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ANSARS ou ANÇĀRS

Nom donné aux croyants de Médine qui recueillirent et protégèrent le prophète Mahomet lors de sa fuite de La Mecque, les Ansars (en arabe : les défenseurs) sont souvent appelés : Ansar An-Nabi (« défenseurs du Prophète »). Au Soudan, les Ansars, ralliés au parti Umma, sont l'une des deux sectes politico-religieuses qui représentent la droite nationaliste du pays. Primitivement, Muhammad Ahmad, le Mahdi, donna le nom d'Ansars à ses disciples et à ses troupes, formées de soldats puritains levés pour la « guerre sainte », que les Européens appelèrent les « derviches ». En 1881, les Ansars infligent une défaite aux Turco-Égyptiens, ainsi qu'en 1882, date à laquelle ils harcèlent les garnisons ottomanes du pays. En 1883, les Ansars assiègent et prennent la ville importante d'Al-Obeid. En 1884, ils mettent en pièce une armée égyptienne commandée par un Anglais – le général Charles Gordon – et ils ont un rôle prépondérant dans le siège et la prise de Khartoum en 1885. Fer de lance de l'expédition contre l'Abyssinie (1889), puis lors de la marche contre l'Égypte (défaite de Toukshi, 1889), ils subissent en 1891 une lourde défaite en essayant de prendre le port de la mer Rouge de Suakin aux Anglo-Égyptiens, ainsi que devant les Italiens d'Érythrée (1893). En novembre 1899 enfin, les Ansars, après un combat héroïque, sont écrasés par les Anglo-Égyptiens près de l'île d'Abba, berceau de leur mouvement : la Mahdia. Symbole d'un retour aux sources de la foi islamique et de la lutte contre l'étranger, les Ansars deviennent vite le symbole du nationalisme nord-soudanais et sont tenus à l'écart par les Anglais. Mais Londres, pour lutter contre la propagande pan-islamique et pro-allemande du sultan d'Istanbul, demande en 1919 au descendant du Mahdi de combattre l'influence ottomane dans le pays. Revenus à la vie politique du pays, les Ansars seront les partisans farouches d'un « Soudan aux Soudanais », par opposition à la secte Khatmiyya ; celle-ci est en effet partisane d'une Union de la vallée du Nil aux côtés de l'Égypte, vers laquelle les intellectuels et les hommes politiques du pays ont toujours tourné leurs regards. En 1945, les nationalistes soudanais créent le parti Umma (Parti de la nation) qui s'associe à la confrérie religieuse des Ansars, dirigée par le descendant du Mahdi, Sayyid Abderahman al-Mahdi, et qui réclament l'indépendance complète du pays.

Depuis lors, le parti Umma est, avec le Parti démocratique du peuple, lié à la confrérie religieuse des Khatmiyyas, les représentants des forces de droite et traditionalistes du pays. Avec l'assentiment de Londres, une assemblée législative est créée en 1946 et le parti Umma en détient la plupart des sièges. Cependant, c'est le leader du parti rival, al-Azhari, qui devient Premier ministre du Soudan indépendant en 1956. Comme les autres partis, l'Umma et les Ansars voient leurs activités mises en veilleuse lors de la prise du pouvoir par le lieutenant général – devenu par la suite maréchal – Ibrahim Abboud en 1958. Lorsqu'il fait partie du Front progressiste, en 1964, celui-ci instaure une lutte à outrance contre les partis de gauche ; battu cependant aux élections en 1968, il doit quitter le Front et passe à une opposition très agissante.

Le coup d'État du général Nimeyri (Nimaīri), le 25 mai 1969, et, avec lui, l'arrivée au pouvoir d'un homme désireux d'installer un « socialisme soudanais » calqué sur le nassérisme portent un coup aux partis politiques traditionnels, puisqu'il veut polariser la vie politique du pays autour d'un parti unique, l'Union socialiste soudanaise. En 1970 et 1971, les mahdistes, sans doute aidés par l'Arabie Saoudite, sont brutalement écrasés ; ils restent cependant[...]

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Écrit par

  • : diplômé de l'Institut national des langues et civilisations orientales, docteur de troisième cycle

Classification

Pour citer cet article

Yves THORAVAL. ANSARS ou ANÇĀRS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ABŪ BAKR (570 env.-634)

    • Écrit par Khalifa SOUA
    • 1 049 mots

    Premier calife musulman, ami, beau-père et successeur du Prophète Mahomet ‘Abd Allāh, Abū Bakr reçut le surnom de ‘Atīq (affranchi), puis celui d'al-Siddīq (le crédule), parce qu'il aurait été le premier à avoir cru immédiatement à l'histoire du voyage nocturne de Mahomet à ...

  • ARABIE

    • Écrit par Universalis, Robert MANTRAN, Maxime RODINSON
    • 7 614 mots
    ...l'honneur d'appartenir à la ville choisie comme résidence par le Prophète, et les Mecquois, concitoyens d'origine de Mahomet. Opposition également entre les Ançār (auxiliaires), qui furent les premiers Médinois à soutenir Mahomet, et les Mouhājjiroūn (émigrés), premiers fidèles du Prophète ; opposition...
  • SOUDAN

    • Écrit par Universalis, Alain GASCON, Roland MARCHAL
    • 12 406 mots
    • 10 médias
    ...alliances et les divisions sous-tendent les violentes oppositions qui déchirent la vie politique. La Khatmiyya (une confrérie musulmane) affronte les Ansar (les partisans du descendant du Mahdi, Sadeq al-Mahdi, déposé par Omar el-Béchir, en 1989) et les Frères musulmans de Hassan al-Tourabi, tantôt...

Voir aussi