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MANDÉISME

Problème des origines et rapports avec le christianisme

Le véritable problème posé par le mandéisme est celui de ses origines. Est-il né en Mésopotamie ou en Palestine ? Bien que l'ensemble de ses écrits n'ait été constitué qu'après la naissance de l'islam, c'est-à-dire au viiie siècle, la secte apparaît comme beaucoup plus ancienne. Elle est attestée avec sûreté dès le ive siècle et assez probablement aux environs de l'an 200. Cela semble prouvé par les textes, du moins par leurs parties les plus primitives et aussi par le fait que le manichéisme est né au sein d'une secte baptiste, qui est presque certainement le mandéisme.

Mais peut-on remonter plus haut dans le temps et, surtout, envisager que le mandéisme est né en Palestine plutôt qu'en Babylonie ? Plusieurs faits semblent l'indiquer. Tout d'abord, l'écriture mandéenne est très proche du nabatéen, c'est-à-dire de l'écriture des nomades de la vallée du Jourdain. D'autre part, le vocabulaire contient un grand nombre de mots araméens d'origine « occidentale », c'est-à-dire palestinienne. Surtout, les doctrines de la secte comportent un grand nombre d'éléments qui semblent inséparables de l'histoire du peuple juif et du sol palestinien. C'est le cas, en particulier, pour l'importance donnée au Jourdain, considéré comme le fleuve du salut, et à la ville de Jérusalem, envisagée comme le centre de la révélation et du combat entre la lumière et les ténèbres. Si l'on ajoute à cela le fait que les mandéens se donnent le nom de « nazaréens », on peut conclure qu'on se trouve dans une ambiance juive et palestinienne.

Faut-il aller jusqu'à admettre que les mandéens sont les disciples attardés, mais fidèles de Jean-Baptiste ? Le problème est difficile, parce que les textes qui mettent le plus en relief la personne de Jean-Baptiste semblent compter parmi les plus récents. Aussi plusieurs auteurs pensent-ils que les mandéens ne se sont couverts de l'autorité du Baptiste qu'à l'époque où ils ont dû constituer un corpus spécifique afin d'apparaître aux yeux des musulmans comme des hommes du Livre. Cette interprétation est possible, mais on imagine difficilement qu'ils aient réalisé cette opération sans que rien dans leur doctrine antérieure n'ait pu servir de base à de tels développements. Il est indiscutable que, dès l'origine, le mandéisme ait été étroitement lié à la personne de Jean-Baptiste.

Peut-on aller plus loin encore et considérer que le mandéisme a eu quelque influence sur les origines chrétiennes ? Deux tendances se sont fait jour à se sujet. Les uns, en particulier Rudolf Bultmann, ont souligné les parallèles entre les textes mandéens et les Évangiles, spécialement celui de saint Jean. D'autres, au contraire, ont soutenu que c'était plutôt le christianisme syriaque qui avait influé sur la secte mandéenne, notamment pour le rituel du baptême. Il faut convenir que le mandéisme, pas plus qu'aucune autre forme religieuse, ne pouvait rester indemne de toute contamination. Mais il serait étrange qu'un mouvement si violemment opposé au christianisme ait pu lui emprunter des doctrines fondamentales ou des rites essentiels. C'est plutôt le christianisme qui a pu être influencé par le mandéisme, non pas sous la forme que celui-ci a prise à partir du viiie siècle, au moment de la compilation de ses textes sacrés, mais sous la forme que le mandéisme pouvait avoir à ses origines, au moment où il constituait l'une des nombreuses sectes baptistes qui florissaient sur les bords du Jourdain. Le christianisme lui-même était une de ces sectes et ses liens profonds avec la secte de Jean-Baptiste l'ont conduit à incorporer ce personnage dans son système doctrinal au titre de « précurseur » de celui qui[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'Université libre de Bruxelles

Classification

Pour citer cet article

Jean HADOT. MANDÉISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ISLAM (La religion musulmane) - Les fondements

    • Écrit par Jacques JOMIER
    • 12 637 mots
    • 1 média
    ...que Jean-Baptiste (Yaḥyā). La forme arabe de ces deux derniers noms fait difficulté ; elle ne se retrouve telle quelle que dans les livres sacrés des Mandéens (secte gnostique baptiste très ancienne dont quelques milliers d'adeptes vivent encore dans les marais près de la ville d'al-Wāsiṭ, en Iraq),...
  • NAZARÉENS, religion

    • Écrit par André PAUL
    • 393 mots

    Les auteurs du Nouveau Testament appellent Jésus soit le « Nazôréen » (nazôraios ; cf. Matth., ii, 23 : « On l'appellera Nazôréen »), soit le « Nazaréen » (nazarênos) : ces deux formes ont la même signification et sont dérivées de Nazareth, le village...

Voir aussi