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MARMONTEL JEAN-FRANÇOIS (1723-1799)

Peut-être le meilleur élève de Voltaire, même s'il n'a pas le génie de son maître. Né d'une famille obscure et pauvre, d'abord instruit par un prêtre, puis par les Jésuites, il écrit à Voltaire, qui lui promet sa protection, et vient à Paris. Ses débuts sont difficiles, il connaît la misère avant la gloire. On est bien renseigné là-dessus par les Mémoires pour servir à l'éducation de ses enfants, rédigés dans sa vieillesse, riches d'ailleurs en renseignements de tous ordres sur la vie littéraire et mondaine du xviiie siècle.

En 1746, il donne une édition de La Henriade, avec variantes et préface. Voltaire l'aide et lui conseille de travailler pour la scène. Il écrit donc des tragédies, Denys le Tyran (1748), Aristomène (1749), Cléopâtre (1750). Malheureux sur la scène tragique, il donne avec Rameau deux opéras : La Guirlande, Acanthe et Céphise (1751). Mais la gloire se fait attendre, la fortune ne vient pas. Enfin, en 1756, il commence à publier ses Contes moraux qui obtiennent un succès immense dans les deux mondes et sont traduits en un grand nombre de langues. Marmontel devient l'auteur à la mode, il lit ces productions légères à des dîners (par exemple chez Mme Geoffrin) et fournit au théâtre une mine de sujets à exploiter. Tandis que l'abbé Morellet fait son éloge, Palissot, ardent ennemi des philosophes, le déprécie. En 1763, il publie sa Poétique française. Fréron et Palissot crient à l'hérésie en matière de goût, mais il entre à l'Académie française, dont il devient secrétaire perpétuel en 1783 à la mort de D'Alembert.

En 1767, il publie un roman historique et philosophique, Bélisaire, long conte moral sur le dévouement à l'État, le rôle et le caractère du souverain, la simplification des lois, l'égalisation des impôts, l'inutilité du luxe, la tolérance... Le livre vaut à l'auteur une grande réputation ; il en paraît des versions dans presque toutes les langues d'Europe. La Sorbonne censure l'ouvrage, où elle a trouvé trente-sept impiétés. L'archevêque de Paris, Christophe de Beaumont, qui avait condamné L'Émile, condamne Bélisaire. Il s'ensuit une guerre acharnée entre philosophes et théologiens. La querelle se termine bien pour Marmontel, qui est nommé historiographe de France.

En 1777, paraît une sorte de long poème en prose, Les Incas ou la Destruction de l'empire du Pérou, qui est comme la suite de Bélisaire. Marmontel y défend la liberté des opinions religieuses, fait une peinture éloquente du fanatisme et un éloge enthousiaste de Las Casas. Le style est à mi-chemin du Télémaque de Fénelon et des Natchez de Chateaubriand. Les Éléments de littérature, qu'il publie en 1787, sont un recueil des articles qu'il a écrits pour l'Encyclopédie, étendus et améliorés.

Il traverse la Révolution sans trop d'encombre, se cachant pendant la Terreur. Sous le Directoire, il a quelques fonctions — il se définit lui-même comme un modéré.

— Denise BRAHIMI

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Écrit par

  • : ancienne élève de l'École normale supérieure de Sèvres, professeure agrégée des Universités (littérature comparée), université de Paris-VII-Denis-Diderot

Classification

Pour citer cet article

Denise BRAHIMI. MARMONTEL JEAN-FRANÇOIS (1723-1799) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • CHÉNIER ANDRÉ (1762-1794)

    • Écrit par Édouard GUITTON
    • 1 556 mots
    ...Chénier n'est pas l'initiateur, mais un relayeur plus doué que les autres, un représentant de la troisième vague. La première, celle de Saint-Lambert et de Marmontel, produisait déjà à l'heure de la naissance de Chénier (1760-1770). La deuxième, celle de Lemierre et de Roucher, a donné son maximum en 1780....
  • DESCRIPTION

    • Écrit par Jean-Michel ADAM
    • 3 152 mots
    ...l'hypotypose quand l'exposition de l'objet est si vive, si énergique, qu'il en résulte dans le style une image, un tableau. » Même idée, par exemple, chez Marmontel : « Si la description ne met pas son objet sous les yeux, elle n'est ni oratoire, ni poétique : les bons historiens eux-mêmes, comme Tite-Live...
  • ILLUSION THÉÂTRALE

    • Écrit par Elsa MARPEAU
    • 940 mots

    L'illusion désigne généralement une fiction que l'on tient pour vraie. Elle possède un sens optique, moral et métaphysique – trois sens d'ailleurs conjoints dès Platon. Celui-ci distingue en effet le monde des apparences sensibles et celui des Idées, c'est-à-dire le réel perceptible...

  • PATHÉTIQUE

    • Écrit par Bernard CROQUETTE
    • 419 mots

    Est pathétique ce qui, par le spectacle ou l'expression du malheur ou de la souffrance, excite les passions et les émotions vives telles que tristesse, indignation, horreur, pitié, terreur. C'est dans ce sens que Beethoven intitule Sonate pathétique une œuvre où il tente à bon escient...

Voir aussi