LEPCIS ou LEPTIS MAGNA, Libye
Lepcis (Leptis), dite Magna « grande » (Lebda, Libye), pour la distinguer de Lepti Minus (Lemta, Tunisie), est un site archéologique majeur de la côte libyenne, mais aussi de toute la Méditerranée ; elle est la plus orientale des villes qui, avec Sabratha et Oea (Tripoli), composaient la Tripolitaine antique. Située dans une position centrale au fond du golfe des Syrtes avec un port à l'embouchure de l'oued Lebda, et au bord de la grande route Carthage-Alexandrie, elle desservait l'hinterland saharien tout en fondant sa prospérité sur la culture de l'olivier.
Sa longue histoire va de la création d'un emporion (comptoir) aux vie et ve siècles avant notre ère dans la mouvance de Carthage jusqu'à la conquête arabe (643) : les principales étapes sont la croissance à l'époque hellénistique, l'annexion au royaume numide à la suite de la deuxième guerre punique, l'implication de la cité restée autonome dans les guerres civiles romaines du ier siècle avant notre ère. Sous l'Empire, elle garde longtemps sa personnalité punique et ses dieux traditionnels Milk'ashtart et Shadrapa (interprétés en Hercule et Bacchus) ; elle fait partie de la province romaine d'Afrique proconsulaire et obtient le rang de colonie en 109 sous Trajan. Son développement précoce, dès l'époque pré-augustéenne, est confirmé sous les Julio-Claudiens comme en témoignent de nombreux monuments, et surtout son extraordinaire expansion au début du iiie siècle reflète la faveur de la dynastie de l'empereur Septime Sévère qui était originaire de la ville. Au début du ive siècle elle devient la capitale de la nouvelle province de Tripolitaine ; au Bas-Empire elle souffre d'attaques de tribus nomades ; la ville byzantine du vie siècle est réduite à une vingtaine d'hectares (le site impérial avait couvert 425 ha dont 280 étaient bâtis), et surtout l'ensablement affecte port et ville qui végètent jusqu'au xviie siècle (le site est alors exploité pour ses matériaux : des colonnes se trouvent à l'église Saint-Germain-des-Prés à Paris). L'exploration archéologique commence, à l'initiative de l'Italie, au xxe siècle.
Le site est remarquable pour son urbanisme régulier, en plusieurs extensions, de grande ampleur avec des insulae (îlots) oblongues, où le decumanus maximus (voie principale est-ouest), scandé d'arcs honorifiques comme le tétrapyle des Sévères et de portes monumentales, reprend la route côtière, et où le iiie siècle insère une grande avenue à colonnade longeant l'oued. Il l'est aussi pour ses monuments publics (les maisons ne sont pas encore fouillées) : temples, théâtre, amphithéâtre, cirque, thermes. Mieux qu'ailleurs, grâce aux abondantes inscriptions souvent bilingues, on y voit les notables d'origine punique offrir ce riche équipement (Annobal Tapapius Rufus paie le marché en 8 av. J.-C. et le théâtre en 1-2, par exemple) où se reflète bien la culture artistique de l'Empire, depuis la tradition romaine jusqu'au iiie siècle fortement influencé par l'art de l'Asie Mineure.
Les principaux monuments du centre se regroupent en plusieurs ensembles impressionnants.
En bord de mer, autour de la place de l'ancien forum d'implantation pré-romaine et de ses portiques, sont distribués les bâtiments officiels des ier et iie siècles (basilique civile, curie), les temples (Liber Pater, Rome et Auguste, Magna Mater), et par la suite la basilique paléochrétienne ménagée à l'époque byzantine dans un temple de Trajan.
Un deuxième ensemble plus à l'intérieur, à l'ouest du cardo (voie nord-sud) et des arcs de Tibère et de Trajan, regroupe le marché avec ses deux pavillons octogonaux et ses boutiques, et le théâtre du début de notre ère, qui allie les installations scéniques, le sanctuaire de[...]
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Écrit par
- Roger HANOUNE : maître de conférences (archéologie romaine) à l'université de Lille-III-Charles-de-Gaulle
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