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EDWARDS BLAKE (1922-2010)

Son grand-père dirigeait des films muets, son père fut metteur en scène de théâtre et directeur de production. C'est donc tout naturellement que William Blake Crump (dit Blake Edwards), né à Tulsa (Oklahoma) le 26 juillet 1922, se tourne vers le spectacle. Il débute à Los Angeles avec des émissions de radio (pour Dick Powell) et des séries T.V., avant de jouer dès 1942 des petits rôles au cinéma. Il écrit également des scénarios, entre autres pour son grand ami Richard Quine, de 1953 à 1962, dont My Sister Eilen (Ma sœur est du tonnerre) ou The Notorious Landlady (L'Inquiétante Dame en noir...). En 1948, il écrit et produit un western de Lesley Selander, Le Justicier de la Sierra (Panhandle), et débute comme réalisateur en 1955 avec deux films au service du chanteur Frankie Lane avant L'Extravagant Mr Cory (1957), plus personnel. Avec Opération jupon (1959), où un sous-marin militaire repeint en rose recueille cinq infirmières-officiers en détresse à la grande joie de Cary Grant et de Tony Curtis, apparaît le fil conducteur de l'œuvre d'Edwards, le burlesque. Dédié à Laurel et Hardy, The Great Race (La Plus Grande Course autour du monde, 1965) indique clairement qu’il se rattache à l'école de Hal Roach et non à celle de Mac Sennett : slowburn et batailles de tartes à la crème comme armes de destruction massive du décor. Ce retour à une tradition négligée, à l'exception de Frank Tashlin et Jerry Lewis, n'avait pas empêché Edwards de séduire avec une comédie sophistiquée qui restera l'image de marque de la plus que distinguée Audrey Hepburn, Breakfast at Tiffany's (Diamants sur canapés, 1961, d'après le roman de Truman Capote).

C'est sa rencontre avec un animal, une musique lancinante et un acteur à multiples facettes, qui va rendre populaire le cinéma de Blake Edwards. L'animal, c'est la Panthère rose conçue par Friz Freleng, la musique est d'Henry Mancini, l'acteur Peter Sellers. L'inspecteur Jacques Clouseau n'est qu'un personnage secondaire de La Panthère rose (1963), mais son succès et son potentiel sont tels qu'Edwards lui donne aussitôt la vedette de A Shot in the Dark (1964, Quand l'inspecteur s'emmêle). Typiquement français, Clouseau est convaincu de son génie alors même qu'il s'enlise dans ses investigations, obsessionnel, arrogant parfois, et capable d'entraîner ses collègues dans des recherches sans commune mesure avec leur objet. Les pas mesurés de la Panthère déteignent sur le rythme du film, comme la plasticité du cartoon du générique sur les corps, faisant des huit aventures de la Panthère rose des living cartoons bien avant Qui veut la peau de Roger Rabbit ? Jusqu'au Fils de la Panthère rose (1993), échappant pratiquement à l'essoufflement, Edwards et Sellers, dans une parfaite connivence, varient à l'infini les situations, par touches parfois infinitésimales.

Cette collaboration ainsi que la veine burlesque d'Edwards trouvent leur apogée avec The Party (La Party, 1968). Le film est constitué par une ascension lente et parfaitement maîtrisée vers l'implosion aquatique du décor artificiel au possible d'une réception hollywoodienne figée. Peter Sellers transcende son personnage de Clouseau en incarnant cette fois Hrundi V. Bashki, figurant d'origine indienne plus malchanceux que maladroit, dénué du moindre sens de l'humour et pratiquant involontairement un comique minimaliste digne du Tati de Playtime (1967). La critique virulente de la haute société, particulièrement d'Hollywood, sera dès lors un élément constant de l'univers du cinéaste.

Darling Lily (1970), tout comme La Party, illustre à loisir la définition que donne Jean Douchet de la mise en scène de Blake Edwards, qui « jette ses héros dans les situations auxquelles ils sont le moins préparés,[...]

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Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux Cahiers du cinéma

Classification

Pour citer cet article

Joël MAGNY. EDWARDS BLAKE (1922-2010) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANDREWS JULIE (1935- )

    • Écrit par Universalis
    • 801 mots

    Actrice anglaise, grande vedette des comédies musicales, née le 1er octobre 1935 à Walton on Thames, dans le Surrey.

    À 10 ans, Julia Elizabeth Wells, dite Julie Andrews, commence à accompagner à la voix son beau-père chanteur (dont elle a pris le patronyme) et sa mère pianiste. Pourvue d'une voix...

  • COMÉDIE AMÉRICAINE, cinéma

    • Écrit par Joël MAGNY
    • 5 126 mots
    • 18 médias
    ...d'Hollywood, 1962) ; The Nutty Professor (Docteur Jerry et Mister Love, 1963)]. C'est également dans cette veine burlesque qu'il faut situer Blake Edwards[Breakfast at Tiffany's (Diamants sur canapé, 1961)] ; la série issue de La Panthère rose (1963), et surtout The Party (1968), avec...
  • LOM HERBERT (1917-2012)

    • Écrit par Universalis
    • 389 mots

    Acteur d'origine tchèque, Herbert Lom eut une longue carrière cinématographique, qui lui permit d'interpréter des personnages très divers. Il reste surtout connu pour son rôle dans la série la Panthère rose de Blake Edwards : il y brosse un portrait comique de Charles Dreyfus, commissaire...

  • MANCINI HENRY (1924-1994)

    • Écrit par Universalis
    • 597 mots

    Compositeur américain prolifique, Henry Mancini bouleversa l'écriture de la musique de film en incorporant des éléments empruntés au jazz dans ses mélodies entraînantes et inoubliables. Il reste surtout connu pour sa collaboration avec le réalisateur Blake Edwards. On lui doit ainsi la...

Voir aussi