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MERCANTILISME

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Le bilan du mercantilisme

Au milieu du xviiie siècle, des économistes libéraux comme David Hume et François Quesnay entreprirent de stigmatiser ceux qu'ils appelaient des partisans de la « balance du commerce », avant que Smith ne réfute point par point dans La Richesse des nations en 1776 ce qu'il appela le « système mercantile ». John Ramsey McCulloch en Angleterre et, plus généralement, tous les économistes qualifiés de « classiques » reprirent à leur compte cette condamnation.

Pour combler leur retard, des pays européens comme la Russie et l'Allemagne au xviiie siècle avaient néanmoins adopté des politiques économiques préconisées par le mercantilisme. Pierre Ier le Grand et Frédéric II de Prusse ont ainsi entrepris, au nom de la modernité, de fortifier leurs administrations, de contrôler et d'encourager leur industrie, d'unifier leur pays. On peut de même déceler, dans les politiques de développement de certains pays asiatiques au xxe siècle, comme la Corée du Sud et le Japon, des éléments du credo mercantiliste : primat de l'industrie sur l'agriculture, de la modernité sur la tradition ; encouragement des exportations de produits manufacturés, découragement des importations de biens de consommation ; constitution de monopoles industriels et commerciaux favorisés par l'État en vue de la conquête des marchés internationaux.

La justification du mercantilisme en tant que doctrine économique, et pas seulement comme pratique politique, fut entreprise par des économistes comme Friedrich List au milieu du xixe siècle. Ces auteurs préconisaient, du moins pour leur nation et au moins pour un temps limité, un État fort et une politique protectionniste. D'une façon plus générale, les adversaires de la pensée économique libérale ont eu tendance à défendre le mercantilisme : Karl Marx loua sa perspicacité, John Maynard Keynes lui attribua des analyses étonnamment modernes.

Les historiens de la pensée économique ont entrepris depuis la fin du xixe siècle, sinon de réhabiliter le mercantilisme, au moins de l'envisager relativement à son contexte historique. Mais ils hésitent, aujourd'hui encore, sur sa véritable nature : simple méthode de gouvernement relative à des circonstances particulières, ou théorie économique d'une portée plus générale ? Doctrine cohérente de la nation et de l'État, ou illusion rétrospective inventée pour mieux discréditer ces deux notions ?

— François ETNER

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Écrit par

  • : professeur de sciences économiques à l'université de Paris-IX-Dauphine

Classification

Pour citer cet article

François ETNER. MERCANTILISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • AGRICOLE RÉVOLUTION

    • Écrit par et
    • 8 076 mots
    ...développements que lui consacre le lieutenant de police de La Mare, dans son grand traité du début du xviie siècle. La politique systématique poursuivie par les mercantilistes industrialistes ou commercialistes de la trempe de Colbert tendait à peser sur le cours des grains ; les rémunérations dans les manufactures...
  • COLONISATION

    • Écrit par
    • 7 700 mots
    • 7 médias
    Quoi qu'il en soit, ces pratiques coloniales sont alorsliées au principe du mercantilisme qui veut que la puissance d'une nation se mesure à la quantité de monnaie qu'elle détient. Ce système s'est établi progressivement, mais chaque État cherche à s'assurer le monopole du commerce colonial à son profit...
  • COLBERT JEAN-BAPTISTE (1619-1683)

    • Écrit par
    • 946 mots
    • 1 média

    Une légende tenace faisait de Colbert le fils d'un marchand drapier de Reims. Les historiens ont eu raison de ce mythe en montrant que le grand ministre était issu d'une dynastie de grands marchands internationaux, banquiers et financiers. Laboureurs à la fin de la guerre de Cent Ans, entre Reims...

  • COLBERTISME

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    Colbert, le plus grand des « grands commis » de la royauté française, a donné son nom à un système économique original qui, selon le mot de Blanqui dans son Histoire de l'économie politique (1837), était « complet et conséquent, dans toutes ses parties ». Pourtant, tous les historiens...

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