AQUACULTURE
Perspectives
Au cours du xxie siècle, l'aquaculture devra incontestablement répondre à de nouveaux défis, en termes de quantités produites et de diversité des espèces élevées. Pour parvenir à les relever, de nombreuses difficultés ou inconnues devront être résolues. En effet, les contraintes ne manquent pas :
– L'aquaculture est demandeuse de sites à terre, sur le littoral et en mer ouverte. Dans des pays comme la France, dans lequel plusieurs filières aquacoles nouvelles ont été imaginées et expérimentées à petite échelle, l'expérience des dernières décennies a montré que l'opinion publique n'est guère favorable au développement de nouveaux élevages, en particulier sur le littoral et en mer, compte tenu des conflits d'intérêts que suscitent ces zones. La compatibilité avec d'autres usages du milieu marin n'est pas toujours possible. À l'échelle mondiale, s'il est vrai que les prévisions trentenaires émises par les experts au début des années 1970 ont été atteintes et même dépassées (on parlait alors d'une production mondiale de 30 Mt en 2000), la disponibilité d'espaces littoraux suffisants et le maintien de la qualité de l'eau sont deux contraintes incontournables.
– En ce qui concerne l'alimentation des élevages, la production de farines de poisson est stable depuis les années 1990, autour de 25 Mt par an. Trouvera-t-on d'autres sources de protéines, végétales notamment ? Parviendra-t-on à améliorer les rendements de transformation pour autoriser un tel développement de l'aquaculture ? Des progrès considérables ont été effectués en ce qui concerne les besoins nutritionnels des alevins de poissons et de crustacés (ration protéique, acides gras essentiels à longue chaîne, glucides). Ils devraient permettre d'abaisser les coûts de production des alevins. En revanche, peu de progrès ont été enregistrés s'agissant de l'alimentation des animaux adultes.
– Les graves crises pathologiques survenues au cours des dernières décennies démontrent la nécessité de progresser et surtout de mettre en place des réglementations qui limitent ce type de risque. En ce qui concerne la santé humaine, des incidents liés à la concurrence commerciale internationale ont certes été enregistrées, sans atteindre heureusement, tant s'en faut, le niveau d'une crise régionale majeure comme celle de l'encéphalopathie spongiforme bovine qui s'est développée au début des années 1990.
Sur le plan socio-économique, l'aquaculture doit poursuivre sa diversification. Celle-ci peut s'exprimer en termes d'espèces, comme en termes de présentation des produits. Vis-à-vis de la pêche, qui exploite 1 300 espèces différentes à l'échelle mondiale, cette évolution est une nécessité. Au moins pour ce qui concerne le marché français, le débat entre des produits aquacoles de haute valeur ou au contraire de bas de gamme ne semble pas se poser, le consommateur manifestant son intérêt pour les deux types de produits qui correspondent à des contextes socio-alimentaires différents, dès lors qu'il peut les identifier.
Tout au moins en France, un effort particulier doit être entrepris en matière de formation aux métiers aquacoles. Il n'est plus question aujourd'hui qu'un biologiste marin ou un ingénieur agronome en fin de formation puisse décider de créer sa ferme aquacole avec quelque chance de succès. Praticiens et décideurs ont peu à peu appris les nouvelles pratiques, bien que les formations pertinentes ne soient pas encore suffisantes.
L'aquaculture est ainsi devenue, au cours de la seconde moitié du xxe siècle, une activité à part entière, à côté de la pêche. Le temps n'est plus, où un directeur de l'Institut scientifique et technique des pêches maritimes français n'hésitait pas à déclarer que[...]
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Écrit par
- Lucien LAUBIER : professeur émérite à l'université de la Méditerranée, Marseille
Classification
Médias
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