MINISTÈRE

Du point de vue politique, le « ministère » se confond avec l'ensemble des ministres qui, sous la double autorité du président de la République et du Premier ministre, exercent collégialement et solidairement les attributions gouvernementales. Sous cet angle, chaque ministre constitue une autorité politique. Du point de vue administratif, le ministère est la structure fondamentale d'encadrement et de répartition des services publics, au niveau de l'administration centrale. Chaque ministre se trouve placé à la tête d'un département ministériel et constitue donc aussi une autorité administrative.

La répartition des tâches administratives de l'État entre les différents ministères obéit au principe de la différenciation ministérielle, conçue d'abord comme une spécialisation géographique sous l'Ancien Régime, puis, depuis la Révolution, comme un découpage fonctionnel, c'est-à-dire par matières. Il en résulte que chaque département ministériel est spécialisé quant à son objet et que le nombre des ministères n'étant limité ni par une règle constitutionnelle ni par une règle légale, on assiste depuis le xixe siècle à un développement important de cette différenciation, au fur et à mesure qu'apparaissent des objets nouveaux. La prolifération des services publics due à l'extension des interventions de l'État soit dans des secteurs qui lui étaient traditionnellement étrangers par nature, comme le travail ou la santé, soit dans des matières nouvelles, comme la recherche, ou la coopération, entraîne la création de ministères nouveaux. Le démembrement de certains ministères, comme celui de l'Intérieur, contribue à renforcer ce mouvement, marqué aussi par les circonstances politiques, quand il s'agit de réaliser des dosages propres à satisfaire les partis ayant contribué au succès de la tendance au pouvoir, ou quand une question revêt une telle importance dans l'opinion publique qu'un responsable au niveau même du gouvernement apparaît nécessaire. La différenciation ministérielle présente donc un caractère empirique, et il arrive même que les circonstances permettent à un service déjà existant sous une autre forme d'être promu au rang de ministère ou de secrétariat d'État. D'autre part, la classification des départements ministériels selon leurs objets n'est pas toujours très sûre, du fait que certaines questions intéressent deux ou plusieurs ministères. Toutefois, les attributions des différents départements ministériels sont fixées par décret en conseil des ministres, après avis du Conseil d'État.

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Sans avoir de personnalité juridique distincte de celle de l'État, chaque ministère voit cependant sa sphère d'attributions protégée juridiquement par les règles relatives au contreseing ministériel. L'article 22 de la Constitution dispose que « les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution », formule interprétée par le Conseil d'État, dans l'arrêt Sicard du 27 avril 1962, comme la nécessité du contreseing de tous les ministres « ayant compétence pour signer ou contresigner les mesures réglementaires ou individuelles que comporte nécessairement l'exécution... » De plus, les compétences ministérielles en matière contentieuse protègent encore la spécialisation des ministères, dans la mesure où l'État est représenté en justice, dans la plupart des cas, par le ministre intéressé.

Si l'on considère les membres des gouvernements de la Ve République, on remarque, en suivant l'ordre protocolaire, que leur rang s'établit ainsi, en dehors du Premier ministre : ministre d'État, ministre délégué, ministre et secrétaire d'État. Les ministres d'État, dont le titre se rapporte moins à la fonction qu'à la personne désignée, disposent, en dehors de la préséance et d'un traitement plus élevé, d'une sorte de droit de regard sur toutes les affaires gouvernementales. Ce titre est rarement attribué. Les ministres délégués se voient attribuer les activités de caractère interministériel, telles que la fonction publique, par exemple, ou l'aménagement du territoire. Les secrétaires d'État sont situés au dernier degré de la hiérarchie ministérielle. On peut distinguer trois types de secrétaires d'État : les secrétaires d'État « autonomes », ou émancipés, qui étaient des ministres sans le titre, ceux qui étaient « rattachés au Premier ministre » et qui se situaient sur le plan interministériel, et enfin ceux qui, comme par le passé, étaient seulement « placés » auprès d'un ministre pour l'assister. Ces trois types ne se rencontrent pas systématiquement dans tous les gouvernements.

Sous l'autorité du ministre, chaque département ministériel comprend un cabinet, constitué des collaborateurs personnels du ministre. Par opposition, les bureaux constituent l'élément permanent de l'administration, et sont organisés en directions et sous-directions, dont le personnel se compose d'administrateurs civils, d'attachés et de secrétaires d'administration. Les directions sont quelquefois réunies sous l'autorité d'un secrétaire général du ministère. Les services centraux comprennent encore des organismes d'inspection et les conseils et comités consultatifs ; les services extérieurs implantés dans les circonscriptions territoriales sont sous la responsabilité de directeurs.

— Annie GRUBER

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Écrit par

  • : assistante en sciences juridiques à l'université de Paris-V-René-Descartes

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