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FERRY JULES (1832-1893)

Le père de l'école laïque

Libre-penseur et franc-maçon, il a été initié en grande pompe, le 8 juillet 1875, dans la loge La Clémente Amitié, la plus mondaine du Grand Orient de France, et a épousé, la même année, la protestante Eugénie Risler. Néanmoins, il ne conçoit pas sa politique scolaire comme un combat anticlérical, à la différence de Paul Bert, qui lui succédera au ministère. L'article 7 de son projet de loi déposé le 15 mars 1879, interdisant aux membres des congrégations religieuses non autorisées d'enseigner, provoque un tollé parmi les congrégations (notamment les Jésuites), ainsi que dans l'Église et dans l'opposition conservatrice. Voté par une majorité de députés, cet article est rejeté par le Sénat, l'ancien président du Conseil Jules Simon ayant refusé, au nom de la liberté religieuse, de le valider. Le président du Conseil, Charles de Freycinet, est alors contraint de contourner cette fronde parlementaire en promulguant deux décrets, le 29 mars 1880, le premier procédant à la dispersion de l'ordre des Jésuites et le second invitant les autres congrégations non autorisées à se mettre en règle dans un délai de trois mois. Devenu président du Conseil le 23 septembre 1880 et conservant pour lui le portefeuille de l'Instruction publique, Jules Ferry fait promulguer d'autres lois majeures, notamment celle du 21 décembre 1880 sur l'enseignement secondaire des jeunes filles, celle du 29 juillet 1881 sur la laïcisation des cimetières, ainsi que les grandes lois libérales sur les réunions (30 juin 1881) et sur la presse (29 juillet 1881).

Mais son grand projet d'un service public d'enseignement primaire gratuit, obligatoire et laïque, qui avait été déposé en janvier 1880, rencontre l'opposition farouche du Sénat. La loi instaurant la gratuité est promulguée le 16 juin 1881, mais l'obligation et la laïcité posent problème. Il faudra attendre le renouvellement triennal de la Chambre haute en janvier 1882, et le retour de Ferry au ministère de l'Instruction publique dans le second cabinet Freycinet (31 janv.-29 juill. 1882), pour qu'une majorité de sénateurs adoptent, le 23 mars 1882, en seconde lecture, par 170 voix contre 105, le projet définitif.

Dans une circulaire envoyée aux instituteurs, le 17 novembre 1883, il explique que sa volonté a été de « séparer l'école de l'Église, d'assurer la liberté de conscience et des maîtres et des élèves », de distinguer le « domaine des croyances, qui sont personnelles, libres et variables, et celui des connaissances, qui sont communes et indispensables à tous », mais aussi et surtout de fonder une éducation nationale « sur les notions du devoir et du droit que le législateur n'hésite pas à inscrire au nombre des premières vérités que nul ne peut ignorer ». Plus qu'une école sans Dieu, c'est l'école de la République qu'a voulu fonder Jules Ferry.

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Classification

Pour citer cet article

Jean GARRIGUES. FERRY JULES (1832-1893) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Jules Ferry - crédits : Assemblée nationale - 2019

Jules Ferry

Autres références

  • COLONIALISME & ANTICOLONIALISME

    • Écrit par Jean BRUHAT
    • 6 503 mots
    • 2 médias
    – Il y a une « philosophie » de la colonisation qui comporte, plus ou moins nettement affirmé, un aspect raciste.Pour Jules Ferry, « les races supérieures ont un droit vis-à-vis des races inférieures », un droit qui est un devoir, car « elles ont le devoir de civiliser les races inférieures...
  • FRANÇAIS EMPIRE COLONIAL

    • Écrit par Jean BRUHAT
    • 16 688 mots
    • 19 médias
    ...Impérialisme du drapeau et « impérialisme des intérêts » sont convergents, même si, à certains moments, le premier semble l'emporter sur le second. Si Jules Ferry apparaît d'abord comme le « politique » de l'expansion, il s'en fera le « théoricien » en 1885, tandis que la deuxième édition du livre de...
  • GÉNÉRALISATION DE L'INSTRUCTION

    • Écrit par Claude LELIÈVRE
    • 921 mots

    La généralisation de l'instruction, en France comme ailleurs, a été promue pour des raisons différentes, voire concurrentes, à partir du xviiie siècle. Et la nature de cette instruction à généraliser est l'objet d'un débat récurrent.

    S'agit-il avant tout de la participation...

  • INDOCHINE FRANÇAISE

    • Écrit par Agathe LECOEUR
    • 696 mots

    L’Indochine française est le nom donné, de 1887 à 1954, à l’ensemble des colonies et protectorats français de la péninsule indochinoise, située dans le sud-est de l’Asie.

  • Afficher les 7 références

Voir aussi