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HYSTÉRIE (histoire du concept)

« La définition de l'hystérie, disait C. E. Lasègue (1878), n'a jamais été donnée et ne le sera jamais. Les symptômes ne sont ni assez constants, ni assez conformes, ni assez égaux en durée et en intensité pour qu'un type même descriptif puisse les comprendre tous. » Un siècle a passé, l'imprécision demeure ; peu de désordres psychiques ont suscité cependant une telle curiosité, tant de recherches, de discussions passionnées. À en lire le récit, on reste confondu du ton des polémiques ; la bienveillance n'est pas de mise dans ces querelles d'écoles. C'est que l'hystérie, source d'inquiétude autant que d'irritation, défi aux lois de la médecine anatomo-clinique, insaisissable, inclassable, met en cause, plus qu'aucune autre maladie, la subjectivité de celui qui l'aborde. Avec elle jouent librement, massivement, les phénomènes de transfert et de contre-transfert. Les limites mêmes de l'affection sont difficiles à cerner. Si ses aspects typiques, spectaculaires se laissent aisément repérer, il n'en est pas de même des manifestations mineures qui se situent aux confins du normal et du pathologique. Quant aux modalités expressives de l'hystérie, elles tiennent autant du culturel que de l'individuel. Selon l'époque et la culture, le groupe social facilite ou réprime les manifestations les plus bruyantes de la névrose. La civilisation technique les favorisant peu, on est rarement confronté aujourd'hui avec « la grande hystérie » telle qu'elle fut popularisée par l'iconographie de la Salpêtrière au temps de J. M. Charcot, mais l'hystérie n'en a pas disparu pour autant, elle s'est faite plus discrète, elle suit d'autres modes.

Les manifestations de l'hystérie : un langage

L'hystérie est une névrose à manifestations polymorphes dont l'originalité réside en ce que les conflits psychiques inconscients s'y expriment symboliquement en des symptômes corporels variés, les uns paroxystiques comme les attaques (crises convulsives, crises pantomimiques), les autres plus durables (paralysies, contractures, grossesse nerveuse, cécité, etc.). Le symptôme somatique, c'est l'incarnation du fantasme, solution de compromis empêchant l'accès à la conscience du conflit refoulé, tout en permettant une réalisation substitutive et déguisée du désir interdit. L'épreuve de la réalité est ainsi évitée puisque le symptôme corporel se substitue à une représentation (image, idée, souvenir), lorsque les éléments refoulés, alimentés du dedans par les poussées instinctuelles ou réactivés du dehors par les situations, les événements actuels, tendent à réapparaître au niveau conscient. La diminution de la tension anxieuse que provoquent les conflits internes sera le bénéfice primaire, immédiat, de ce que l'on a coutume d'appeler, depuis les premiers textes freudiens, la conversion hystérique. La « belle indifférence » qu'affiche l'hystérique vis-à-vis de ses symptômes est bien le signe que cette conversion, lorsqu'elle est réussie, constitue le plus efficace des mécanismes névrotiques de défense contre l'angoisse. Le domaine de l'hystérie, c'est donc celui des intentionnalités inconscientes, celui des interdits et de leur transgression ; son langage, c'est le langage du corps, déchiffrable à la manière de l'interprétation du rêve puisque les troubles corporels s'y organisent dans leur forme matérielle en fonction des syntaxes signifiantes de l'inconscient. Mais qui dit langage sous-entend interlocuteur, et c'est ici qu'apparaît l'autre fonction du symptôme hystérique qui est de structurer la relation à autrui. Les bénéfices secondaires qui en découlent s'avèrent souvent si importants qu'ils conditionnent largement l'évolution[...]

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Thérèse LEMPÉRIÈRE. HYSTÉRIE (histoire du concept) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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Charcot - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

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