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PATRIMOINE INDUSTRIEL (France)

Longtemps les conservateurs du patrimoine ne se sont mobilisés que pour la seule conservation des édifices civils et religieux anciens. Si un bâtiment industriel faisait l'objet d'une protection, c'était en raison de son ancienneté et de ses qualités architecturales propres. C'est seulement dans le dernier quart du xxe siècle, alors qu'un grand nombre de destructions avaient déjà été opérées au nom de la rationalisation industrielle, que des structures ont été créées afin de protéger l'héritage le plus récent mais le plus menacé, celui de la fin du xixe siècle et du début du xxe siècle. Ce type de patrimoine représente aujourd'hui un enjeu culturel pour des raisons tant architecturales que sociales et locales, dans la mesure où ces aménagements ont marqué durablement le territoire français. Une grande part de la problématique de sauvegarde du patrimoine industriel récent se pose en termes de reconversion. A-t-on la possibilité de conserver ces bâtiments en l'état ou en les modifiant ? Quelles affectations peut-on leur attribuer ? Autant de questions qui, suivant l'ouvrage à réhabiliter, ne recevront pas les mêmes réponses.

Notion et réalité

Le patrimoine industriel est le plus souvent assimilé aux usines. Sous leur forme actuelle, celles-ci apparaissent au xixe siècle. Le terme usine, lui, est plus ancien. Il date du début du xviiie siècle et désigne alors les établissements industriels munis de machines. Auparavant, il existait un petit nombre de manufactures de grande taille préfigurant nos usines modernes, mais perpétuant et développant sur une plus grande échelle une activité artisanale. Ces manufactures ont assuré une continuité entre la fabrique traditionnelle et l'industrie du xxe siècle. Le concept de patrimoine industriel a quant à lui été défini dans les années 1970, à la suite de la prise de conscience de sa précarité par des architectes, des historiens, des économistes et des associations locales de défense. Il concerne les biens immobiliers (bâtiments, sites aménagés et paysages), les installations (machines et outillages), ainsi que l'ensemble des produits issus de l'industrie. Cela illustre le fait que le patrimoine industriel puisse être dissocié d'une architecture remarquable. C'est le cas de la manufacture de soierie Tassinari et Chatel fondée à Lyon au xviie siècle, qui peut poursuivre ses activités grâce à un riche patrimoine d'archives, en se spécialisant dans la rénovation du patrimoine national sur métiers Jacquard anciens. Un exemple voisin est fourni par la manufacture de papiers peints Zuber à Rixheim (Alsace), qui possède un fonds patrimonial constitué de 100 000 planches de bois originales gravées au xixe siècle et classé au titre des Monuments historiques.

Cependant le patrimoine industriel reste étroitement lié à la notion d'architecture. Si la part antérieure au xixe siècle a fait l'objet de classements au titre des Monuments historiques depuis plusieurs décennies, c'est seulement à partir de la fin des années 1970 qu'un intérêt a commencé de s'exprimer pour la production la plus récente, probablement en raison de sa moindre valeur artistique. Le public manifeste désormais un engouement pour cette architecture singulière porteuse d'une histoire et d'une mémoire sociale forte. C'est en 1979, au Creusot (Saône-et-Loire), que les pionniers de l'archéologie industrielle en France créent le C.I.L.A.C. (Comité d'information et de liaison pour l'archéologie, l'étude et la mise en valeur du patrimoine industriel). Parallèlement, la direction de l'architecture et du patrimoine du ministère de la Culture entreprend, dans les années 1980, l'identification des monuments emblématiques du xxe siècle dans une double perspective de conservation et[...]

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Écrit par

  • : professeur associé à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense
  • : élève architecte à l'École nationale supérieure d'architecture de Versailles

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Médias

Pavillon central du Familistère de Guise (Aisne)
 - crédits : Françoise Weyl

Pavillon central du Familistère de Guise (Aisne)

Cour intérieure du pavillon central du Familistère de Guise (Aisne)
 - crédits : Françoise Weyl

Cour intérieure du pavillon central du Familistère de Guise (Aisne)