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MACHAUT GUILLAUME DE (1300 env.-1377)

Guillaume de Machaut, musicien-poète, chanoine de Reims, mêlé intimement à la vie des plus grands personnages de son temps, fut à la fois le dernier des trouvères et l'un des principaux promoteurs de l'art nouveau, l'« Ars nova », codifié par Philippe de Vitry, où il se révéla plus souple et plus varié. La messe de Machaut n'est point seulement un des sommets de la musique médiévale, c'est un chef-d'œuvre universel.

Au service des princes

Guillaume de Machaut est né en Champagne. On présume qu'il étudia à Reims. Une bulle du pape Benoît XII, datée de 1335, nous apprend que Machaut est clerc et secrétaire du puissant Jean de Luxembourg, roi de Bohême, depuis une douzaine d'années. On peut donc tenir pour certain qu'il entra à son service en 1323. Plusieurs de ses œuvres témoignent de son activité auprès de ce prince : Le Jugement du roi de Behaigne (1346 env.), Le Confort d'ami (1357), La Fonteinne amoureuse (1360-1362), La Prise d'Alexandrie (1370-1371).

Pendant dix-sept ans, Machaut suivit son maître, participant à sa vie fastueuse et aventureuse. Il l'accompagna dans ses campagnes jusqu'en Lituanie.

Entre 1337 et 1340 il s'installe à Reims et il commence à écrire, à édifier son œuvre poétique et musical, mais il ne renonce pas à se déplacer au gré de son caprice ou selon les besoins de ses charges officielles.

Après la mort du roi de Bohême à Crécy (1346), Guillaume de Machaut entre au service de sa fille, Bonne de Luxembourg, épouse de Jean de Normandie, futur roi de France (Jean le Bon). À la mort de celle-ci, en 1349, Guillaume trouve un nouveau protecteur en la personne du jeune roi de Navarre, Charles, alors âgé de dix-huit ans. Il est assez paradoxal que Guillaume ait su concilier le service de ce prince intrigant, allié des Anglais, avec les amitiés qu'il a toujours conservées à la cour de France. Il resta fidèle au roi de Navarre jusqu'en 1357. L'impopularité du personnage, l'insuccès de ses entreprises, après l'échec à Paris de la révolte d'Étienne Marcel, et le regain d'autorité du dauphin Charles incitent Machaut à se montrer prudent.

Après le traité de Brétigny (1360), le roi Jean, captif en Angleterre, est libéré contre rançon, et deux de ses fils, Louis et Jean, doivent partir outre-Manche comme otages. Guillaume est chargé d'accompagner Jean de Berry jusqu'à Calais (il nous a laissé le récit de cet événement dans le Dit de la Fonteinne amoureuse).

En 1361, le dauphin Charles se rend à Reims pour arbitrer un conflit entre l'archevêque Pierre de Craon et les habitants de la ville. Il reçoit les échevins rémois au domicile même de Guillaume de Machaut, ce qui confirme le crédit exceptionnel dont ce dernier jouissait auprès de la famille royale.

C'est à cette époque que se place l'idylle de Machaut avec une jeune fille de dix-neuf ans, Péronne d'Armentières, charmée et honorée d'avoir été choisie par un poète et musicien de si grand renom. Cet épisode sentimental trouve son écho dans le Livre du Veoir Dit (1362-1365), comportant, outre la correspondance amoureuse échangée, des pièces lyriques en musique et près de dix mille vers.

Contrairement à la légende, sa messe polyphonique n'est pas exécutée lors du sacre de Charles V à Reims. Il semble hors de doute cependant que Guillaume servit Charles V, sans qu'il soit possible de préciser la nature de ce service.

La chronologie des dernières années de Machaut est plus floue. Parmi les hauts personnages auxquels son nom est associé, il faut citer Pierre de Lusignan, roi de Chypre, à qui il dédie sa Prise d'Alexandrie (1370-1371), et Amédée de Savoie.

Le maître vieillit paisiblement en sa maison de Reims, auprès de son frère Jean, et mourut en 1377 ; du moins est-ce la date généralement admise par les historiens.[...]

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Pour citer cet article

Roger BLANCHARD. MACHAUT GUILLAUME DE (1300 env.-1377) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • MESSE NOTRE-DAME (G. de Machaut)

    • Écrit par Juliette GARRIGUES
    • 251 mots
    • 1 média

    Musicien et poète, Guillaume de Machaut forge de nouvelles règles pour le lai, le virelai, la ballade et le rondeau. Il renouvelle l'expression musicale en retrouvant une spontanéité qu'un xive siècle sclérosé par l'importance de la technique avait oubliée. On a longtemps pensé que...

  • ARS NOVA

    • Écrit par Roger BLANCHARD
    • 6 358 mots
    • 2 médias
    ...bénéfices et l'invita en Avignon. Son successeur Clément VI en fit son « chapelain et commensal » et Philippe le remercia par la dédicace d'un motet. Le plus illustre des musiciens du xive siècle, Guillaume de Machaut, fut également invité en Avignon. On sait le rôle éminent que joua la cité des papes...
  • BALLADE, musique

    • Écrit par Edith WEBER
    • 948 mots
    • 3 médias

    La ballade (en italien ballata, de ballare : danser) est un genre littéraire et musical d'essence lyrique et de structure répétitive. Cette forme, monodique et polyphonique, est en usage de la fin du xiiie siècle jusqu'au xvie siècle. Elle est chantée et dansée par les troubadours,...

  • BASSE, musique

    • Écrit par Henry BARRAUD
    • 3 508 mots
    • 1 média
    Quand Guillaume de Machaut, dans le Credo de la Messe de Notre-Dame, fera un des premiers résonner ensemble les trois sons de l' accord parfait, les musiciens auront la révélation de la valeur en soi d'une agrégation harmonique. En soi, c'est-à-dire indépendante du jeu des parties et de leurs rencontres...
  • CHAUCER GEOFFREY (1340 env.-env. 1400)

    • Écrit par Paul BACQUET
    • 1 288 mots
    • 1 média
    Si l'on s'accorde à reconnaître que l'influence de Machaut, de Jean de Meung, de Boccace fut considérable sur son inspiration, la division ci-dessus ne satisfait plus la critique contemporaine. Au début de sa carrière, Chaucer est certes un poète d'amour français écrivant en anglais ; mais il est surtout...
  • Afficher les 8 références

Voir aussi