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INDIVIDUATION

Sur le plan philosophique, et d'une façon très générale, l'individuation désigne le processus d'organisation qui détermine la réalisation d'une forme individuelle complète et achevée. Qu'il y ait une réalité individuelle est une énigmemétaphysique. Elle se constate. Comment la comprendre ? Derrière toute émergence d'une forme individuelle, comprise comme passage de la puissance à l'acte, Aristote pose un principe d'individuation : l'entéléchie. Par ce principe, tout individué, inorganique ou organique, tend à réaliser la perfection de sa nature. La notion d'individuation a une longue histoire philosophique, dont on peut indiquer plusieurs temps forts : saint Thomas et le principe d'individuation des formes substantielles ; Leibniz reprenant l'hypothèse d'un tel principe pour critiquer le cartésianisme ; le vitalisme moderne, de la constitution du concept d'organisation par les naturalistes français (Cabanis, Lamarck, Geoffroy Saint-Hilaire, Cuvier, C. Bernard), jusqu'aux théories organicistes contemporaines, pour lesquelles l'individuation représente une catégorie de l'organisation bio-psychique (entre autres, Goldstein, Bertalanffy, Piaget). Une œuvre est essentielle pour la compréhension contemporaine des phénomènes d'individuation : celle de Carl Gustav Jung. Tout d'abord, ce dernier a rendu à cette notion toute sa pertinence épistémique en réactualisant le concept d'entéléchie (parallèlement aux travaux de l'embryologiste H. Driesch). Mais, de plus, il en a permis une compréhension nouvelle à la lumière de la psychologie des profondeurs. Son œuvre, par cette notion d'individuation, réinvestit la perspective aristotélicienne dans l'évidence platonicienne d'une réalité archétypique à expérimenter. Selon Jung, l'expérience progressive de cet univers d'archétypes réalise le chemin proprement humain d'individuation.

L'individuation est « le processus psychologique qui fait d'un être humain un « individu » — une personnalité unique, indivisible, un homme total » (Jung, The Integration of the Personality). Parlant de son intuition d'un tel processus, Jung affirme qu'il s'agit de « la notion clé de toute ma psychologie ». C'est en effet sur l'individuation comme processus que repose entièrement sa théorie dynamique et épigénétique de la psyché.

— Alain DELAUNAY

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Pour citer cet article

Alain DELAUNAY. INDIVIDUATION [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANIMUS & ANIMA

    • Écrit par Alain DELAUNAY
    • 1 034 mots
    • 1 média

    Le couple anima-animus joue un rôle important dans la « psychologie des profondeurs » de Carl Gustav Jung. Il s'agit d'une résurgence de deux termes du corpus de la philosophie médiévale. On les rencontre chez de nombreux auteurs, notamment Guibert de Nogent, où généralement ils désignent,...

  • GUILLAUME DE CHAMPEAUX (1070?-1121)

    • Écrit par Olivier JUILLIARD
    • 892 mots
    • 1 média

    Le maître d'Abélard, célèbre par les critiques que celui-ci lui adresse à propos des universaux. Si forte est la personnalité d'Abélard et si profonde son influence sur tout le xiie siècle scolastique qu'on en oublie souvent l'importance de son maître, qu'il traite lui-même de haut....

  • HENRI DE GAND ou GOETHALS (1217?-1293)

    • Écrit par Charles BALADIER
    • 742 mots

    Principalement connu par ses œuvres — une Summa theologica (inachevée), quinze Quodlibeta, des Questions sur la métaphysique, un commentaire de la Physique d'Aristote —, Henri de Gand (de Gandavo), maître séculier de l'université de Paris, enseigna la théologie de 1276 à 1292. Il fut...

  • HENRY DE HARCLAY (1270 env.-1317)

    • Écrit par Olivier JUILLIARD
    • 386 mots

    Étudiant à Oxford, puis à Paris, ordonné prêtre en 1297, Henry de Harclay enseigna la philosophie à l'université d'Oxford, dont il devint chancelier en 1312, et fut ensuite nommé évêque de Lincoln. Toute sa vie, il s'opposa aux Dominicains, mais c'est contre Jean Duns...

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