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CGT-FO (Confédération générale du travail-Force ouvrière)

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La distanciation avec le P.S.

Durant la IVe République et au début de la Ve, F.O. et la S.F.I.O. partageaient les mêmes options stratégiques, la troisième force d'abord, le soutien au régime gaulliste ensuite. Les dissensions apparurent après la fin de la guerre d'Algérie, lorsque la logique de la bipolarisation imposa le rapprochement du Parti socialiste et du P.C.F. L'apparition de la C.F.D.T., qui combinait l'unité d'action avec la C.G.T. et la recherche d'une voie originale avec la planification démocratique et l'autogestion, conduisit les dirigeants de Force ouvrière à prendre leurs distances vis-à-vis des socialistes, trop enclins à s'allier avec la deuxième gauche. Une des suites politiques des événements de mai 1968, la signature du Programme commun de gouvernement entre le nouveau P.S. et le P.C.F. en 1972, consacra l'éloignement du syndicat réformiste du courant socialiste.

L'autonomisation de Force ouvrière s'accompagne de transformations idéologiques et pratiques. Les orientations de la « vieille C.G.T. » furent insensiblement révisées. Au lieu de promouvoir un syndicalisme unitaire et doté d'un projet global, André Bergeron accepte le pluralisme et se limite à la défense des intérêts des salariés. L'idée du plan, si fortement avancée en 1953, est réduite à un instrument de régulation souple et indicative. Les « nationalisations industrialisées » ne sont plus évoquées. Le laïcisme est atténué. La vie contractuelle et le paritarisme vont constituer désormais le cœur du syndicalisme. F.O. se définit comme le support des accords collectifs et le gestionnaire de la Sécurité sociale, des régimes de retraite complémentaire et d'aide aux chômeurs. Elle s'applique à établir avec le gouvernement et le patronat les meilleurs compromis possibles, sans menacer la démocratie politique et la paix sociale. Les entretiens d'André Bergeron avec Georges Pompidou puis avec Valéry Giscard d'Estaing symbolisaient le rôle d'interlocuteur privilégié que la confédération entendait tenir.

Depuis 1948, Force ouvrière comporte en son sein des minorités qui contestent son réformisme : anarchistes comme Maurice Joyeux, syndicalistes révolutionnaires tel Alexandre Hebert, ou trotskistes avec les figures connues d'Arlette Laguiller et de Pierre Boussel-Lambert. En 1974, une poignée de militants influencés par le C.E.R.E.S. déposent au congrès de Toulouse un amendement dont le sens est de rappeler l'inspiration socialiste de la confédération : ils obtiennent 8,3 p. 100 des voix. À la fin de la même année, le courant de Jean-Pierre Chevènement réclame l'exclusion d'André Bergeron du Parti socialiste, dont il est membre depuis 1936. Dans Ici et maintenant, François Mitterrand rappelle l'épisode et l'opposition qu'il marqua au projet. André Bergeron s'en souviendra en 1980, lorsqu'il déclare à la Dépêche du Midi que le premier secrétaire du P.S. est « le mieux à même de rassembler les courants qui composent le Parti socialiste » pour le conduire à la victoire de 1981. Le C.E.R.E.S. se manifeste encore au congrès de 1977, où une résolution « socialiste » obtiendra 9,4 p. 100 des mandats. Chant du cygne pour ceux qui se proposent de rapprocher officiellement F.O. du P.S.

Sous la première présidence de François Mitterrand, F.O. subit des épreuves, avec la perte de la primauté au Conseil supérieur de la fonction publique, avec la sanction infligée par Nicole Questiaux à un responsable de la Sécurité sociale dans les Bouches-du-Rhône, René Lucet, qui se suicidera, avec une controverse sur une aide en dollars fournie par le Free Trade Union Institute. La centrale conjugue habilement, dans les négociations interprofessionnelles et professionnelles, la fermeté et l'art de la concession, de sorte que son audience s'accroît.[...]

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Écrit par

  • : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis
  • : docteur en science politique, directeur de recherche à la Fondation nationale des sciences politiques

Classification

Pour citer cet article

Encyclopædia Universalis et René MOURIAUX. CGT-FO (Confédération générale du travail-Force ouvrière) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Média

Manifestation contre la réforme des retraites, France, 2008 - crédits : Franck Crusiaux/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Manifestation contre la réforme des retraites, France, 2008

Autres références

  • BERGERON ANDRÉ LOUIS (1922-2014)

    • Écrit par
    • 890 mots
    • 1 média

    André Bergeron fut secrétaire général de la Confédération générale du travail-Force ouvrière (C.G.T.-F.O.) de 1963 à 1989.

    André Louis Bergeron est né le 1er janvier 1922, près de Belfort. Après avoir obtenu le certificat d’études, il entre, à l’âge de quatorze ans, comme apprenti typographe...

  • BLONDEL MARC (1938-2014)

    • Écrit par
    • 941 mots
    • 1 média

    Secrétaire général de la Confédération générale du travail-Force ouvrière (C.G.T.-F.O.) de 1989 à 2004, Marc Fiacre Henry Blondel est né le 2 mai 1938 à Courbevoie dans une famille originaire de la ville minière Hénin-Liétard (aujourd’hui Hénin-Beaumont) dans le Nord.

  • CGT (Confédération générale du travail)

    • Écrit par , et
    • 4 429 mots
    • 1 média
    ...surtout chez les militants venus de l'ancienne C.G.T. d'avant 1936. Dès lors, un certain nombre de dirigeants démissionnent du bureau confédéral et constituent une nouvelle centrale : la Confédération générale du travail-Force ouvrière (C.G.T.-F.O.) dont Léon Jouhaux devient le secrétaire général.
  • FRANCE - L'année politique 1996

    • Écrit par
    • 3 966 mots
    • 1 média
    F.O., sous la conduite de Marc Blondel, rompt avec la cogestion pratique de l'ère Bergeron, au profit d'un retour à des sources revendicatives vigoureuses. Le syndicat en paie le prix avec son éviction de la direction de l'U.N.E.D.I.C. au profit de la C.F.D.T. qui, sous la ferme houlette de ...