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TAYLOR CHARLES (1931- )

Religion et sécularisation

Dans la dernière partie de son œuvre, Charles Taylor décrit plus ouvertement la manière dont le fait d'être un catholique pratiquant a modelé son champ de réflexion et son approche intellectuels. Il évoquait déjà à demi-mots ses conceptions religieuses à la fin de Sources of the Self, mais ses remarques sur le sujet deviennent par la suite plus fréquentes et plus explicites. Avec A Secular Age (2007), Taylor s'implique, par exemple, dans les débats qui émergent au xxie siècle sur le rôle de la religion dans les sociétés modernes occidentales. Cet ouvrage monumental s'intéresse à certains des bouleversements qu'a connus la foi chrétienne dans les sociétés occidentales au cours des cinq derniers siècles, examinant comment les individus modernes sont parvenus à une conception du moi, de la société et du monde naturel purement laïque, dépourvue de toute référence à une essence divine ou à un quelconque principe transcendant. Ce que Taylor appelle l'« imaginaire social moderne » se trouve en opposition directe avec la place de la foi au xvie siècle, lorsque Dieu était présent dans tous les domaines de la vie sociale et politique. Il reste qu'en dépit de l'évolution, au fil du temps, du fait religieux et de sa place dans la société, Taylor semble suggérer que les êtres humains aspirent nécessairement à une certaine « transcendance » – une aspiration à la signification qui dépasse leur nature purement humaine.

Outre ces ouvrages majeurs, Charles Taylor a publié de nombreux textes courts sur des sujets aussi variés que la liberté, la démocratie, le nationalisme, les droits de l'homme, l'anthropologie philosophique, la compréhension interculturelle, la théorie morale, la philosophie du langage, la philosophie de l'esprit et l'épistémologie. Dans l'un de ses essais les plus connus, Multiculturalism and Politics of Recognition (1992), il tente de fournir une explication philosophique plus profonde de la raison pour laquelle certains groupes dans les sociétés occidentales réclament de plus en plus fortement une reconnaissance publique de leur identité particulière, en termes de genre, de race ou d'appartenance ethnique.

Parallèlement à sa carrière universitaire, Charles Taylor s'implique dans la vie politique. Il s'est porté à plusieurs reprises candidat (sans succès) aux élections législatives fédérales canadiennes pour le Nouveau Parti démocratique, qui promeut un programme social-démocrate. Membre du Conseil supérieur de la langue française du Québec, il partage avec Gérard Bouchard en 2007-2008 la direction d'une enquête publique sur l'avenir des différences culturelles et religieuses dans cette province du pays. En 1996, il est par ailleurs élevé au rang de compagnon de l'ordre du Canada, la plus haute distinction civile du pays. Charles Taylor a reçu en 2007 le prix Templeton pour avoir contribué au progrès de la recherche et de la découverte dans le domaine des réalités spirituelles et, en 2008, le prix de Kyōto pour sa contribution significative au progrès scientifique, culturel ou spirituel de l'humanité.

— Ruth ABBEY

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Pour citer cet article

Ruth ABBEY. TAYLOR CHARLES (1931- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DIFFÉRENCE, philosophie

    • Écrit par Alfredo GOMEZ-MULLER
    • 1 541 mots
    ...différence est à la base du débat contemporain sur la justice culturelle. Dans le cadre de ce débat, qui comprend la discussion sur le multiculturalisme, le philosophe canadien Charles Taylor propose d'associer à la politique de l'égale dignité des citoyens (reconnaissance formelle de l'identité universelle...
  • RECONNAISSANCE, sociologie

    • Écrit par Wenceslas LIZÉ
    • 1 061 mots

    La notion de reconnaissance doit une part de son succès à l’omniprésence des phénomènes qu’elle désigne dans le fonctionnement du monde social. Pour saisir simplement cette notion particulièrement labile, on peut dire que la reconnaissance a lieu à chaque fois qu’un individu, un groupe...

Voir aussi