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CAILLEBOTTE GUSTAVE (1848-1894)

Une représentation du monde bourgeois

Le refus des Raboteurs de parquets par le jury du Salon en 1875 accélère l'adhésion du peintre aux idées de Degas et du critique réaliste Edmond Duranty exprimées en 1876 dans son manifesteUne nouvelle peinture : il s'agit de représenter l'individu dans la vérité de son environnement et de sa fonction, d'inventer des points de vue et des coupes qui impliquent une observation renouvelée. À partir de 1876, commence une carrière qui semble s'imposer avec huit toiles dont Jeune homme jouant du piano, Jeune homme à sa fenêtre, Déjeuner. Le monde bourgeois y est perçu selon des intensités différentes : l'étude musicale, la solitude désœuvrée, le rituel familial, l'ordre d'un jardin et surtout le rapport inédit dans un tel cadre avec « les fonctions ouvrières » que montraient les deux versions des Raboteurs. Ce motif parmi d'autres appartient aux attitudes et aux gestes du quotidien qui rendent crédibles une situation par rapport aux choses et à l'espace, ici l'appartement familial parisien.

Le spectateur participe à l'observation du peintre, comme semble en témoigner l'assiette vide au premier plan du Déjeuner. Le peintre, qui fera l'acquisition du Balcon (1869) à la vente Manet en 1884, inverse le principe de composition du tableau en présentant ses personnages à contre-jour. Il affirme surtout dans ses sujets un univers « célibataire », à la différence de Monet ou de Renoir. Cet univers demeure le sien jusqu'à la fin, même quand sa compagne, Charlotte Berthier (à qui il assurera une rente viagère dans un second testament rédigé en novembre 1883) apparaît discrètement dans un espace dont elle semble n'être qu'une des discrètes composantes.

Martial, son jeune frère, musicien de talent, incarne à vingt-trois ans des valeurs de travail et de création qui seront mises en commun avec la même compétence pour des activités aussi différentes que la philatélie, l'horticulture, le yachting, la construction navale et la photographie. Cette dernière activité n'intervient pourtant pas à titre de source pour des compositions picturales dont certaines suggèrent l'utilisation d'une boîte optique. Dans le tableau Le Jeune Homme au piano (1876), la lumière qui accompagne l'activité de l'interprète et du compositeur devant sa partition découvre l'ordre matériel des tentures et des rideaux.

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Écrit par

  • : professeur émérite d'histoire de l'art contemporain à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Éric DARRAGON. CAILLEBOTTE GUSTAVE (1848-1894) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<em>Périssoires</em>, G. Caillebotte - crédits : Leemage/ Corbis/ Getty Images

Périssoires, G. Caillebotte

<it>Le Pont de l'Europe</it>, G. Caillebotte - crédits :  Bridgeman Images

Le Pont de l'Europe, G. Caillebotte

Autres références

  • IMPRESSIONNISME

    • Écrit par Jean CASSOU
    • 9 484 mots
    • 32 médias
    ...qui ne s'améliorera point, que partager les infortunes de ses camarades accablés de charges, tel Monet qui s'est marié. Ceux-là, leurs compagnons les plus aisés les aident, et aussi quelques premiers, très rares, amateurs,Caillebotte, Chocquet, le Dr de Bellio, le baryton Faure, le pâtissier Murer.
  • LE DÉCOR IMPRESSIONNISTE. AUX SOURCES DES NYMPHÉAS (exposition)

    • Écrit par Camille VIÉVILLE
    • 1 153 mots
    • 1 média
    ...corps nus, matité empruntée à la fresque, format horizontal). La salle suivante, « Fleurs et jardins », démontrait avant tout l’appétit remarquable de Caillebotte pour le décor avec le saisissant Parterre de marguerites (vers 1892-1893), traité avant l’heure selon la technique de l'all-over ...

Voir aussi