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ANTONIONI MICHELANGELO (1912-2007)

Une œuvre aux multiples facettes

Comme plusieurs grands cinéastes, Antonioni, au moment de son décès, a fait l'objet d'études et d'hommages divers. Les appréciations de son œuvre relèvent évidemment de la liberté critique, mais peut-être, objectivement, sont-elles trop influencées par la renommée : il est courant d'entendre dire que l'œuvre d'Antonioni ne commence vraiment qu'avec L'Avventura. Ce qui est exact, c'est que ce fut là le début de sa célébrité internationale. On a aussi tendance à montrer une certaine unanimité : c'est oublier que le cinéaste eut bien de la peine à réaliser les films qu'il désirait, que l'Avventura fut hué à Cannes, que des cinéastes éminents comme François Truffaut ou Orson Welles n'ont jamais caché leurs plus sévères réserves sur son œuvre. On peut rappeler sa période de formation, ses documentaires, comme Gente del Po, par exemple : mais il faut mentionner que ce film a été considéré, au même titre que l'Ossessionede Visconti, comme une œuvre fondatrice de l'école néo-réaliste. Là encore il est important de rappeler sa période de formation. Antonioni a fait partie de ce groupe de jeunes gens fous de cinéma, influencés par le Parti communiste italien (clandestin), qui se regroupaient autour de la revue Cinema dirigée par Vittorio Mussolini – ce dernier étant à la fois fasciné par leur potentiel de création, et désireux comme eux de faire un cinéma italien qui tienne tête aux autres productions nationales. C'est de ce groupe (où figuraient notamment Visconti, De Santis ...) que naîtra le néo-réalisme. Le jeune Antonioni ne fut pas uniquement influencé par ses collègues, il collabora aussi au scénario du film fasciste de Rossellini, Un pilota ritorna. Car bien des cinéastes italiens de cette époque ont vécu leurs années d'apprentissage sous le régime mussolinien... Ce fut le cas pour Fellini ou pour Risi, il serait vain de le leur reprocher aujourd'hui.

Ainsi, l'examen de l'œuvre d'Antonioni, avec ses multiples facettes, ne peut se borner à la partie la plus importante, celle des longs-métrages de fiction. Il y a sa vision documentariste (ses débuts, mais aussi son film sur la Chine), ses travaux « alimentaires » (ce film de commande sur Soraya en 1965, Le Bout d'essai, épisode du film collectif Les Trois Visages), ou ses tâches de réalisateur de seconde équipe pour Lattuada ou Brignone. Il y a ses apparitions dans de longs interviews télévisés – qui nous le montrent plein d'humour (comme dans le film de 1966 de Gianfranco Mingozzi, Michelangelo Antonioni, storia di un autore). Il y a ses tableaux, ses quelques rares livres. Antonioni, dans sa complexité, dans son œuvre comme dans les rapports parfois épineux qu'il entretint avec la société qui l'entourait, reste l'un des grands inventeurs de forme du xxe siècle.

— Paul Louis THIRARD

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Pour citer cet article

Paul Louis THIRARD. ANTONIONI MICHELANGELO (1912-2007) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Lucia Bosè dans <em>La Dame sans camélia</em> - crédits : Mondadori/ Getty Images

Lucia Bosè dans La Dame sans camélia

Monica Vitti - crédits : 20th Century-Fox Productions/ The Ronald Grant Archive/ Photononstop

Monica Vitti

Autres références

  • L'AVVENTURA, film de Michelangelo Antonioni

    • Écrit par Jacques AUMONT
    • 982 mots

    Malgré l'injustice d'une telle formule, on pourrait dire que L'Avventura est le véritable premier film d'Antonioni, en tout cas celui dont le style et le ton nous semblent toujours le mieux « coller » à l'image de ce cinéaste à l'élégance aristocratique. La production pourtant en fut...

  • L'AVVENTURA (M. Antonioni), en bref

    • Écrit par Joël MAGNY
    • 315 mots
    • 1 média

    Présenté au festival de Cannes en 1960, L'Avventura de Michelangelo Antonioni (1912-2007) a déclenché une des rares « batailles d'Hernani » du cinéma. Le public, dérouté, accueillit le film avec cris et sifflets, tandis que la majorité de la critique prenait son parti. Un film dont la narration...

  • PAR-DELÀ LES NUAGES (M. Antonioni)

    • Écrit par Jean A. GILI
    • 1 398 mots

    La présentation de Par-delà les nuages, à la biennale de Venise en septembre 1995, prit les allures d'un événement national. Le président de la République italienne en personne se déplaça pour assister à la projection du film, tant il y avait quelque chose de miraculeux dans ce retour, après treize...

  • BOSÈ LUCIA (1931-2020)

    • Écrit par René MARX
    • 623 mots
    • 1 média

    Issue d’une famille pauvre de fermiers de Lombardie, Lucia Bosè est née Lucia Borloni le 28 janvier 1931 à Milan. En 1946, Luchino Visconti, entrant dans la célèbre pâtisserie Galli de la via Victor Hugo à Milan, est frappé par la beauté extraordinaire d’une vendeuse anonyme. Comme celle d’Alain...

  • CINÉMA (Aspects généraux) - Histoire

    • Écrit par Marc CERISUELO, Jean COLLET, Claude-Jean PHILIPPE
    • 21 694 mots
    • 41 médias
    En marge du néo-réalisme, Antonioni a commencé en 1950 une carrière d'auteur maudit. Cet ancien assistant de Carné, architecte passionné du cinéma, compose ses plans avec une nostalgie évidente de l'équilibre plastique, de l'harmonie des masses, de l'immobilité. Chaque geste, chaque ...
  • GUERRA ANTONIO, dit TONINO (1920-2012)

    • Écrit par Christian VIVIANI
    • 692 mots
    • 1 média

    Écrivain et scénariste italien, Antonio Guerra est né à Sant'Arcangelo di Romagna le 16 mars 1920. Après avoir écrit plusieurs poèmes et romans, souvent en dialecte romagnol, il vient au cinéma en 1957 avec le scénario de Hommes et loups (Uomini e lupi), de Giuseppe De Santis, qu'il...

  • ITALIE - Le cinéma

    • Écrit par Jean A. GILI
    • 7 683 mots
    • 4 médias
    ...nouveaux. Pourtant, c'est à cette époque qu'apparaissent les deux cinéastes qui, après la génération néo-réaliste, domineront l'histoire du cinéma italien, Michelangelo Antonioni et Federico Fellini. Le premier commence à tourner en 1950 avec Cronaca di un amore (Chronique d'un amour), le second en 1951...
  • Afficher les 7 références

Voir aussi