CLASSICISME
Article modifié le
Art
Classicisme et baroque
De l'ensemble des définitions communément admises du mot « classicisme », il semble que l'on puisse tirer une énumération à peu près satisfaisante des attributs du classicisme au sens le plus large : la notion de perfection, celle d'un modèle tiré de l'Antiquité, celle enfin d'une conformité à établir avec cette perfection – tout classicisme est essentiellement normatif et suppose des règles.
L'application d'une doctrine aussi générale au cas beaucoup plus particulier des arts visuels a été assez tardive – ce qui après tout n'a rien de fort surprenant. Pourquoi se fût-on préoccupé d'analyser cette notion de classicisme, d'en scruter le contenu, si le classicisme était synonyme de perfection : il incombait à celle-ci de s'imposer d'elle-même sans discussion.
Il est permis de croire que la contestation de l'idée de classicisme dans les arts avec ce que l'on pourrait appeler « l'explosion du baroque » chez les esthéticiens allemands dans la seconde moitié du xixe siècle a entraîné paradoxalement son approfondissement. Assez mal défini encore chez un Burckhardt, le baroque a pris figure de style à partir de 1875 environ. D'emblée, et tout naturellement, il devait se définir en opposition au classicisme. Les historiens, en faveur de la logique de cette hypothèse, durent néanmoins constater que l'état rudimentaire de l'analyse du classicisme ne permettait point de la vérifier. Il est remarquable, par exemple, que Gürlitt, dans son histoire du style baroque publiée de 1887 à 1889, mette en évidence le classicisme à propos de l'art hollandais du xviie siècle, alors que pour l'art français il se contente d'employer l'expression de « renaissance tardive ». L'opposition d'une « philosophie » baroque date en réalité de la publication, en 1898, du livre de Wölfflin, L'Art classique, à laquelle bien plus tard firent suite les Principes fondamentaux (Grundbegriffe) où « classique » et « baroque » figurent comme des catégories strictement opposées. Chez Wölfflin, comme d'ailleurs chez la plupart de ses compatriotes, c'est au baroque que se trouve réservée la part active, positive en quelque sorte, tandis que le classicisme semble y avoir valeur presque négative, ce contre quoi se sont fortement élevés des historiens comme P. Francastel et J. Thuillier.
On peut dresser un tableau à la fois très schématique et très systématique des « polarités » respectives du classicisme et du baroque. Il est clair qu'aucune œuvre d'art ne récapitule ces attributs dans leur pureté. D'autre part, aucun artiste antérieur au xixe siècle ne s'est jamais qualifié lui-même de « classique » – non plus d'ailleurs que de « baroque ».
Portée européenne
L'ouvrage de Wölfflin L'Art classique porte en sous-titre : Initiation au génie de la Renaissance italienne, de sorte que l'art classique se trouve étroitement limité quant au temps et quant aux lieux. Mais ici l'autorité de Wölfflin n'a pas prévalu. Car le sens du mot « Renaissance », quasi-synonyme du xvie siècle, était beaucoup trop établi pour qu'on lui en substituât un autre. D'autre part, l'expression de « baroque » ne s'était pas fixée dans le langage pour désigner exclusivement le xviie siècle. De plus, puisque le xviie siècle était celui du baroque, il devait en être de même pour son antonyme, le classique. La chronologie à peu près universellement admise aujourd'hui chez les historiens d'art distingue donc la Renaissance de l'époque baroque-classique, entre lesquelles elle insère, plus récemment, le « maniérisme ». Le classicisme constitue par conséquent l'un des courants du xviie siècle et, à des degrés divers,[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Pierre DU COLOMBIER : critique d'art
- Henri PEYRE : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur honoraire à l'université Yale, Connecticut, États-Unis
Classification
Médias
Autres références
-
GENRES LITTÉRAIRES, notion de
- Écrit par Guy BELZANE
- 1 847 mots
Avant d'être une notion problématique, inscrite dans une histoire et lourde d'enjeux esthétiques, les genres littéraires sont, pour la plupart d'entre nous, une réalité éditoriale, indissociable de notre expérience concrète : ils circonscrivent des territoires (le rayon « poésie » d'une...
-
ALLÉGORIE, notion d'
- Écrit par François TRÉMOLIÈRES
- 1 455 mots
Une première conception de l'allégorie provient de la rhétorique (Cicéron, Quintilien) : elle définit comme une « métaphore continuée » cette manière de parler qui désigne une chose par une autre (du grec allos, « autre », et agoreuein, « parler en public »). La métaphore...
-
ARTS POÉTIQUES, notion de
- Écrit par Filippo D' ANGELO
- 1 333 mots
On désigne par l'expression « art poétique » les textes qui élaborent une doctrine à la fois descriptive et prescriptive de la création littéraire. L'adjectif « poétique » ne renvoie donc pas ici au genre de la poésie lyrique, comme sa signification courante pourrait...
