JOURDAIN
Fleuve du Proche-Orient dans lequel, selon les Évangiles, Jésus-Christ fut baptisé par saint Jean-Baptiste. Le Jourdain est long de 360 kilomètres et jouit, grâce à son alimentation karstique et nivale, d'un débit assez régulier, environ 32 mètres cubes par seconde au confluent du Yarmouk. L'étymologie du nom évoque la « descente » et le nom arabe Cheria signifie l'« abreuvoir ».
Formé par la réunion de quatre torrents collectant les eaux de l'Hermon (la branche de Banias et le Hasbani étant les plus importants), le Jourdain entre en Israël, traverse le lac marécageux, drainé, du Houlé (2 m d'altitude) provoqué par un barrage naturel de basalte ; puis il gagne par une gorge étroite le lac de Tibériade ou mer de Galilée (en hébreu, Kinneret) situé à 17 kilomètres en aval. Le lac de Tibériade, à 208 mètres au-dessous du niveau de la mer, profond de 42 à 48 mètres, est déjà salé. En aval du lac, le Jourdain reçoit le Yarmouk, presque aussi abondant, qui lui apporte les eaux collectées sur le versant occidental du djebel Druze. Du lac de Tibériade à la mer Morte, la distance à vol d'oiseau n'est que de 109 kilomètres, mais la longueur du fleuve est de 320 kilomètres. Il décrit en effet des méandres libres dans une plaine alluviale inondable, le Zor, incisé dans le Ghor, plancher du fossé faillé du Jourdain. Deux éperons rocheux divisent la vallée en deux bassins : le bassin de Beisan au nord et le bassin de Jéricho au sud. Il reçoit sur sa rive gauche l'apport de courts oueds descendus de l'escarpement de Transjordanie et drainant le massif de l'Ajloun (Wadī al-zārqa). Il se jette dans la mer Morte, située à 392 mètres au-dessous du niveau de la mer.
Coulant dans des régions arides, le Jourdain est resté longtemps inexploité ; mais ses eaux, convoitées, font l'objet de litiges majeurs entre Israël et les pays voisins, qui contrôlent toutes ses sources et ses affluents. Un premier plan d'aménagement fut élaboré vers 1930 par Hays et Lowdermilk ; le plan de partage Johnston (1950-1955) fut rejeté par les pays arabes. À partir de 1966, Israël a réalisé séparément un système d'irrigation à partir du Jourdain : les eaux, pompées dans le lac de Tibériade, sont élevées à la cote 256 mètres et dirigées par une série de canaux et de conduites vers le sud ; à partir de cet axe fondamental, des canaux vont irriguer la plaine côtière et surtout le nord du désert du Neguev, autour de Beersheba. De son côté, la Jordanie a construit sur le Yarmouk, peu avant son confluent avec le Jourdain, un barrage-réservoir qui permet l'irrigation du Ghor oriental à partir d'un canal de dérivation situé à 6 ou 7 kilomètres à l'est du Jourdain. Après la guerre de Six Jours (1967), l'occupation de la Cisjordanie et du plateau du Golan (qui sera annexé en 1981) permet à Israël de contrôler une partie du bassin du Jourdain et de ses sources, d'assurer sa sécurité en matière d'approvisionnement et d'accroître ses ressources hydrauliques, cela au détriment des habitants des territoires palestiniens, dont Israël devrait, en vertu des accords internationaux, assurer l’approvisionnement en eau. Le fleuve se trouve donc au centre d'un conflit — la question de l'eau au Proche-Orient — dont la solution ne peut passer que par l'établissement d'une paix durable dans la région.
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Écrit par
- Jean-Marc PROST-TOURNIER : agrégé de l'Université, professeur à l'Institut de géographie du Proche et Moyen-Orient, Beyrouth
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