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MUSICALES (TRADITIONS) Musique de l'Inde

Notions théoriques

Les seules notions retenues ici sont celles dont la connaissance a paru indispensable à une approche de la musique indienne telle qu'elle est pratiquée à l'époque moderne.

L'échelle musicale

En prenant pour point de départ un degré tonique désigné par la syllabe sa, les théoriciens de la musique indienne ont procédé à un certain découpage de l'espace sonore : au sein de l'intervalle d'octave, divisé en vingt-deux intervalles audibles (śruti), ils ont défini la position de sept degrés (svara) séparés les uns des autres par deux, trois ou quatre śruti et désignés par les noms suivants : saḍja (père des six autres sa), ṛṣabha (ri), gandhara (ga), madhyama (celui du milieu, ma), pacama (le 5e, pa), dhaivata (dha), niṣada (ni).

Si on laisse de côté les spéculations relatives à la nature exacte des intervalles qui séparaient jadis les différents svara, on peut s'en tenir à l'équivalence admise aujourd'hui entre la succession sa ri ga ma pa dha ni sa et la gamme diatonique majeure, en gardant présent à l'esprit le fait que l'Inde est restée étrangère au tempérament égal pratiqué en Occident depuis le xviiie siècle.

Parmi ces sept svara, le sa et le pa ne sont susceptibles d'aucune modification ; les cinq autres svara peuvent être soit naturels, soit altérés : ri, ga, dha, ni peuvent être en quelque sorte « bémolisés » (on les dit alors komal), tandis que ma peut être « diésé » (on le dit alors tivra).

Structure modale : les « rāga »

L'exploitation des ressources fournies par l'emploi des différents intervalles musicaux possibles a donné naissance à des modes musicaux dont on a précisé la structure en fonction de divers critères : la succession des degrés employés en mouvement ascendant ou descendant, le choix des notes initiales et finales, le choix des degrés préférentiels (vādi et samvādi), les degrés omis, la présence de mélismes ou de motifs mélodiques déterminés, enfin l'utilisation systématique d'ornements (alaṃkāra).

Dès le viiie siècle, le terme de rāga, littéralement « coloration », a servi à désigner ces modes musicaux dont la raison d'être était d'imprégner l'esprit du musicien et de ses auditeurs d'une des huit émotions fondamentales (rāsa) définies par la poésie sanskrite. Conventionnellement, les différents rāga ont fait l'objet, au cours des siècles, de classifications multiples : selon les étapes de l'action théâtrale qu'ils accompagnaient ; selon une filiation supposée mais mal justifiée entre rāga-pères, rāginī-mères et rāga-putra-fils ; selon les heures du jour ou les saisons auxquelles on devait les jouer ; selon le nombre de degrés qu'ils utilisaient (on distinguait alors des rāga heptatoniques, hexatoniques, pentatoniques, etc.).

Le passé a vu naître une infinité de rāga, les uns n'ont connu qu'une vogue éphémère, d'autres ont traversé les siècles, transmis par les maîtres ; pour certains, seul demeure un nom immortalisé par les poètes ou les peintres de rāgamala.

That du pandit Bhatkhande - crédits : Encyclopædia Universalis France

That du pandit Bhatkhande

Les musiciens d'aujourd'hui, sans négliger les habitudes mentales de leurs devanciers, ont tendance à classer les rāga en fonction des échelles mélodiques de base ( thāt) dont les différents degrés sont utilisés au cours du développement de chaque rāga. La systématisation proposée par le pandit Bhatkhande, à partir de dix échelles de base, permet d'englober la majorité des rāga en usage ; elle est résumée dans le tableau, où le sa tonique est supposé correspondre au do3.

Structure rythmique : les « tāla »

La théorie rythmique indienne a été fortement influencée par les subtilités de la métrique du vers sanskrit, un vers quantitatif, marqué par la succession des syllabes longues et brèves ; les principes sur lesquels[...]

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Écrit par

  • : directeur de recherche au C.N.R.S., chargée de mission au musée des Arts asiatiques-Guimet

Classification

Pour citer cet article

Mireille HELFFER. MUSICALES (TRADITIONS) - Musique de l'Inde [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

That du pandit Bhatkhande - crédits : Encyclopædia Universalis France

That du pandit Bhatkhande

Tala - crédits : Encyclopædia Universalis France

Tala

Autres références

  • ALCHIMIE

    • Écrit par René ALLEAU, Universalis
    • 13 642 mots
    • 2 médias
    Les rapports entre la métallurgie et la musique sont mentionnés déjà par Strabon, par Solin et par Plutarque. Selon Aristide Quintilien, la musique désigne, en général, « ce qui régit et coordonne tout ce que la nature enferme dans son sein ». Ptolémée, dans ses Harmoniques, assimile les...
  • BACHIR MOUNIR (1930-1997)

    • Écrit par Éliane AZOULAY
    • 515 mots

    Irakien né à Mossoul d'une mère kurde et d'un père syriaque orthodoxe, Mounir (ou Munir) Bachir a été surnommé l'« émir du oud ». Au côté de son père, Abdel-Aziz Bachir, luthiste et chanteur réputé, il se familiarise avec les diverses facettes de la tradition irakienne, où se mêlent influences syriaques,...

  • BEBEY FRANCIS (1929-2001)

    • Écrit par Universalis
    • 242 mots

    Auteur-compositeur, écrivain, poète, chanteur et guitariste camerounais. En 1950, il vient étudier à Paris et joue avec son compatriote Manu Dibango. Il étudie ensuite le journalisme aux États-Unis puis regagne la France, où il entre comme reporter à la Sorafom (Société de radiodiffusion de la France...

  • BERIO LUCIANO (1925-2003)

    • Écrit par Juliette GARRIGUES
    • 4 826 mots
    ...extra-européennes. Il s'est en fait intéressé aux expressions et aux techniques populaires qui lui ont permis d'embrasser des mondes apparemment hétérogènes : les folklores sicilien et serbo-croate, les chants arméniens, les polyphonies pygmées... À l'instar de Bartók ou de Stravinski, Berio a réussi à intégrer...
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Voir aussi