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COÛTS DE TRANSACTION

Ce qu'il est maintenant convenu d'appeler l'économie des coûts de transaction a pour origine une question d'apparence fort simple, soulevée par Ronald Coase dans « The Nature of the Firm », un article maintenant célèbre, paru en 1937, et qui valut à son auteur le prix Nobel d'économie de l'année 1991. Cette question est la suivante : si on attribue au marché, et au mécanisme des prix qui en constitue la colonne vertébrale, un minimum d'efficacité, comment expliquer que l'organisation de l'activité économique se fasse aussi souvent à l'intérieur d'un dispositif qu'on appelle l'entreprise ? Et, symétriquement, si l'entreprise peut structurer efficacement les transactions, comment expliquer qu'il n'y ait pas une seule grande entreprise pour tirer pleinement parti de la division du travail et de la spécialisation des compétences ? En d'autres termes, comment expliquer la diversité des modes d'organisation des transactions qui caractérise les économies de marché (et, à cet égard, toute économie) ? Ces interrogations, et les réponses proposées par Ronald Coase et ses successeurs, soulèvent des problèmes profonds qui touchent l'ensemble de la théorie économique et concernent les structures mêmes de l'organisation sociale.

Un bref rappel historique permettra d'abord de caractériser cet apport. Puis nous résumerons les principaux concepts mis en œuvre, liés à la notion clé de « transaction ». Une troisième partie explorera l'application de ces concepts à l'analyse des modes organisationnels opérant au niveau microéconomique. Enfin, la dernière partie indiquera les pistes récemment ouvertes dans l'analyse des institutions qui déterminent largement le niveau des coûts de transaction.

Historique

L'article de Ronald Coase (1937) constitue la pièce fondatrice de l'économie des coûts de transaction, bien qu'un autre auteur, l'économiste américain John Commons, ait presque simultanément mis au centre de sa réflexion le concept de transaction, mais dans un tout autre contexte, celui d'une analyse systémique. L'analyse initiale de Coase porte sur « la nature de la firme » et, plus précisément, sur ce phénomène clé qu'est l'intégration verticale. Pourquoi, lorsqu'il existe un marché concurrentiel pour les facteurs et/ou composants dont elle a besoin, une entreprise décide-t-elle de les produire elle-même plutôt que de les acquérir sur le marché ? Sauf à abandonner l'idée que les marchés concurrentiels sont efficaces, la théorie conventionnelle n'avait pas, et n'a toujours pas, de réponse satisfaisante à cette question. Or cette dernière était d'autant plus pertinente au moment où Coase la soulevait que les économies de marché étaient secouées par une crise extrêmement profonde (la grande dépression des années 1930) et que l'émergence d'une économie socialiste (l'ex-U.R.S.S.) proposait une alternative, celle d'une économie organisée comme une seule grande firme. Mais Coase ne se contenta pas de poser la question. Il proposa une réponse très bien articulée : le marché et les entreprises constituent des modes alternatifs d'organisation des transactions, et le choix entre ces modes dépend de leurs coûts d'usage respectifs, c'est-à-dire de ce qu'il en coûte pour organiser les transactions selon un mode ou un autre. Il n'y a donc pas marché ou organisation, mais marchés et organisations.

Il faudra une bonne quarantaine d'années pour qu'on commence à percevoir vraiment la pertinence de cette contribution et pour qu'on commence à en tirer sérieusement les conséquences. Entre-temps, Coase aura publié un autre article tout aussi influent à terme que le premier et qui confortera son programme de recherche, « The[...]

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Écrit par

  • : professeur de sciences économiques à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Claude MÉNARD. COÛTS DE TRANSACTION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ASSURANCE - Économie de l'assurance

    • Écrit par Pierre PICARD
    • 5 633 mots
    ...C'est aussi le cas lorsque des tempêtes à grande échelle (comme en France en décembre 1999) sont à l'origine d'un nombre important de dommages aux biens. En troisième lieu, un assureur supporte bien d'autres coûts que les indemnités versées, qu'il s'agisse de la gestion des sinistres (frais d'expertise et...
  • AUTOFINANCEMENT

    • Écrit par Geneviève CAUSSE
    • 5 257 mots
    ...marchés de capitaux ne sont pas parfaits, d'autre part, la rémunération des intermédiaires lors du recours à d'autres moyens de financement entraîne des coûts de transaction : on peut dès lors comprendre l’attrait pour l’autofinancement. . Il est le mode de financement le moins onéreux en termes de coûts...
  • BOURSE - Microstructure des marchés financiers

    • Écrit par Laurence LESCOURRET, Séverine VANDELANOITE
    • 5 883 mots
    • 1 média

    La microstructure des marchés financiers est un domaine de la finance créé au début des années 1970 dans le but d'analyser l'influence des différents modes d'organisation de la négociation des valeurs mobilières sur la formation des prix des actifs et celle des coûts de transaction....

  • COASE RONALD HARRY (1910-2013)

    • Écrit par Françoise PICHON-MAMÈRE
    • 1 310 mots
    ...Coase explique alors qu'un tel système permettrait certes de réduire efficacement les coûts de production, mais qu'il en créerait de nouveaux, les « coûts de transaction », mesurés par exemple par le coût d'accès aux informations du marché ou par le coût des contrats particuliers établis avec les...
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