Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

POLITIQUE La science politique

  • Article mis en ligne le
  • Modifié le
  • Écrit par

La détermination de l'objet

Conception relationnelle

La conception relationnelle donne comme objet propre à la science politique la connaissance d'une certaine catégorie de relations humaines, différentes des autres grands rapports sociaux : rapports familiaux, culturels, religieux, professionnels, économiques, etc.

Sans remonter au-delà de l'entre-deux-guerres, la thèse du rapport spécifique se trouve formulée magistralement, mais en termes opposés, par Benedetto Croce et par le juriste patenté du IIIe Reich, Carl Schmitt : pour le premier, le rapport politique est un rapport de conciliation ; pour le second, c'est un rapport d'irréductible antagonisme.

Avec l'effervescence suscitée par l'irruption de la science politique dans l'Université, les thèses relationnelles attirent à elles ceux qui récusent les conceptions dites américaines ou traditionnelles. La notion de rapport politique est mise en lumière par Pierre Duclos dans un livre écrit en captivité (L'Évolution des rapports politiques depuis 1750) et dans une série d'essais et de communications. En quête d'une « politique pure », Bertrand de Jouvenel conçoit celle-ci comme fondée sur une activité agrégative. Julien Freund, dans son livre capital L'Essence du politique, se rattache aussi, avec des considérants originaux, à la notion du rapport spécifique.

Cependant, malgré toutes ces cautions, la conception relationnelle a trouvé crédit seulement auprès d'un nombre restreint de spécialistes.

Quant au fond, il est vain d'espérer définir la politique par l'originalité du rapport social. Il y a partout conciliation et antagonisme, subordination et participation, attirances et tensions ; seule en varie la proportion. Surtout, la notion des rapports n'est pas apte à fournir le noyau consistant et durable qu'exige la construction d'un objet scientifique. Le rapport a son importance, mais on ne peut s'arrêter à lui. Il appelle un point de référence et de fixation. En outre, la notion relationnelle ne débouche sur aucune unité des conceptions qui peuvent être groupées sous son égide. La spécificité du rapport varie au point de se contredire d'un auteur à l'autre. On recense ainsi une suite d'opinions individuelles souvent intelligentes, souvent attachantes, mais qui ne sont pas susceptibles de répondre à la seconde exigence de la définition du politique, qui est, après la détermination de son objet, sa limitation à lui seul.

Conception dynamique

À l'égard de la multiplicité et de l'éparpillement des thèses relationnelles, la conception de la politique comme science du pouvoir a pour elle l'influence et le grand nombre des universités américaines. Elle bénéficie aussi d'un large accueil du milieu européen.

Dans sa contribution à l'enquête de l'U.N.E.S.C.O. sur la science politique contemporaine, le professeur Cook a cette affirmation péremptoire : « La notion de pouvoir est l'objet propre de la science politique. » Toutes ses branches ont un objet commun qui, sous ses divers aspects, est l'étude du pouvoir dans la société. Sa source, sa nature, ses fondements, son utilité, ses objectifs, ses effets moraux, intellectuels et matériels se trouvent envisagés dans leurs formes les plus variées. Sont en cause non seulement l'État, mais encore les groupes locaux, les Églises, les syndicats, les entreprises. Comme le précise un professeur canadien, Watkins, « tout groupement, dès qu'il comporte un pouvoir, relève de la science politique ». Celle-ci établit la notion et les conditions du pouvoir au sein d'une collectivité déterminée ; elle étudie les forces qui le créent, le dirigent et l'utilisent. Bien entendu, elle considère aussi le problème du pouvoir dans le domaine des relations internationales.

Cette conception de la[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : sénateur, recteur honoraire, professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Paris

Classification

Pour citer cet article

Marcel PRÉLOT. POLITIQUE - La science politique [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • 1848 ET L'ART (expositions)

    • Écrit par
    • 1 189 mots

    Deux expositions qui se sont déroulées respectivement à Paris du 24 février au 31 mai 1998 au musée d'Orsay, 1848, La République et l'art vivant, et du 4 février au 30 mars 1998 à l'Assemblée nationale, Les Révolutions de 1848, l'Europe des images ont proposé une...

  • ABRABANEL (1437-1509)

    • Écrit par
    • 912 mots

    Le conflit entre les théories philosophiques universalistes et un attachement plus proprement religieux à la tradition existait depuis plus de deux siècles chez les penseurs juifs. La philosophie sous sa forme averroïste admettait généralement que la vérité philosophique ne différait de la vérité...

  • ABSTENTIONNISME

    • Écrit par
    • 6 313 mots
    • 3 médias
    Une deuxième tradition privilégie l'explication « politique ». Françoise Subileau et Marie-France Toinet soutiennent en ce sens que l'électeur participe d'autant plus volontiers qu'il perçoit l'utilité politique de son vote. L'abstention est également expliquée par des raisons et des raisonnements politiques....
  • ACTION HUMANITAIRE INTERNATIONALE

    • Écrit par et
    • 7 298 mots
    • 1 média
    ...des années 1970, on voit se dessiner dans les grandes démocraties, nettement à travers le discours et de façon plus floue dans la pratique, l'idée d'une politique étrangère au service de l'action humanitaire et des droits de l'homme. Aux États-Unis, Jimmy Carter, dont le sous-secrétaire d'État, Christopher...
  • Afficher les 145 références