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JEPHTÉ, juge d'Israël (XIIe s. av. J.-C.)

Personnage dont l'histoire est rapportée dans la Bible au Livre des Juges (x-xii), Jephté est issu de la tribu de Gad ; chassé de son pays par ses demi-frères parce qu'il est le fils d'une femme étrangère, il se réfugie dans le pays de Tod et devient chef de bande. Mais ses frères viennent bientôt le supplier de devenir leur chef pour combattre les Ammonites qui revendiquent leur territoire. Avant la bataille, le malheureux Jephté fait le vœu, s'il est vainqueur, de sacrifier la première personne qui viendra à sa rencontre. La victime ainsi désignée est sa propre fille. La fin du règne de Jephté est assombrie par des luttes fratricides avec la tribu d'Éphraïm.

Quelle que soit la valeur du récit concernant le sacrifice de la fille de Jephté, ce sacrifice est lié, dans le texte, à l'existence d'une sorte de cérémonie des femmes : la jeune victime demande à son père de lui laisser deux mois pour aller « pleurer sa virginité », ce qu'elle fait avec ses compagnes ; le texte ajoute : « Et de là vient cette coutume en Israël : tous les ans, les filles d'Israël s'en vont se lamenter quatre jours sur la fille de Jephté le Galaadite. » De ce cérémonial on ne sait à peu près rien, et toute interprétation reste conjecturale.

Des deuils périodiques tels que celui que les filles d'Israël célébraient tous les ans pour commémorer le sacrifice de la victime se retrouvent chez beaucoup de peuples de l'ancien Orient (Phéniciens, Babyloniens, par exemple) et reposent sur le mythe de la mort ou de la disparition d'une divinité, ordinairement de la végétation, quelquefois d'une divinité astrale. Ces deuils étaient très souvent accompagnés de sacrifices humains : le but de la cérémonie était, en effet, d'éliminer de la récolte l'esprit afin que le peuple pût jouir sans péril des fruits de la terre ; on concentrait l'esprit dans une victime animale ou humaine qu'on mettait à mort.

Ainsi en est-il (probablement) d'Iphigénie dont le nom était primitivement celui de la déesse Artémis Tauropolos. La tradition populaire en a fait la fille d'un héros d'épopée nationale, Agamemnon. De la même façon, le récit concernant la fille de Jephté serait la transformation en légende israélite du mythe d'une vieille divinité indigène du pays de Galaad. Cela est d'autant plus vraisemblable que la durée de quatre jours, qui était celle des fêtes funèbres en l'honneur de l'héroïne, serait tout à fait insolite pour le deuil d'une jeune fille israélite : les périodes du deuil rituel étaient en Israël de trois et de sept jours.

— Marie GUILLET

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Pour citer cet article

Marie GUILLET. JEPHTÉ, juge d'Israël (XIIe s. av. J.-C.) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • JUDAÏSME - Histoire des Hébreux

    • Écrit par Gérard NAHON
    • 11 045 mots
    • 4 médias
    ...Abdon, Samson, Héli, Samuel. La tradition juive retient Débora pour sa poésie, le « Cantique de Débora » (Juges, v), Gédéon pour sa stratégie, Jephté pour un vœu imprudent, Samson pour sa force physique, Samuel pour son inspiration prophétique. Au xie siècle, les Philistins, installés sur le...

Voir aussi