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SEGOVIA ANDRÉS (1893-1987)

Un interprète recréateur

Dès ses débuts, Segovia n'avait pas hésité à enrichir de ses propres adaptations le répertoire de transcriptions élaboré par Tárrega. Mais il va au-delà, en incitant des compositeurs de toutes tendances esthétiques à écrire pour lui. Les limites techniques de la guitare s'en trouvent ainsi reculées et l'instrument voit sa palette expressive considérablement élargie. Les Espagnols retrouvent par ce moyen leurs racines séculaires : Federico Moreno Torroba (Hommage à Turina, Sevillana), Joaquín Rodrigo (Tres Piezas españolas, Fantaisie pour un gentilhomme), Joaquín Turina (Fandanguillo), mais aussi le Mexicain Manuel Ponce (Concerto du Sud, Variations sur la Follia, douze préludes, trois sonates...), le Brésilien Heitor Villa-Lobos (Concerto, Douze Études). En France, plusieurs compositeurs écrivent aussi pour Segovia : Albert Roussel (Segovia), Darius Milhaud (Segoviana), André Jolivet (Le Tombeau de Robert de Visée), Alexandre Tansman (Variations sur un thème de Scriabine), Georges Migot (Hommage à Claude Debussy) ; en Italie, Mario Castelnuovo-Tedesco sera l'un des plus féconds (deux concertos, Variations plaisantes sur un petit air populaire...) ; en Suisse, Frank Martin compose à son intention Guitare. Toutes ces pièces figurent aujourd'hui au répertoire de la plupart des guitaristes.

La personnalité d'Andrés Segovia est sortie de l'histoire de l'interprétation musicale pour entrer, d'une façon plus générale, dans l'histoire de la musique, où il est l'un des rares instrumentistes à figurer. Le mouvement de renouveau de la guitare dont il a été l'instigateur n'a aucun égal dans les autres disciplines instrumentales. Pablo Casals ou Maurice André avaient commencé à pratiquer un instrument dont la notoriété traversait une phase de sommeil, alors que la guitare classique était totalement oubliée lorsque Segovia décida de lui consacrer sa vie. Seule subsistait la pratique flamenco, de tradition orale. Il fallait donc tout créer, tout en faisant revivre la maigre littérature qu'avait connue l'instrument à la fin du xviiie et au début du xixe siècle (Fernando Sor, Anton Diabelli, Nicolò Paganini...). Grâce à Segovia, l'instrument de salon, voué par définition à des publics relativement intimes, est devenu le plus universel des moyens d'expression musicale.

— Alain PÂRIS

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Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

Classification

Pour citer cet article

Alain PÂRIS. SEGOVIA ANDRÉS (1893-1987) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Andrés Segovia - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty Images

Andrés Segovia

Autres références

  • GUITARE

    • Écrit par Robert Jean VIDAL
    • 4 010 mots
    • 5 médias
    Si Tárrega rendit à la guitare ses lettres de noblesse, la valeur exceptionnelle d'Andrés Segovia (1893-1987) fut à leur mesure. On doit à cet interprète hors pair d'avoir conféré à la guitare un prestige égal à celui des grands instruments solistes comme le piano, le violon et le violoncelle....

Voir aussi