DOMINIQUE (1944-2022) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 09/03/2023

Média

Dominique Lecourt - crédits : Bertrand Guay/ AFP

Dominique Lecourt

Autres références

  • FÉDIDA PIERRE (1934-2002)

    • Écrit par
    • 1 516 mots
    C'est en 1993 qu'il fonde, avec Dominique Lecourt, le Centre d'études du vivant, dont la vocation est de mettre en débat éthique et philosophique, recherches et interrogations engendrées par les sciences du vivant, comme « rattrapées » par la portée sociale et humaine de leurs fulgurantes mutations technologiques....
  • LYSSENKO (AFFAIRE)

    • Écrit par
    • 3 414 mots
    • 5 médias
    ...puis annulé. En 1938, les principaux généticiens sont sous les verrous. Vavilov, déclaré ennemi de classe, mourra de faim en 1943 à la prison de Saratov. Dominique Lecourt montre clairement que Lyssenko apparaît dans cette première période comme l'acteur principal d'une tragédie écrite par Staline et destinée...