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GLACIERS

Fluctuations, avancées et retraits catastrophiques

Fluctuations des glaciers tempérés

Glacier Athabasca, Canada - crédits : H. Saxby, 2005

Glacier Athabasca, Canada

Les positions des fronts des glaciers sont relevées annuellement en Suisse depuis plus d'un siècle, et cet exemple a été suivi par d'autres pays. Un recul a prédominé, paroxysmal autour de 1950. Mais les avances et reculs des divers glaciers ne sont pas en phase : ainsi le glacier des Bossons avance (en gros) depuis 1955, celui du Trient depuis 1962 et la mer de Glace depuis 1970. L'interprétation de ces variations annuelles est difficile. On y voit plus clair en relevant tous les ans les niveaux de sections transversales du glacier, et les vitesses superficielles, en des emplacements fixes, puis en cherchant à les corréler aux bt des années antérieures. Il apparaît qu'une avancée ou un retrait, ce qui est le cas actuellement, du front d'un glacier tempéré peut avoir trois causes : 1o le bilan cette année a été supérieur (ou inférieur) à la normale (bt positif [ou négatif]) ; 2o il arrive au front une onde de crue ; 3o les vitesses de glissement ont augmenté ou diminué ; 4o une modification climatique pluri-annuelle.

Une « onde de crue », ou « onde cinématique », est une intumescence de quelques mètres de hauteur (parfois 20 ou 30 m), et de plusieurs kilomètres de longueur, qui se propage vers l'aval trois à cinq fois plus vite que la glace. Cette vague provient d'une zone en amont où le glacier, plus mince et plus étalé, a mieux profité d'une série de bilans antérieurs favorables. La durée qu'elle met pour atteindre le front, variable selon les glaciers, explique les déphasages d'un glacier à l'autre.

Une théorie a été développée pour rendre compte de ces ondes de crue. On envisage de petites perturbations autour d'un état de régime et on admet que, d'une part, seul le frottement local retient le glacier, comme dans le modèle très simple traité ; d'autre part, la vitesse de glissement est donnée par la loi de Weertman, et croît donc comme le carré de l'épaisseur. Il résulte de cette théorie que, en un lieu donné, les vitesses doivent augmenter l'année où y passe l'onde de crue.

Cette théorie est inexacte dans le cas de glaciers de vallée : l'étude de la mer de Glace et du glacier d'Argentière a montré que les vitesses augmentaient ou diminuaient simultanément sur tout un tronçon de glacier de vallée, long de 5 kilomètres ou davantage. Cela est lié à de forts glissements (cf. Lois de frottement à propos de la résistance « globale » qui contrôle les vitesses).

De plus, il ne s'agit pas toujours de petites fluctuations autour d'un état de régime. Il semble exister des zones stables et des zones instables pour le front. Celui-ci peut, de loin en loin, avancer ou reculer rapidement d'une zone stable à une autre – ce fait est très net et incontestable pour les glaciers marins, se terminant dans un fjord.

Effets morphologiques

C'est lorsqu'un glacier avance sur un terrain meuble (sédiments, ancienne moraine en nappe ou roche fracturée par les alternances de gel et dégel) qu'il a la plus grande action géomorphologique. Le bourrelet qu'il peut pousser devant lui, à la façon d'un bulldozer, est rarement important, mais des débris rocheux s'incorporent aux couches basales (probablement grâce au processus de fonte et regel simultanés), et viennent finalement aboutir en surface, où ils forment une moraine d'ablation. Lorsque le glacier recule, des masses de glace « morte », protégée par cette moraine, peuvent subsister longtemps en aval du nouveau front.

Lac surglaciaire de Safuna Alta (cordillère Blanche du Pérou) - crédits : Encyclopædia Universalis France

Lac surglaciaire de Safuna Alta (cordillère Blanche du Pérou)

Lorsque le bilan (négatif) est uniforme sur toute l'extrémité de la langue, on peut, au lieu d'un recul du front, voir apparaître sur la langue des mares surglaciaires qui grossissent et se réunissent pour former un grand lac surglaciaire (cf. fig.),[...]

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Écrit par

  • : chargé de cours à l'université de Paris-XI
  • : professeur à l'université de Grenoble-I, directeur du laboratoire de glaciologie et géophysique de l'environnement du C.N.R.S., président du Comité scientifique et technique de l'Association nationale de l'étude de la neige et des avalanches

Classification

Pour citer cet article

François ARBEY et Louis LLIBOUTRY. GLACIERS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Carotte glaciaire - crédits : Jason Edwards/ The Image Bank Unreleased/ Getty Images

Carotte glaciaire

Glacier Athabasca, Canada - crédits : H. Saxby, 2005

Glacier Athabasca, Canada

Autres références

  • ACCUMULATIONS (géologie) - Accumulations continentales

    • Écrit par Roger COQUE
    • 5 056 mots
    • 12 médias
    L'accumulation par les glaciers résulte non seulement de leur rôle en tant qu'organismes de transport, mais encore de l'intervention des volumes considérables d'eaux de fusion qu'ils fournissent saisonnièrement. Il existe donc une accumulation glaciaire et fluvio-glaciaire. L'une et l'autre capitalisent...
  • ALASKA

    • Écrit par Claire ALIX, Yvon CSONKA
    • 6 048 mots
    • 10 médias
    76 000 km2 de l'Alaska sont recouverts de glace, soit 5 p. 100 de la surface totale. La mesure est approximative : certains glaciers avancent ou régressent rapidement et leur impressionnant recul depuis le début du xxe siècle est un des marqueurs du réchauffement climatique actuel. Les grands...
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    • Écrit par Jean AUBOUIN, Bernard DEBARBIEUX, Paul OZENDA, Thomas SCHEURER
    • 13 214 mots
    • 11 médias
    ...atteignait un maximum d’environ 3 000 mètres d’altitude dans les hautes Alpes et environ 2 000 mètres sur la bordure de la chaîne. Cette limite supérieure des glaciers est visible, entre autres, dans les formes des sommets et les noms qui leur ont été donnés. En Engadine (Grisons), les montagnes abrasées par...
  • ANDES CORDILLÈRE DES

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    ...centrales). Les actions nivales sont en revanche très limitées en comparaison de celles que l'on trouve dans les montagnes de latitudes moyennes (sud du Chili). Les glaciers, qui sont souvent des résidus des périodes plus froides et humides, flottent dans des moraines trop amples. On distingue les glaciers « de...
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Voir aussi