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QU YUAN[K'IU YUAN](IVe-IIIe s. av. J.-C.)

QuYuan est le premier poète chinois dont on connaît le nom ; aussi peut-on le regarder comme fondateur de la poésie chinoise. Sa place dans la littérature chinoise est comparable à celle d'Homère dans l'histoire de la littérature européenne : si son nom est bien connu, les événements de sa vie, son existence même, sont incertains.

Aussi mythique qu'Homère

Une biographie de Qu Yuan dans les Mémoires historiques de Sima Qian, écrites au début du ier siècle avant J.-C., constate qu'il était noble du royaume de Chu, grand pays partiellement sinisé de l'époque des « Royaumes Combattants » dont la capitale était située dans la vallée centrale du fleuve Bleu, et qu'il servait à la cour du roi Huai de Chu (328-299 av. J.-C.). Selon la relation de Sima Quian, il jouit d'abord de l'amitié et de la confiance du roi, mais à la suite des calomnies de courtisans ainsi que de sa franche opposition à la politique extérieure ruineuse de la cour, il se détacha du souverain et finit par être banni. On suppose que son long poème allégorique Li sao est en partie une protestation contre cet éloignement. Pendant son exil, il mena une existence errante parmi les lacs et les fleuves de Chu méridionale, se noyant finalement dans la rivière Milo. Suivant une tradition plus tardive, les fêtes nautiques que l'on organisait dans la Chine du Sud au cinquième mois lunaire et qui se sont poursuivies jusqu'à nos jours furent établies afin d'apaiser son âme offensée.

La véracité de la biographie de Sima Qian est contestée, et il n'a pas manqué de savants tant en Chine qu'en Occident qui ont douté même de l'existence d'un Qu Yuan historique. Toutefois, la tradition selon laquelle c'est un aristocrate de Chu appelé Qu Yuan qui a écrit le Li sao dans son exil, puis s'est suicidé en se précipitant dans une rivière, est attestée dans plusieurs sources anciennes, si bien que la plupart des spécialistes modernes acceptent l'authenticité de la biographie, sous certaines réserves cependant.

Quant à savoir quelles œuvres du Chuci – ouvrage qui collige les poèmes de Qu Yuan et de son école – sont du poète lui-même et quelles autres de ses imitateurs, il y a beaucoup plus d'incertitude. Wang Yi, savant-poète du ier siècle qui compila ce recueil, attribua à Qu Yuan six pièces en sus du Li sao, mais quelques-unes de ces attributions se firent évidemment au jugé, et peu de connaisseurs les accepteraient toutes aujourd'hui.

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Écrit par

  • : professeur à l'université d'Oxford (Royaume-Uni)

Classification

Pour citer cet article

David HAWKES. QU YUAN [K'IU YUAN] (IVe-IIIe s. av. J.-C.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CHINOISE (CIVILISATION) - La littérature

    • Écrit par Paul DEMIÉVILLE, Jean-Pierre DIÉNY, Yves HERVOUET, François JULLIEN, Angel PINO, Isabelle RABUT
    • 47 507 mots
    • 3 médias
    ...l'allégorie qui nous intéresse ici. Le couple du prince et de son ministre y est représenté comme un couple d'amants. Voilà pourquoi les exilés politiques, tel Qu Yuan, le plus illustre de tous, ont si souvent déguisé leur ressentiment sous le voile d'une fiction sentimentale. L'exilé, rejeté par son prince,...
  • CHU CI [TCH'OU TS'EU]

    • Écrit par David HAWKES
    • 1 048 mots
    Wang Yi attribue sept des dix premiers à Qu Yuan (1. Li sao ; 2. Jiu ge ; 3. Tian wen ; 4. Jiu zhang ; 5. Yuan you ; 6. Bu ju ; 7. Yu fu), les deux suivants à Song Yu (8. Jiu bian ; 9. Zhao hun) ; l'auteur du dixième (10. Da zhao) reste incertain.
  • JIA YI [KIA YI] (201-169 av. J.-C.)

    • Écrit par Yves HERVOUET
    • 684 mots

    Le premier des auteurs connus de fuest Jia Yi, dont la biographie nous est retracée dans le Shi ji de Sima Qian, à la suite de celle de son grand modèle, QuYuan. L'historien nous trace les grandes lignes d'une existence qui a été, elle aussi, un archétype. Homme du nord de la Chine, Jia Yi...

Voir aussi