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FRONDE

La guerre civile

C'est alors que Condé se laissa entraîner à un geste qu'il n'avait jamais envisagé auparavant et dont les conséquences furent tragiques pour le pays. Il traita avec les Espagnols, leva des troupes dans le Midi, s'appuya sur Bordeaux, où un mouvement populaire, l'Ormée, opposé au parlement, dominait la ville. Pour combattre Condé, le roi et la reine quittèrent Paris : ils furent rejoints à Poitiers par Mazarin. Alors, dans la capitale, le lieutenant général et le parlement firent cause commune contre le ministre : ordre fut donné de lui courir sus, sa tête fut mise à prix pour la somme de 150 000 livres, que fournirait la vente de sa bibliothèque et de ses collections. Mais Mazarin put ramener au parti royal Turenne, qui, pendant la désastreuse année 1652, devint l'épée de la monarchie. Car cette guerre civile, menée contre le roi majeur, séparé de sa capitale pour reconquérir un royaume désormais partagé entre les royalistes fidèles et les condéens, accumula les ruines matérielles dans un pays qu'avaient jusque-là épargné les combats de la guerre étrangère. Les troupes pillaient les campagnes. Rentré à Paris après des échecs en Guyenne, Condé trouva le parlement réticent à son égard, la bourgeoisie hésitante, mais les couches populaires tellement excitées contre Mazarin qu'il lui fut aisé d'en attiser la fureur, quitte à assurer le parlement et les bourgeois qu'il était seul capable de les protéger contre les séditions. Les passions s'exaspéraient. Dans les pamphlets de 1652, parurent des revendications violentes : le roi était rendu responsable de la guerre autant que Mazarin, les parlements et les princes.

À Bordeaux, les éléments les plus hardis de l'Ormée proposaient en exemple les Anglais et la république de Cromwell. La Fronde allait-elle dégénérer en guerre sociale ? Après les combats indécis de Bléneau (avril) et la marche de Turenne en direction de Paris (où Condé put se réfugier, grâce à l'intervention de la Grande Mademoiselle, fille de Gaston d'Orléans, qui fit tirer les canons de la Bastille sur l'armée royale), la démagogie parut triompher dans la capitale (la journée de Paille, 4 juillet). L'excès des malheurs détermina tout ce qui était raisonnable à Paris à se détacher de Condé et à souhaiter le retour du roi, s'il ne ramenait pas Mazarin. Le 21 octobre, le roi rentra dans sa capitale et il l'apaisa par une amnistie générale. Mais la lassitude était si grande, et si fort le désir de retrouver l'ordre quotidien, qu'il n'y eut aucun trouble lorsque Mazarin reparut à son tour, en février 1653. Durant l'été, le sacre de Louis XIV à Reims et la reconquête de Bordeaux scellèrent la fin de la Fronde.

— Victor-Lucien TAPIÉ

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Paris

Classification

Pour citer cet article

Victor-Lucien TAPIÉ. FRONDE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

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