-
DÉBAT, genre littéraire
- Écrit par Véronique KLAUBER
- 347 mots
Le terme générique « débat » correspond à une série de genres poétiques dialogués que les trouvères et les troubadours cultivaient depuis le début du xiie siècle : d'abord en latin, sous le nom de disputatio, puis en langue vulgaire ; il est appelé tenson ou jocpartit...
-
DESCRIPTION, notion de
- Écrit par Elsa MARPEAU
- 985 mots
La description permet de donner à voir en imagination, grâce au langage. Elle constitue une pause, un contretemps dans le flux du récit. Sa finalité représentative semble ainsi l'opposer aux visées narratives de ce dernier. Toutefois, cette distinction théorique est plus complexe dans la pratique,...
-
DIALOGUE
- Écrit par Françoise ARMENGAUD et Robert MISRAHI
- 4 423 mots
- 1 média
L'entrée en dialogue paraît d'autant plus désirable que le partenaire est plus différent ou plus lointain. Le dialogue répond à une préoccupation éthique – il serait l'antiviolence par excellence – et à un souci politique : comment améliorer la circulation de l'information de manière...
-
DIDACTIQUE POÉSIE
- Écrit par Bernard CROQUETTE
- 531 mots
Poésie qui dispense un enseignement (philosophique, moral, scientifique, technique, etc.) en le parant des agréments propres à la poésie. Le vers, de par ses vertus mnémoniques, a été utilisé dès les origines pour fixer une leçon (oracles, sentences...) ; aux débuts de la littérature grecque, il...
-
ÉPOPÉE, notion d'
- Écrit par François TRÉMOLIÈRES
- 1 628 mots
-
FABLE
- Écrit par Marc SORIANO
- 3 260 mots
-
PARODIE, art et littérature
- Écrit par Guy BELZANE
- 1 229 mots
Exercice de virtuosité en même temps que démonstration de liberté, condamnée à dépendre de l'original qu'elle détourne, et, comme la satire, prisonnière du contexte et victime du temps, la parodie constitue une approche instructive des œuvres, des styles et des genres qu'elle rabaisse...
-
SATIRE
- Écrit par Roger ZUBER
- 2 693 mots
- 1 média
-
TRAGÉDIE
- Écrit par Bernard DORT , Jacques MOREL et Jean-Pierre VERNANT
- 5 376 mots
- 2 médias
La tragédie naît en Grèce au vie siècle avant J.-C., mais c'est à Athènes, au cours du ve siècle, qu'elle trouve sa forme littéraire achevée. Les œuvres tragiques qui nous sont parvenues et que les Grecs nous ont transmises parce qu'ils les jugeaient dignes d'être conservées (trente-deux...
-
ILIADE, Homère - Fiche de lecture
- Écrit par Jean-François PÉPIN
- 974 mots
- 1 média
Au milieu du viiie siècle avant J.-C., un poète grec venu d'Asie Mineure, Homère, aurait composé en hexamètres dactyliques deux magistrales épopées, l'Iliade et l'Odyssée, mais le mystère entoure encore aujourd'hui ces deux textes : Homère a-t-il réellement existé ? A-t-il...
-
CONFESSIONS, Augustin - Fiche de lecture
- Écrit par Bernard SESÉ
- 944 mots
-
DE L'ORATEUR, Cicéron - Fiche de lecture
- Écrit par François TRÉMOLIÈRES
- 729 mots
-
DIALOGUE DES ORATEURS, Tacite - Fiche de lecture
- Écrit par François TRÉMOLIÈRES
- 763 mots
- Afficher les 29 références
Voir aussi
- COSTUME HISTOIRE DU
- VERSAILLES CHÂTEAU DE
- LITTÉRATURE SOCIOLOGIE DE LA
- HÔTEL PARTICULIER
- ACADÉMIE FRANÇAISE
- FRANÇAISE PEINTURE, XVIIe s.
- FRANÇAIS THÉÂTRE, XVIIe s.
- BAROQUE LITTÉRATURE
- ITALIENNE PEINTURE, XVIIe s.
- ROMAN D'ANALYSE
- CLASSICISME, littérature
- CLASSIQUE ART
- ANCIENS & DES MODERNES QUERELLE DES
- ANGLAISE LITTÉRATURE, des origines au romantisme
- PERSONNAGE, théâtre
- CLASSIQUE THÉORIE DE LA LITTÉRATURE, XVIIe s.
- FRANCE, histoire, du XVIe s. à 1715
- ANGLAISE ARCHITECTURE
- ARCHITECTURE DU XVIIe SIÈCLE
- FRANÇAISE ARCHITECTURE
- PAYS-BAS ARCHITECTURE DES
- ENSEIGNEMENT
- DU FRESNOY CHARLES ALPHONSE (1611-1668)
- IMITATION, poétique
- ACADÉMIE ROYALE DE PEINTURE & DE SCULPTURE
- CLASSIQUE PEINTURE