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VACCINATION

On peut définir les vaccins comme des préparations pharmaceutiques à visée le plus souvent préventive, contenant des microorganismes atténués ou tués, ou des fragments de ceux-ci, voire une simple information génétique (cas des nouveaux vaccins à ARNm, ou à vecteurs viraux), qui visent à provoquer une réponse immunitaire protégeant d’une maladie. Les vaccins ne sont pas des médicaments comme les autres. Ils apparaissent dans l’histoire de la médecine à une époque (la fin du xviiie siècle) encore marquée par l’ancienne théorie des « humeurs », sa pharmacopée et ses « régimes de santé ». Ils accompagnent l’industrie naissante des médicaments manufacturés, dont ils sont un des premiers exemples qui rompent avec l’économie apothicaire du médicament « fait maison », alimentent aux xixe et xxe siècles la longue querelle de l’usage des statistiques en médecine, illustrent à merveille la tension entre prévention et cure au sein de la médecine occidentale moderne, posent des problèmes éthiques d’importance aussi bien dans leur processus d’élaboration et de test que dans leur administration. Enfin, et peut-être surtout, ils représentent un cas rarissime, si ce n’est unique, de « médicaments d’État » qu’un gouvernement peut imposer à ses citoyens par la loi et s’invitent régulièrement, pour toutes ces raisons, dans le débat public.

De l’inoculation à la vaccination

Avant la première et authentique « vaccination » contre la variole, on connaissait une technique rudimentaire, nommée « inoculation », pratiquée en Europe depuis les années 1720 et plus anciennement dans le bassin méditerranéen et l’Orient, qui consistait à administrer à un patient sain (généralement dans l’enfance) un peu de pus prélevé dans les pustules d’un malade convalescent de la variole pour protéger l’organisme d’une contamination ultérieure et qui s’apparentait, dans l’ancien schéma médical, à une forme de mithridatisation (recherche d’une accoutumance à un toxique). Ce procédé relativement dangereux a fait l’objet d’une grande controverse au xviiie siècle, notamment en Angleterre et en France où il s’était progressivement répandu. Ses adversaires soulignaient tout à la fois le caractère hasardeux de la méthode, son coût lié au paiement d’un chirurgien spécialisé, son origine orientale, son impiété – la maladie était traditionnellement perçue comme une épreuve ou une punition divine –, parfois même son obscénité (car il faut bien dévoiler son épaule pour laisser approcher la lancette…). Mais, pour les États, de plus en plus soucieux d’hygiène publique, ce remède prophylactique est rapidement apparu comme une panacée contre les menaces épidémiques qui touchaient aussi bien les populations civiles que militaires. C’est pourquoi tant de princes européens – tels les héritiers du trône de France en 1774 – décident de se faire inoculer et s’empressent de « varioliser » les esclaves, les prisonniers, les soldats, les enfants trouvés, les pauvres assistés et autres populations pour lesquelles le consentement ne leur paraissait que facultatif.

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Écrit par

  • : docteure en pharmacie, docteure ès sciences, maître de conférences en immunologie, université de Bourgogne
  • : enseignant-chercheur, maître de conférences en histoire moderne, université de Bourgogne

Classification

Pour citer cet article

Françoise SALVADORI et Laurent-Henri VIGNAUD. VACCINATION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<em>The Cow-pock</em>, J. Gillray - crédits : Library of Congress, British Cartoon Prints Collection

The Cow-pock, J. Gillray

Révolte contre la vaccination antivariolique au Brésil - crédits : IEA São Paulo

Révolte contre la vaccination antivariolique au Brésil

File d’attente devant un centre de vaccination antivariolique à New York - crédits : Bettmann/ Getty Images

File d’attente devant un centre de vaccination antivariolique à New York

Autres références

  • CALENDRIER VACCINAL

    • Écrit par Gabriel GACHELIN
    • 2 597 mots
    • 1 média

    Depuis la « vaccine », élaborée par Edward Jenner en 1796 pour prévenir la variole, on dispose d’une multiplicité croissante de vaccins contre nombre de maladies infectieuses. Chaque vaccin possède ses particularités d’activité et de prescription. Médicaments de prévention contre...

  • ANTHROPOLOGIE DES ZOONOSES

    • Écrit par Frédéric KECK, Christos LYNTERIS
    • 3 954 mots
    • 4 médias
    ...avec les animaux, étudiés par l’ethnozoologie, font partie des modes d’interaction mobilisés dans une crise sanitaire causée par une zoonose. Ainsi la vaccination contre la brucellose en Mongolie implique de connaître les conceptions locales de l’élevage pastoral en fonction des transformations du paysage...
  • BACTÉRIOLOGIE

    • Écrit par Jean-Michel ALONSO, Jacques BEJOT, Michel DESMAZEAUD, Didier LAVERGNE, Daniel MAZIGH
    • 18 329 mots
    • 11 médias
    ...possibilité d'immuniser contre une maladie par l'injection du microbe atténué : des cultures vieillies d'une bactérie entraînent, chez l'animal, une maladie peu grave ; mais cet animal est devenu réfractaire au microbe virulent : il est immunisé. C'est le principe desvaccinations.
  • CANCER - Cancer et santé publique

    • Écrit par Maurice TUBIANA
    • 14 762 mots
    • 8 médias
    ...la lenteur de l'évolution des lésions, il est inutile de le pratiquer plus souvent) et leur traitement permet d'éviter l'apparition de cancer invasif. Des vaccins existent contre les variétés de papillomavirus les plus fréquemment en cause. Cette vaccination peut avoir un rôle préventif important,...
  • CANCER - Cancers et virus

    • Écrit par Sophie ALAIN, François DENIS, Sylvie ROGEZ
    • 5 660 mots
    • 6 médias
    Pour les tumeurs viro-induites, quand le lien est très fort, des vaccins dirigés contre le virus peuvent être efficaces pour combattre la tumeur. On distingue des vaccins prophylactiques et des vaccins curatifs.
  • Afficher les 53 références

Voir aussi