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PAPIER

Le passage de l'artisanat à l'industrie

Mécanisation de la fabrication du papier

C'est au xixe siècle que le papier acquiert toutes ses lettres de noblesse et que son procédé de fabrication opère sa grande mutation en passant de l'artisanat à l'industrie lourde. La demande en papier s'accroît considérablement tout au long du xviiie siècle et l'utilisation du cylindre hollandais offre de nouvelles perspectives de production. Malheureusement, la technique d'élaboration manuelle du papier, feuille par feuille à la cuve, reste encore un facteur limitant et devient même un véritable verrou. Ce verrou saute à la fin du xviiie siècle, grâce à l'invention (brevet pris en 1799) de la machine à fabriquer le papier « à grande étendue » par le Français Louis-Nicolas Robert (1761-1828). Les principes de la fabrication industrielle à grande échelle sont posés. Le développement et l'utilisation de cette nouvelle technologie tout au long de la première moitié du xixe siècle et les besoins en papier sans cesse croissants obligent les papetiers à envisager d'autres sources de matières fibreuses abondantes et moins onéreuses. L'approvisionnement en chiffons devient rapidement un véritable casse-tête pour les papetiers confrontés à un deuxième verrou. L'idée des Chinois d'utiliser le bois ressurgit alors, d'autant qu'en 1719 Réaumur a également publié un traité sur la guêpe papetière (Polites gallicus L.), qui mentionne que cet insecte utilise des fibres de bois pour construire son nid, dont l'aspect et la constitution sont très proches de ceux du papier.

Mise au point de la pâte mécanique de meule

Le premier usage du bois comme matière première pour l'obtention de pâtes à papier industrielles se situe vers le milieu du xixe siècle. On utilise alors l'action mécanique par râpage pour défibrer le bois. La pâte obtenue par ce procédé est baptisée « pâte mécanique ». Son rendement massique par rapport au bois sec peut atteindre 98 p. 100. Découverte en réalité par un Hollandais vers 1800, mais officiellement par l'Allemand Friedrich Gottlob Keller (1816-1895) vers 1840, elle est obtenue en pressant des rondins de bois sur une meule en rotation. La chaleur dégagée par le frottement du bois sur la meule plastifie la lignine et facilite le défibrage. La pâte obtenue par ce procédé présente une grande hétérogénéité et possède les caractéristiques mécaniques les plus faibles parmi toutes les pâtes utilisées pour la fabrication des papiers. L'usage de cette pâte est aujourd'hui en déclin et ne se justifie que pour la production de carton plat « plein bois » et certains papiers d'édition nécessitant du bouffant.

D'autres variantes de pâtes mécaniques ont été développées depuis :

– La pâte mécanique de raffineur sous pression (thermomechanical pulp), ou pâte TMP, développée à partir de 1930, est obtenue en défibrant des plaquettes de bois dans un défibreur à disques à des températures pouvant atteindre 150 0C. La pâte obtenue est plus homogène, mieux défibrée et contient plus de fibres entières non endommagées. Cette pâte est utilisée pour la fabrication du papier journal et du papier magazine sur les machines à très grande vitesse de production dépassant 1 500 m/min.

– La pâte chimico-thermomécanique (chemi thermomechanical pulp), ou pâte CTMP, est obtenue en utilisant des produits chimiques en quantité limitée, conjointement au défibrage sous pression dans un défibreur à disques. Cette action permet d'obtenir une pâte solide, plus souple et plus facile à blanchir, qui est utilisée préférentiellement pour la fabrication de papiers pour l'impression ou pour usage sanitaire et domestique.

Les papiers à base de pâte mécanique ont de bonnes caractéristiques d'imprimabilité mais une[...]

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Écrit par

  • : ingénieur de l'École française de papeterie et des industries graphiques, président de La Cellulose

Classification

Pour citer cet article

Gérard COSTE. PAPIER [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Machine à papier - crédits : Encyclopædia Universalis France

Machine à papier

Autres références

  • INVENTION DU PAPIER EN CHINE

    • Écrit par Olivier LAVOISY
    • 229 mots

    Il est acquis que le papier est né en Chine, mais la date de cette invention a fait l'objet de nombreux débats. L'histoire du papier débute vraisemblablement au iie siècle avant notre ère, comme l'attestent les récentes découvertes archéologiques de fragments de papier mis au jour depuis...

  • LE PAPIER C'EST LA VIE (exposition)

    • Écrit par Patrice BRET
    • 801 mots

    Loin des rituels commémoratifs habituels, l'expositionLe Papier, c'est la vie, présentée au palais de la Découverte du 9 février au 17 octobre 1999, est originale sur bien des plans. Cette pièce maîtresse d'un ensemble de manifestations coordonnées par la Confédération française de l'industrie...

  • ANGOULÊME

    • Écrit par Yves JEAN
    • 617 mots
    • 3 médias

    Ancienne capitale de l'Angoumois, Angoulême, chef-lieu du département de la Charente, compte 44 704 habitants dans la ville et 180 593 dans l'aire urbaine (recensement de 2012).

    La cité ancienne, sur un éperon au-dessus du fleuve, domine l'agglomération avec ses remparts et la cathédrale...

  • BÂLE

    • Écrit par Bernard DEGEN
    • 1 542 mots
    • 3 médias

    Au contact avec la France et l'Allemagne, Bâle (en allemand Basel) est la porte d'entrée de la Suisse vers l'Europe du Nord. La ville, qui forme avec les communes de Riehen et Bettingen, le canton de Bâle-Ville, le plus petit de Suisse en termes de superficie (37 km2), est également...

  • CALLIGRAPHIE - (repères chronologiques)

    • Écrit par Alain THOTE
    • 388 mots

    Vers  1200 Invention de l'écriture en Chine.

    Vers  1000 Recherches d'ordre esthétique dans les inscriptions sur bronze.

    Fin  ive-début iiie siècle La soie est déjà utilisée comme support d'écriture, comme l'a révélé le Manuscrit de Chu, découvert...

  • CHINE - Histoire jusqu'en 1949

    • Écrit par Jean CHESNEAUX, Jacques GERNET
    • 44 594 mots
    • 50 médias
    La substitution du papier aux lamelles de bambou ou de bois et à la soie, à partir des débuts du iie siècle, aura des conséquences capitales pour l'histoire des traditions écrites en Chine et pour celle de l'administration et de l'État.
  • Afficher les 23 références

Voir aussi